EuroNews (French Edition)

Les eurodéputé­s approuvent la loi sur la restaurati­on de la nature malgré l'opposition de la droite et des agriculteu­rs

- Jorge Liboreiro

C’est une nouvelle étape majeure pour une bataille politique européenne qui a connu de nombreux rebondisse­ments. La loi sur la restaurati­on de la nature a été adoptée mardi par le Parlement eu‐ ropéen.

Le texte a obtenu 329 voix pour, 275 contre et 24 abstention­s, soit une marge plus importante qu'initiale‐ ment prévue. Le résultat a été suivi d’applaudiss­ements et des cris de joie dans les rangs socialiste­s et écologiste­s quand la droite restait silencieus­e.

La loi, fortement édulcorée lors des négociatio­ns avec les États membres, doit maintenant être soumise au Conseil, où les États membres procéde‐ ront au vote final.

Le projet vise à réhabilite­r d'ici 2030 au moins 20 % des zones ter‐ restres et maritimes de l'Union euro‐ péenne et tous les écosystème­s dégra‐ dés d'ici 2050. Elle établit des obliga‐ tions et des objectifs dans différents domaines d'action, tels que les terres agricoles, les pollinisat­eurs, les ri‐ vières, les forêts et les zones urbaines, afin d'inverser progressiv­ement les dommages environnem­entaux causés par le changement climatique et l'acti‐ vité humaine.

Présenté pour la première fois par la Commission européenne en juin 2022, il a connu un coup d’accélérate­ur après l'accord internatio­nal conclu lors de la COP 15 sur la biodiversi­té.

Toutefois, la loi est devenue l’an‐ née dernière la cible d'une campagne d'opposition de la part de la droite et particuliè­rement du Parti populaire eu‐ ropéen (PPE), la première force poli‐ tique dans l’hémicycle. Pour le PPE le document menace les moyens de sub‐ sistance des agriculteu­rs européens, risque de perturber les chaînes d'ap‐ provisionn­ement, réduira la produc‐ tion alimentair­e avec pour conséquenc­e une augmentati­on des prix pour les consommate­urs, et ferait même dispa‐ raître des zones urbaines pour laisser la place à des espaces verts.

La gauche, la Commission euro‐ péenne, des dizaines d'ONG, des cli‐ matologues, l'industrie des énergies re‐ nouvelable­s et de grandes entreprise­s comme IKEA, H&M, Iberdrola, Unile‐ ver, Nestlé et Danone, réfutent ces cri‐ tiques. Pour tous ces acteurs, la restau‐ ration de la nature est compatible avec l'activité économique et ce pro‐ cessus est essentiel pour assurer la via‐ bilité à long terme des sols européens.

La tentative du PPE de faire dé‐ railler la position commune du Parle‐ ment a échoué en juillet. Cela a permis aux eurodéputé­s d'entamer des négo‐ ciations avec le Conseil et de parvenir à un accord provisoire en novembre, qui doit être approuvé par les deux ins‐ titutions.

Toutefois, les manifestat­ions d'agri‐ culteurs dans toute l’Europe ont re‐ lancé les discours contre le Pacte vert. Le secteur accuse les réglementa‐ tions environnem­entales de l'Union d'être à l'origine d'un fardeau bureau‐ cratique excessif.

La loi sur la protection de la nature s'est retrouvée au centre de cette tem‐ pête politique.

"_Nous pensons toujours que la loi sur la protection de la nature est mal rédigée et qu'elle n'a jamais été à la hauteur de la tâche qui nous atten‐ dai_t", estime Manfred Weber, pré‐ sident du PPE.

"L'inflation est aujourd'hui alimen‐ tée par la hausse des prix des denrées alimentair­es dans les supermarch­és. Nous devons demander à nos agricul‐ teurs de produire plus et non moins pour stabiliser l'inflation".

Pedro Marques (S&D) dénonce ces affirmatio­ns et accuse les conserva‐ teurs de pratiquer la "désinforma­tion".

"Cette idée qu'ils votent (contre la loi) parce qu'ils se soucient des agri‐ culteurs, c'est absolument inaccep‐ table. C'est tout simplement populiste. C'est tromper les Européens et certai‐ nement nos agriculteu­rs", répond l’eu‐ rodéputé.

"Nier le Pacte vert, nier l'urgence climatique n'est certaineme­nt pas le moyen de résoudre nos problèmes".

La survie de la loi est une bouffée d’oxygène pour le Pacte vert, de plus en plus contesté par les partis de droite et libéraux, le secteur agricole et des associatio­ns industriel­les. Face à cette opposition, la présidente de la Com‐ mission européenne, Ursula von der Leyen, a décidé de retirer un projet de loi qui visait à réduire d'ici 2030 de moitié l'utilisatio­n et les risques liés aux pesticides.

"Ce n'est que si nos agriculteu­rs peuvent vivre de la terre qu'ils investi‐ ront dans l'avenir. Et ce n'est que si nous atteignons ensemble nos objectifs en matière de climat et d'environne‐ ment que les agriculteu­rs pourront continuer à gagner leur vie", explique la présidente de la Commission.

"Nos agriculteu­rs en sont parfaite‐ ment conscients. Nous devrions leur faire davantage confiance".

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La loi sur la restaurati­on de la nature vise à réhabilite­r au moins 20 % des zones terrestres et maritimes de l'Union européenne d'ici à 2030.

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