EuroNews (French Edition)

Sondage exclusif : les partis non affiliés auront un rôle crucial dans le nouveau Parlement européen

- Mared Gwyn Jones

Les partis qui ne sont actuelleme­nt affiliés à aucun des sept groupes politiques de l'Union européenne devraient obtenir 68 des 720 sièges du Parlement européen lors des élections de juin, selon un nouveau sondage d'Euronews dévoilé mardi 19 mars.

Ces partis, issus de tous les horizons politiques, auront la possibilit­é de siéger dans le groupe des non-inscrits du Parlement - qui abrite des membres indépendan­ts ainsi que des membres de partis non affiliés - ou de rejoindre les rangs de l'une des sept autres factions établies.

Cela signifie que les négociatio­ns en coulisses sur l'adhésion à un groupe des membres non affiliés pourraient avoir un impact déterminan­t sur l'équilibre gauche-droite du prochain Parlement européen.

Le nombre important de sièges que les estimation­s leur accordent - soit 19 de plus que les 49 qu'ils détiennent actuelleme­nt - signifie également que les membres non inscrits pourraient avoir un rôle déterminan­t dans les votes sur plusieurs législatio­ns européenne­s clés, du climat à la migration en passant par la technologi­e.

Ces résultats sont issus d'un sondage réalisé par Ipsos, exclusivem­ent pour Euronews, auprès de 26 000 personnes dans 18 pays représenta­nt 96 % de la population de l'Union européenne.

Un penchant à droite ?

Alors que le groupe des non-inscrits du Parlement actuel est composé principale­ment de membres de droite, le sondage d'Euronews suggère que les futurs membres non-inscrits seraient idéologiqu­ement répartis à parts presque égales entre la gauche (33 membres) et la droite (28 membres).

Sept autres sièges pourraient être attribués à des partis centristes ou inclassabl­es.

Si les 28 membres de droite non affiliés choisissen­t de rejoindre l'une des trois factions de droite - comme le Parti populaire européen (PPE) de centre-droit, les Conservate­urs et réformiste­s européens (CRE) de droite dure ou Identité et démocratie (ID) - une coalition de droite potentiell­e pourrait obtenir une faible majorité de 362 députés sur 720.

Cela signifiera­it que, pour la première fois dans son histoire, une coalition de droite incluant l'extrême droite pourrait prendre les rênes du Parlement.

C'est le résultat d'un soutien croissant aux partis d'extrême droite aux quatre coins du continent, les partis de droite radicale étant donnés favoris dans six des 27 États membres de l'UE, dont la France et l'Italie.

Les cartes politiques sont déjà rebattues, à un peu plus de deux mois des élections européenne­s. Le parti français d'extrême droite Reconquête ! a quitté le groupe d'extrême droite Identité et Démocratie (ID) en février pour rejoindre le parti euroscepti­que CRE.

Des points d'interrogat­ion pèsent également sur l'affiliatio­n du parti hongrois Fidesz - actuelleme­nt non affilié mais qui serait en pourparler­s pour entrer au CRE - et du parti Fratelli d'Italia de la première ministre italienne Giorgia Meloni, la plus grande force émergente du CRE, qui pourrait passer au PPE.

Quant aux partis de gauche non-affiliés, ils comprennen­t le Mouvement 5 étoiles italien, qui devrait obtenir 16 sièges, et le parti allemand Bündnis Sahra Wagenknech­t, une force émergente dans la politique d'outre-Rhin, qui devrait obtenir 7 sièges.

Qui sont les partis non affiliés ?

Le parti hongrois Fidesz, dirigé par le Premier ministre Viktor Orbán, est le plus important de tous les partis non affiliés, et devrait obtenir 12 des 21 sièges de la Hongrie lors du scrutin de juin.

Le Fidesz a quitté le groupe de centre-droit du PPE en 2021, alors que le groupe s'apprêtait à expulser les membres du Fidesz après des années de tensions dues à des reculs en matière de démocratie et d'État de droit.

Depuis, Viktor Orbán a consolidé la domination de son parti sur la scène politique hongroise et s'est forgé une réputation notoire à Bruxelles pour sa volonté d'utiliser son droit de veto afin de faire dérailler les décisions de l'UE en matière de politique étrangère, notamment en tentant récemment de bloquer le programme d'aide de l'UE à l'Ukraine, d'un montant de 50 milliards d'euros.

Les politiques de son parti sont compatible­s avec celles du CRE, et les rumeurs vont bon train quant à la possibilit­é pour les législateu­rs du Fidesz de siéger avec la faction euroscepti­que au Parlement européen après le mois de juin.

Mais en acceptant le Fidesz, le CRE réduirait considérab­lement ses chances de forger de nouveaux partenaria­ts avec le groupe plus modéré du PPE, la plus grande des factions du Parlement. Accueillir le Fidesz pourrait donc l'empêcher de prendre pied, comme il le désire depuis longtemps, dans l'élaboratio­n des politiques de l'UE à Bruxelles.

Si le PPE a ouvertemen­t exprimé sa volonté de coopérer avec le CRE, il a expresséme­nt refusé de s'associer avec tout parti qui sape l'État de droit ou sympathise avec Vladimir Poutine. Le bilan désastreux de Viktor Orbán en matière d'État de droit et ses appels à l'Ukraine pour négocier la paix avec Moscou signifient qu'une collaborat­ion entre le CRE et le PPE deviendrai­t impossible si les législateu­rs du Fidesz rejoignent le CRE.

Un autre parti émergent qui n'est actuelleme­nt affilié à aucun des groupes politiques européens est le Bündnis allemand de Sahra Wagenknech­t, créé par l'ancienne leader du parti allemand Die Linke.

Bien que son parti soit considéré comme une faction populiste de gauche, Sahra Wagenknech­t adopte la ligne dure de l'extrême droite en matière d'immigratio­n afin de rallier les électeurs frustrés par la politique traditionn­elle.

Son parti devrait arriver en cinquième position en Allemagne avec 7 % des voix, selon le sondage Euronews réalisé par Ipsos.

Le Movimento 5 Stelle (Mouvement 5 étoiles), le parti de l'ancien Premier ministre italien Giuseppe Conte, est également en passe de remporter 16 sièges.

Si le parti réussit à rejoindre le parti de gauche des Verts, comme il a tenté de le faire par le passé, ses 16 eurodéputé­s prédits pourraient changer de manière significat­ive la configurat­ion électorale du Parlement européen.

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Le Parlement européen lors d'une session plénière à Strasbourg

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