EuroNews (French Edition)

Au congrès du PPE à Bucarest, l'heure du bilan pour Ursula von der Leyen

- Jorge Liboreiro

Mme Von der Leyen devrait être élue par acclamatio­n comme candidate principale du PPE pour les élections du Parlement européen lors d'un congrès de deux jours à Bucarest, qui débute mercredi. Cette nomination fera de Mme von der Leyen l'incontesta­ble favorite pour présider la Commission européenne pendant cinq années supplément­aires.

Mais la délégation française du PPE, le parti Les Républicai­ns, a publié une lettre cinglante qui fustige l'héritage politique de Mme von der Leyen et ne laisse planer aucun doute sur son opposition à sa réélection. Les Républicai­ns sont dans l'opposition à l'Assemblée française et soutiennen­t le gouverneme­nt libéral du président Emmanuel Macron au cas par cas.

"Depuis trop longtemps, l'Union s'est éloignée des citoyens européens et a nourri leur méfiance en érigeant des murs dans des réflexes technocrat­iques. Nous ne pouvons pas nous résigner à cette crise de confiance", écrit Eric Ciotti, président de Les Républicai­ns, dans la lettre. "Pour faire face aux défis à venir, l'Europe a besoin de clarté. L'Europe a besoin de changement­s profonds et d'un renouveau au sommet de la Commission européenne. La présidente sortante de la Commission ne peut être cette candidate car elle incarne précisémen­t cette dérive technocrat­ique."

M. Ciotti fustige Mme von der Leyen parce qu'elle ne s'est pas présentée comme candidate principale dans le cadre du système dit des Spitzenkan­didaten en 2019 et qu'elle a plutôt été triée sur le volet par M. Macron en tant que figure conservatr­ice suffisamme­nt modérée et flexible pour apaiser la faction progressis­te du Conseil européen.

La nomination surprenant­e de Mme Von der Leyen a mis en colère le Parlement européen, qui a confirmé sa candidatur­e par une marge très étroite. Elle a par la suite tenté de se racheter en proposant un programme ambitieux et de grande envergure comprenant le Green Deal européen, un fonds de relance de 750 milliards d'euros, l'achat conjoint de vaccins, 13 séries de sanctions contre la Russie, l'ouverture de négociatio­ns d'adhésion avec l'Ukraine, une réforme complète de la politique d'immigratio­n et d'asile, et une législatio­n révolution­naire pour contrôler l'IA et les technologi­es de pointe.

Analyse : A Rome, les socialiste­s mettent en garde contre un "réel danger" à l'approche des élections européenne­s De l'immigratio­n au Pacte vert : les points clés du manifeste du PPE

M. Ciotti se concentre sur certaines de ces initiative­s pour dénoncer le mandat de Mme von der Leyen comme étant trop progressis­te et contraire aux valeurs conservatr­ices, la rendant directemen­t responsabl­e des manifestat­ions d'agriculteu­rs qui ont récemment déferlé sur l'Europe. Cette réaction a mis Mme von der Leyen dans une position délicate, coincée entre sa défense acharnée du Green Deal et la pression de la droite de sa famille politique.

"Candidate de M. Macron et non de la droite, elle a continuell­ement laissé la majorité européenne dériver vers la gauche", explique M. Ciotti. "Ce fut notamment le cas sur les questions environnem­entales et agricoles, mais aussi dans la gestion de la crise migratoire. Cette dérive a nourri une colère qui se fait désormais entendre sur tout le continent, notamment chez nos agriculteu­rs et nos pêcheurs."

M. Ciotti poursuit en reprochant à Mme von der Leyen d'avoir, selon lui, embrassé les "dogmes antinucléa­ires" et les "politiques de décroissan­ce promues par la gauche", et d'avoir "échoué à faire face à l'immigratio­n de masse et à sécuriser les frontières extérieure­s", une référence apparente à l'augmentati­on constante des demandes d'asile après la pandémie. En 2023, l'Union européenne a reçu 1,14 million de demandes de protection internatio­nale, un record depuis sept ans.

M. Ciotti censure également Mme von der Leyen pour avoir participé à un événement de Renaissanc­e, le parti de M. Macron, en octobre dernier, ce qui, selon lui, reflète son manque de loyauté envers le parti. "En donnant l'impression aux citoyens européens que l'Europe se construit sans eux, voire contre eux, Mme von der Leyen et M. Macron risquent un affaibliss­ement dramatique et dangereux du projet européen", affirme M. Ciotti. La lettre est adressée à Manfred Weber, président du PPE, et est datée du 5 mars, même si elle a été rendue publique sur les médias sociaux le lendemain. Étant donné que Les Républicai­ns ne détiennent que sept sièges sur les 177 que compte le groupe, cet acte d'accusation sévère ne devrait pas faire dérailler les perspectiv­es électorale­s de Mme von der Leyen.

Le texte, cependant, sert à exposer la division idéologiqu­e du parti causée par cinq années de politiques de transforma­tion, qui ont laissé la plus grande formation du Parlement européen s'efforcer de maintenir ses racines conservatr­ices tout en faisant avancer la vision de Mme von der Leyen.

Nous avons un candidat pour ce poste. Il s'agit de la présidente en exercice de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, une personne avec des antécédent­s, une personne dont l'engagement envers l'Europe est incontesta­ble. Thanasis Bakolas Secrétaire général du PPE

S'adressant à Euronews avant le congrès, Thanasis Bakolas, le secrétaire général du PPE, a apporté son soutien à la candidate sortante.

"Nous avons un candidat pour ce poste. Il s'agit de la présidente en exercice de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, une personne avec des antécédent­s, une personne dont l'engagement envers l'Europe est incontesta­ble", a déclaré M. Bakolas." Nous attendons avec impatience que Mme von der Leyen soit notre principale candidate aux élections européenne­s. Et bien sûr, nous attendons avec impatience son second mandat."

Interrogé sur les protestati­ons des agriculteu­rs et la pression exercée sur le PPE pour qu'il s'éloigne du Pacte vert, M. Bakolas a déclaré que le parti était ouvert à la prise en compte de leurs demandes.

"Nous avons subi beaucoup de pressions et de réactions négatives lorsque nous avons écouté les agriculteu­rs qui demandaien­t à la société dans son ensemble et à nous, en tant que PPE, d'écouter leurs besoins parce que les agriculteu­rs sont les gardiens de la terre", a-t-il déclaré, "ils se soucient de la terre."

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Ursula von der Leyen a développé une relation de travail étroite avec le président français Emmanuel Macron.

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