Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire
Dépôt tardif des comptes reproché au dirigeant
Cass. com. 3 mai 2018, n° 16-23627
Des époux confient à une SARL des travaux immobiliers. La SARL fait faillite et laisse des travaux mal exécutés. Le couple fait reprendre ces travaux par une autre entreprise. Il lui en coûte près de 46 000 €, dont il réclame le paiement au gérant de la SARL. Rappelons qu'un gérant peut être personnellement condamné à dédommager des tiers lorsqu'il a commis une « faute détachable de ses fonctions » (cass. com. 20 mai 2003, n° 99-17092), c'est-à-dire lorsqu'il a commis « intentionnellement une faute d'une particulière gravité et incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions » (cass. com. 21 janvier 2014, n° 11-14154).
Les époux font valoir que les comptes de la SARL des deux dernières années n'étaient pas encore déposés au greffe lorsqu'ils ont conclu avec elle. Ils n'ont donc pas pu connaître l'état de la trésorerie de la SARL. S'ils l'avaient connu, ils auraient conclu avec une autre entreprise. Or, déposer les comptes annuels avec retard constitue une contravention (c. com. art. R. 247-3). Les époux concluent qu'en commettant cette infraction, le gérant a forcément commis une faute détachable de ses fonctions.
Le couple obtient effectivement la condamnation du gérant mais cette condamnation est censurée par la Cour de cassation. En effet, une contravention (qui n'est pas une infraction intentionnelle) ne constitue pas une faute intentionnelle d'une particulière gravité, détachable des fonctions de gérant. De plus, ajoute la Cour de cassation, rien ne démontre que le surcoût de 46 000 € a été provoqué par le dépôt tardif des comptes.
RF Web 2016-1, § 391