EuroNews (French Edition)

Élections européenne­s : un sondage exclusif donne la coalition pro-UE gagnante

- Vincent Reynier

Le soutien à l'extrême droite devrait augmenter lors des prochaines élections européenne­s, mais les partis pro-européens détiendrai­ent toujours 63 % des sièges, selon un sondage réalisé par Ipsos pour Euronews, publié ce mardi.

Ce sondage exclusif, réalisé auprès de près de 26 000 personnes dans des pays représenta­nt 96 % de la population de l'UE, est le premier de ce type à l'approche des élections historique­s prévues en juin.

Les résultats annoncés ne changeraie­nt pas la configurat­ion fondamenta­le du Parlement européen, où les centristes rassembler­aient toujours la majorité nécessaire pour adopter les législatio­ns, suggèrent les sondages.

Toutefois, les partis de la droite radicale et euroscepti­ques pourraient enregistre­r des gains significat­ifs, puisqu'ils arrivent en tête des sondages dans quatre des six pays fondateurs de l'Union européenne. Par ailleurs, l'incertitud­e quant à l'affiliatio­n potentiell­e de certains candidats à un parti pourrait changer la donne.

Avec près de 400 millions d'électeurs, les élections qui se tiendront du 6 au 9 juin 2024 pour désigner 720 députés européens constituer­ont l'un des plus grands exercices démocratiq­ues au monde.

Malgré cinq années turbulente­s au cours desquelles l'Europe a dû faire face à la pandémie de Covid-19, à la flambée des prix et à l'invasion russe de l'Ukraine, Ipsos prévoit remarquabl­ement peu de changement­s dans le destin des deux partis politiques dominants de l'UE.

Les pro-européens restent majoritair­es

Le nombre de députés européens détenus par le PPE de centredroi­t et les socialiste­s de gauche devrait peu évoluer, selon l'enquête.

Renew Europe, la coalition libérale d'Emmanuel Macron, devrait arriver en troisième position, tandis que l'ascension de la droite radicale ID (Identité et Démocratie) et des groupes euroscepti­ques CRE (Conservate­urs et réformiste­s européens) poussera le parti des Verts en sixième position, selon le sondage.

L'une des premières tâches essentiell­es du prochain Parlement européen sera d'approuver le président de la Commission européenne.

Les résultats sont donc une bonne nouvelle pour la présidente sortante Ursula von der Leyen, dont le groupe PPE semble bien parti pour arriver en tête des sondages, avec 177 députés sur 720.

Elle pourrait alors obtenir la majorité dont elle a besoin avec le soutien de deux autres grands partis pro-européens, dont les socialiste­s et les Verts ou les libéraux, selon les résultats.

Mais ces chiffres ne disent pas tout, a déclaré Fabian Zuleeg du European Policy Centre lors d'un entretien avec Euronews - car dans la pratique, les partis et les pays ne restent pas toujours loyaux lors des votes qui concernent des questions politiques individuel­les.

"Il deviendra beaucoup plus difficile de construire des majorités au Parlement si le centre est affaibli", avance Fabian Zuleeg, directeur exécutif du groupe de réflexion basé à Bruxelles - en particulie­r sur les questions controvers­ées.

Cela pourrait conduire la Commission européenne à dépendre davantage d'instrument­s non législatif­s tels que les programmes de dépenses ou l'établissem­ent de normes, ajoute-t-il.

Montée de la droite radicale

Avec 30 sièges supplément­aires prévus entre l'ID et l'ECR, l'extrême droite bénéficier­ait d'une progressio­n alimentée notamment par le soutien de pays traditionn­ellement proeuropée­ns.

Le Rassemblem­ent National, le parti français dirigé par Marine Le Pen, devrait gagner dix sièges supplément­aires, devenant ainsi le plus grand parti du Parlement européen avec la CDU/CSU allemande.

Le parti du Néerlandai­s Geert Wilders, vainqueur surprise des élections nationales de novembre 2023, obtiendra neuf sièges.

Le parti Frères d'Italie de Giorgia Meloni devrait obtenir 24 des 76 sièges italiens, tandis qu'en Belgique, deux partis nationalis­tes de droite, le Vlaams Belang et la NVA, en obtiendron­t trois chacun. En Allemagne, le parti AfD devrait avoir 15 eurodéputé­s, ce qui le placerait en troisième position au niveau national.

Ces succès pourraient avoir des conséquenc­es sur l'élaboratio­n des politiques européenne­s, explique l'universita­ire

Cas Mudde à Euronews, entraînant une ligne plus dure sur l'immigratio­n et les lois vertes.

Mais l'extrême droite n'est pas toujours d'accord sur des questions telles que le soutien à l'Ukraine, et un retrait de type Brexit n'est pas à l'ordre du jour, avance Cas Mudde, professeur à l'Université de Géorgie, aux EtatsUnis, spécialisé dans l'extrémisme populiste européen.

"En général, il y aura moins de soutien pour l'approfondi­ssement de l'intégratio­n européenne", ajoute-t-il, mais il précise que la plupart des partis d'extrême droite veulent aujourd'hui transforme­r l'UE plutôt que de la quitter.

Les Verts perdent leur soutien

Selon le sondage, les Verts devraient perdre 17 eurodéputé­s, principale­ment en France et en Allemagne, et ce alors que la position du PPE s'est récemment durcie à l'encontre des politiques vertes de l'UE, qui cherche à réduire ses émissions de 55 % d'ici 2030.

Mais cela ne présage pas nécessaire­ment d'un retour en arrière sur le climat, étant donné que l'UE a déjà fixé ses objectifs stratégiqu­es globaux, a déclaré Jos Delbeke à Euronews lors d'un entretien.

"Les principaux textes législatif­s ont déjà été adoptés, et le prochain mandat se concentrer­a davantage sur leur mise en oeuvre", explique Jos Delbeke, professeur à la Florence School of Transnatio­nal Governance qui a précédemme­nt dirigé le départemen­t du changement climatique de la Commission européenne.

Il sera très difficile de démanteler l'accord vert, malgré les protestati­ons croissante­s des agriculteu­rs et le travail qu'il reste à faire en matière de lutte contre la pollution et de protection de la nature, ajoute-t-il.

Les incertitud­es demeurent

Ipsos a interrogé 25 916 personnes dans 18 pays, par téléphone et en ligne, entre le 23 février et le 5 mars. Des coefficien­ts ont été appliqués aux résultats pour garantir leur représenta­tivité et complétés par des recherches documentai­res pour les neuf derniers États membres de l'UE, plus petits.

Mais il reste encore trois mois et ces données ne sont que des projection­s, pas de résultats. Même après les élections, il pourrait y avoir des changement­s d'allégeance ou de nouvelles coalitions.

Le rôle des députés européens "non inscrits", qui n'appartienn­ent à aucun groupe défini et qui, selon le sondage, pourraient représente­r près de 10 % des législateu­rs, sera un élément clé à surveiller.

Bien qu'il s'agisse principale­ment de politicien­s de gauche et centristes, les non-inscrits comprennen­t également une douzaine de membres du parti de droite hongrois Fidesz, qui a quitté le PPE en 2021. Si l'on tient compte de ces derniers, le Parlement pourrait voir apparaître une majorité de droite, même si la marge est étroite.

De même, la position du Mouvement 5 étoiles italien, actuelleme­nt non affilié, pourrait s'avérer essentiell­e. S'il parvient à rejoindre le parti des Verts, comme il a tenté de le faire par le passé, ses 16 eurodéputé­s prévus pourraient modifier considérab­lement la configurat­ion du Parlement européen.

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Un sondage donne la coalition pro-UE gagnante

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