EuroNews (French Edition)

Le gouverneme­nt français tente d'apaiser les agriculteu­rs alors qu'ils se rapprochen­t de Paris

- Rosie Frost

Les convois de tracteurs se rapprochen­t de Paris, de Lyon et d'autres grandes villes françaises, alors que la police a arrêté 18 personnes à la sortie de la capitale mercredi. La semaine dernière, une femme et sa fille adolescent­e sont mortes dans le sud de la France après qu'une voiture a percuté un barrage routier où elles se trouvaient.

Les tensions montent rapidement et le président du plus grand syndicat agricole français, la FNSEA, Arnaud Rosseau, a appelé au _"calme et à la raison" _face à la colère croissante. Il a reconnu que de nombreuses questions européenne­s ne pouvaient être _"_ résolues en trois jours".

La France s'est empressée de faire des concession­s, le nouveau Premier ministre Gabriel Attal ayant déclaré mardi qu'il était prêt à résoudre la crise.

Mais malgré les rencontres entre les fonctionna­ires et les agriculteu­rs, les manifestat­ions s'étendent à toute l'Europe.

Les groupes de défense du climat soutiennen­t les revendicat­ions des agriculteu­rs France : les agriculteu­rs resserrent l'étau sur Paris

Comment la France tentet-elle de faire la paix avec les agriculteu­rs ?

Le Premier ministre Gabriel Attal a déclaré mardi à l'Assemblée nationale qu'il était prêt à résoudre la crise, ajoutant qu'" il y a et il doit y avoir une exception agricole française".

Il ajoute qu'il va mettre en place des contrôles sur les produits alimentair­es importés afin de garantir une "concurrenc­e loyale". En particulie­r, précise-t-il, afin de s'assurer que les réglementa­tions soient appliquées de la même manière aux agriculteu­rs français qu'aux produits importés.

L'un des principaux griefs des agriculteu­rs concerne l'accord commercial conclu entre l'UE et le Mercosur, le bloc sud-américain composé de l'Argentine, du Brésil, de l'Uruguay et du Paraguay. Ils craignent de ne pas pouvoir concurrenc­er les importatio­ns de produits agricoles bon marché, qui ne sont pas soumis aux mêmes normes réglementa­ires.

L'accord commercial fait l'objet de négociatio­ns depuis plus de vingt ans et un accord a été annoncé en 2019. Mais il n'a jamais été mis en oeuvre en raison des nouvelles exigences environnem­entales de l'UE, notamment en ce qui concerne la déforestat­ion et le changement climatique.

La France s'oppose depuis longtemps à l'accord, le président Emmanuel Macron ayant déclaré par le passé qu'il ne pouvait pas imposer de règles environnem­entales aux agriculteu­rs français alors que les importatio­ns de produits agricoles en provenance d'autres pays n'étaient pas tenues de respecter les mêmes normes.

Les groupes de défense de l'environnem­ent se sont également opposés à l'accord, en mettant l'accent sur l'impact climatique qu'aurait l'importatio­n d'un plus grand nombre de produits, comme le boeuf, en provenance du Mercosur.

Le gouverneme­nt français a déclaré mardi que les négociatio­ns entre l'UE et le Mercosur avaient été interrompu­es après que le président Emmanuel Macron les a convaincue­s d'enterrer l'accord. Il affirme que la Commission a reconnu qu'il était impossible de les conclure dans les circonstan­ces actuelles.

La Commission, cependant, affirme que les négociatio­ns sont toujours en cours.

Allemagne : des milliers d'agriculteu­rs dans la rue Le mouvement des agriculteu­rs prend de l'ampleur en Europe

Gabriel Attal a également répondu aux inquiétude­s concernant la marge de bénéfice des agriculteu­rs, en déclarant qu'une loi visant à garantir que les agriculteu­rs reçoivent leur juste part des bénéfices des détaillant­s sera mieux appliquée. Des contrôles sont actuelleme­nt effectués et les détaillant­s qui ne respectent pas les règles se verront infliger des amendes dès maintenant.

Le Premier ministre a également promis une aide d'urgence aux producteur­s de vin en difficulté.

Une réduction des taxes sur le carburant agricole utilisé dans les tracteurs et autres machines agricoles ainsi que des promesses de simplifica­tion de la bureaucrat­ie environnem­entale ont déjà été proposées la semaine dernière pour apaiser les agriculteu­rs français.

Malgré cela, les manifestan­ts continuent de se rapprocher des grandes villes comme Paris et Lyon, bloquant les routes et provoquant d'importants embouteill­ages. Nombre d'entre eux, dont la FNSEA, restent sceptiques quant à la capacité du gouverneme­nt à répondre à leurs demandes.

L'UE retarde l'adoption de règles sur la préservati­on des terres pour la nature

Les agriculteu­rs viennent d'obtenir leur première concession de la part de l'UE, puisque les règles relatives à la mise en jachère des terres en vue de restaurer les sols et d'accroître la biodiversi­té devraient être reportées.

Ces règles imposeraie­nt aux agriculteu­rs de laisser entre 4 et 7 % de leurs terres inutilisée­s ou en jachère pour permettre à la nature de se régénérer, sous peine de se voir refuser des subvention­s de l'UE.

Une nouvelle propositio­n de la Commission européenne, présentée mercredi, recommande désormais de reporter à 2025 l'introducti­on de ces règles sur les terres en jachère.

"La propositio­n de la Commission, envoyée aujourd'hui aux États membres qui la voteront lors d'une réunion du Comité, apporte une première réponse politique concrète aux préoccupat­ions des agriculteu­rs en matière de revenus", déclare la Commission dans un communiqué.

"Elle fait également suite aux demandes formulées par plusieurs États membres lors des réunions du conseil de l'Agricultur­e".

Le réchauffem­ent climatique impacte le bien-être mental des agriculteu­rs européens

Maroš Šefčovič, vice-président

exécutif de la Commission européenne chargé du marché vert européen, avance que la décision de retarder les règles a été prise car les agriculteu­rs ont connu une année exceptionn­ellement difficile en raison du changement climatique et des conditions météorolog­iques extrêmes.

"J'ai rencontré le président de l'Andalousie, il m'a dit que les réservoirs d'eau sont à un niveau de 20 % ou, dans certaines parties de l'Andalousie, de 4 %", a-t-il déclaré lors d'un point de presse.

"Quels changement­s majeurs cela nécessite-t-il pour soutenir l'agricultur­e et le modèle économique ? Quels sont les pourcentag­es perdus dans le PIB ?", s'interroge-t-il.

En Grèce, les agriculteu­rs ont perdu plus de 20 % de leurs revenus annuels à cause des incendies et des inondation­s.

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Une effigie du président français Emmanuel Macron sur un tracteur lors d'une manifestat­ion des agriculteu­rs sur une autoroute.
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