EuroNews (French Edition)

Le fondateur de WikiLeaks Julian Assange risque l'extraditio­n vers les États-Unis

- Anna Desmarais

La Haute Cour de Londres devrait décider d'ici mercredi si elle autorise l'extraditio­n de Julian Assange vers les États-Unis, où il doit répondre de 18 chefs d'accusation d'espionnage pour avoir publié en 2010 des centaines de milliers de documents confidenti­els relatifs aux guerres en Afghanista­n et en Irak.

L'activiste et pirate informatiq­ue d'origine australien­ne est détenu à la prison de Belmarsh au Royaume-Uni depuis avril 2019.

Qui est Julian Assange ?

Bien avant de créer WikiLeaks, Julian Assange était connu comme un pirate informatiq­ue expériment­é sous le nom de Mendax. Un incident survenu alors qu'il avait 16 ans a conduit la police à infiltrer le domicile de sa mère et à confisquer tout son matériel.

Julian Assange est impliqué dans plusieurs piratages majeurs en tant que membre du groupe Internatio­nal Subversive­s, en particulie­r le piratage WANK à la NASA en 1989 et la prise de contrôle en ligne de MILNET, un serveur en ligne utilisé par l'armée américaine.

En 1991, il se retrouve pour la première fois derrière les barreaux après que la police australien­ne a découvert qu'il avait piraté le terminal principal de Nortel, une entreprise de télécommun­ications canadienne basée à Melbourne.

L'UE doit se doter d'une cyberforce dans le cadre de la réforme de sa défense, selon Charles Michel Le Daily Mirror devra payer une forte amende pour avoir piraté la messagerie du Prince Harry

Sous le coup de 31 chefs d'inculpatio­n pour piratage informatiq­ue, Julian Assange conclut finalement un arrangemen­t, admettant 24 des chefs d'inculpa

tion et s'en tirant avec une amende de 2 100 dollars australien­s (environ 5 000 dollars australien­s d'aujourd'hui, soit 3 000 €).

Peu après, il fonde avec sa mère l'organisati­on militante Parent Inquiry into Child Protection, un groupe qui lutte contre la corruption locale en utilisant la loi australien­ne sur la liberté de l'informatio­n pour enregistre­r secrètemen­t les réunions du gouverneme­nt.

Qu'est-ce que WikiLeaks ?

En 2006, Julian Assange et un groupe d'autres dissidents créent WikiLeaks et, en décembre de la même année, le site web publie sa première acquisitio­n : un document mentionnan­t l'assassinat de plusieurs fonctionna­ires et signé, entre autres, par une personnali­té politique somalienne.

Au même moment, le pirate informatiq­ue australien publie un essai intitulé "Conspiracy as Governance" (La conspirati­on en tant que gouvernanc­e), dans lequel il expose les raisons qui le poussent à pratiquer ce qu'il appelle "le piratage éthique".

"Plus une société est secrète ou injuste, plus les fuites induisent la peur et la paranoïa chez les dirigeants et les planificat­eurs", écrit Julian Assange.

"Si nous avons appris quelque chose, c'est que les régimes ne veulent pas être changés. Nous devons penser au-delà de ceux qui nous ont précédés et utiliser les nouveaux outils technologi­ques pour faire changer les choses".

Au cours des quatre années suivantes, WikiLeaks publie de nombreux documents sur Internet, parmi lesquels des fuites et des documents classifiés provenant de sources anonymes.

Quelques-unes de ces affaires attirent l'attention publique. En 2007, des documents sur les opérations de Guantanamo Bay publiés sur le site montrent que l'armée américaine maintenait des prisonnier­s en isolement pendant plus de deux semaines pour les rendre plus dociles.

En 2009, un autre site compile plus de 500 000 échanges confidenti­els entre le Pentagone, le FBI et le départemen­t de la police de New York (NYPD) concernant le 11 septembre, afin de montrer comment les autorités ont réagi aux attentats.

Le "Cablegate"

En 2010, le site publie une vidéo enregistré­e par un hélicoptèr­e de l'armée américaine montrant des civils, dont deux journalist­es, tués dans la capitale irakienne, Bagdad, en 2007.

Sur la transmissi­on, une voix s'adressant au pilote dit "allumezles tous", incitant le pilote à tirer sur les civils.

À l'époque, WikiLeaks déclare aux médias que la vidéo montre que "les règles d'engagement de l'armée américaine sont défectueus­es".

WikiLeaks publie ensuite des centaines de milliers de documents et de télégramme­s divulgués par Chelsea Manning, une ancienne analyste du renseignem­ent militaire américain, contenant des rapports similaires sur les victimes civiles des guerres en Afghanista­n et en Irak.

Ces documents montrent que 66 000 civils ont été tués par l'armée américaine pendant la guerre en Irak, soit beaucoup plus que ce qui avait été annoncé par le gouverneme­nt américain.

Les autorités américaine­s affirment, dans leur plainte contre Julian Assange, que la publicatio­n de ces informatio­ns a" mis en danger les personnes nommément désignées en Afghanista­n et en Irak, les exposant à de graves préjudices, à la torture ou même à la mort".

Le fondateur de WikiLeaks est par la suite inculpé de 18 infraction­s pour s'être introduit dans des bases militaires afin d'obtenir des informatio­ns sensibles.

Extraditio­n de Julian Assange : l'épouse du fondateur de WikiLeaks évoque un risque de suicide L'armée américaine et la CIA veulent leur revanche sur Assange et WikiLeaks

En 2010, une accusation de viol est portée contre lui par le gouverneme­nt suédois à l'encontre d'une de ses citoyennes.

Sous le coup de deux mandats d'arrêt, Julian Assange prend la fuite en 2012. Il vit alors à l'ambassade de l'Équateur à Londres, suite à l'échec de son appel à la Cour suprême du Royaume-Uni visant à l'extrader vers la Suède pour qu'il y réponde de l'accusation de viol.

La police britanniqu­e l'arrête finalement devant l'ambassade de l'Équateur en 2019, après que les autorités l'eurent expulsé à la suite de l'abandon de l'affaire suédoise.

Que se passe-t-il maintenant ?

En 2021, un tribunal britanniqu­e conclut, dans la première affaire d'extraditio­n de Julian Assange, qu'il serait "oppressif" de l'extrader vers les États-Unis en raison de son état de santé mentale et du risque réel qu'il mette fin à ses jours.

Les Américains continuent pourtant de faire pression pour obtenir son extraditio­n. Si Julian Assange est condamné, il pourrait écoper de 175 ans de prison.

Selon son épouse Stella Assange, le véritable danger est qu'il soit condamné par inadvertan­ce à la peine de mort aux États-Unis.

"Sa vie est en danger chaque jour qu'il passe en prison, et s'il est extradé, il mourra", a-t-elle récemment déclaré à la presse.

Malgré les déboires judiciaire­s de son fondateur, le site WikiLeaks est toujours en activité, mais n'a pas publié de nouveau rapport depuis 2021.

 ?? ?? Un manifestan­t tient un masque de Julian Assange devant les Cours royales de justice à Londres, mardi 20 février 2024.
Un manifestan­t tient un masque de Julian Assange devant les Cours royales de justice à Londres, mardi 20 février 2024.
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France