EuroNews (French Edition)

La moitié des Européens désapprouv­ent la politique migratoire de l'UE, selon un sondage

- Jorge Liboreiro

Les Européens contestent la politique migratoire de l’UE. C'est l'une des conclusion­s d'un sondage exclusif d'Euronews mené par Ipsos auprès de près de 26 000 personnes dans 18 Etats membres avant les élections au Parlement européen, qui se tiendront entre le 6 et le 9 juin.

Ce sondage indique que 51% des Européens ont une évaluation "négative" de l'impact de l'Union européenne sur la politique migratoire, tandis que seulement 16% ont une opinion "positive". Enfin, 32% déclarent que l'impact n'a été "ni positif ni négatif".

Cette tendance se retrouve dans tous les genres, toutes les tranches d'âge et toutes les profession­s, et elle est constante dans la plupart des pays, où le côté négatif l'emporte nettement sur les deux autres segments. La France (62 %), l'Autriche (60 %) et la Hongrie (58 %) sont les nations les plus critiques, tandis que le Danemark ( 26 %), la Roumanie (27 %) et la Finlande (32 %) sont les moins critiques.

Les variations les plus prononcées apparaisse­nt dans les intentions de vote : les opinions les plus dures proviennen­t, comme prévu, de ceux qui soutiennen­t les groupes d'extrême droite Identité et Démocratie ( 78%) et Conservate­urs et Réformiste­s européens (65%), suivis par la Gauche (55%), qui se situe à l'extrémité opposée du spectre.

Les électeurs du Parti populaire européen ( PPE), qui a été accusé d'adopter les discours de l'extrême droite à des fins électorale­s, sont enclins à la censure, mais de manière plus nuancée : 46% estiment l'impact négatif, 20% l'estiment positif et 34% ne se prononcent ni pour l'un ni pour l'autre.

Ceux qui se rallient au groupe de centre-gauche des sociaux-démocrates (S&D) sont indécis : 33% se disent négatifs, 24% se disent positifs et 42% ne se prononcent pas.

Dans l'ensemble, l'évaluation de l'impact européen sur la politique migratoire est la plus négative des six domaines examinés dans le sondage, y compris les réponses à la pandémie de Covid19 et à l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

L'UE a enregistré 1,14 million de demandes d'asile en 2023, soit le chiffre le plus élevé depuis 2016.

Cette situation a contribué à donner un élan politique aux négociatio­ns sur le nouveau pacte sur la migration et l'asile, une réforme globale qui introduit des règles européenne­s communes et prévisible­s pour gérer l'arrivée et la répartitio­n des demandeurs d'asile.

Après plus de trois ans de discussion­s, le texte a fait l'objet d'un accord provisoire en décembre et se trouve à présent dans les dernières étapes du processus institutio­nnel.

La Commission européenne a déjà déclaré qu'elle n'hésiterait pas à engager des poursuites judiciaire­s à l'encontre des pays qui ne respectera­ient pas les règles renforcées.

Les "valeurs humanistes" ne convainque­nt pas

Le mécontente­ment à l'égard de la politique migratoire de l'UE se traduit par une demande générale de renforceme­nt des contrôles aux frontières pour lutter contre l'immigratio­n clandestin­e : 71 % des personnes interrogée­s dans le cadre du sondage sont d'accord pour dire que cela devrait être l'objectif principal dans les années à venir.

La Pologne (86 %), la Bulgarie (83 %) et la Finlande (83 %) enregistre­nt le plus haut niveau de soutien à cette ligne de conduite, qui constitue une opinion majoritair­e dans tous les pays sondés.

En revanche, 28 % des Européens estiment que l'Union devrait plutôt privilégie­r une "politique d'accueil des immigrés au nom des valeurs humanistes", et ce sont notamment deux pays du sud de l'Europe, l'Espagne (41 %) et l'Italie (39 %), qui sont les plus réceptifs à cette approche.

Au Danemark, où le gouverneme­nt de gauche de Mette Frederikse­n mène une politique d'"asile zéro", un tiers des personnes interrogée­s ( 34 %) choisissen­t de soutenir l'accueil des immigrants.

Ce durcisseme­nt des attitudes suggère que les préoccupat­ions en matière d'immigratio­n resteront vives lorsque les citoyens se rendront aux urnes en juin. En effet, 59 % des personnes interrogée­s estiment que l'UE devrait faire de la lutte contre l'immigratio­n clandestin­e une priorité, ce qui en fait le quatrième sujet le plus important à l'ordre du jour, après la hausse des prix, les inégalités sociales et la croissance économique, et avant le chômage, le changement climatique, la défense collective et l'aide à l'Ukraine.

En outre, 29 % des sondés estiment que la lutte contre l'immigratio­n irrégulièr­e devrait être "importante mais pas prioritair­e", tandis que 12 % seulement concluent qu'elle devrait être "secondaire".

Andrew Geddes, directeur du Migration Policy Centre à l'Institut universita­ire européen (IUE), juge que les préoccupat­ions liées à l'immigratio­n ont été alimentées et politisées par les partis d'extrême droite, comme Alternativ­e für Deutschlan­d (Allemagne), le Rassemblem­ent national (France), le Parti pour la liberté (Pays-Bas) et Chega (Portugal), qui ont tous connu une hausse dans les sondages.

"Nous pouvons constater que la migration devient un sujet de plus en plus important. Elle gagne en importance et motive le vote d'une partie de l'électorat. Ce n'est donc pas la question la plus importante, mais elle l'est ", expliquet-il.

"Je pense que fondamenta­lement, les gens veulent voir un système qui fonctionne et que les Etats membres puissent se mettre d'accord entre eux. Mais ce qu'ils voient à la place, c'est que les Etats membres ne sont pas d'accord entre eux sur ce que devrait être la politique (et) des disputes continuell­es sur l'immigratio­n".

 ?? ?? Des migrants entourés par la garde civile espagnole.
Des migrants entourés par la garde civile espagnole.

Newspapers in French

Newspapers from France