Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire

Les vraies valeurs…

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Attention aux petits – et moins petits – arrangemen­ts sur les valeurs déclarées en cas de gel des valeurs. En effet, en présence de biens qui auraient été sous-évalués, la Cour de cassation a, sans surprise à mon sens, précisé que, « pour le calcul de la réserve, les biens donnés doivent être estimés à leur valeur réelle au jour de la donation-partage, quelles qu'aient pu être celles énoncées à l'acte » (cass. civ., 1re ch., 25 mai 2016, n° 15-16.160 ; voir « Transmissi­on d'entreprise », RF 2016-6, § 2268).

Il est ici nécessaire de mettre en garde contre certaines pratiques qui ont la vie dure. En effet, l'entreprise comptant parmi les actifs les plus difficiles à valoriser, il est parfois tentant de la sous-valoriser sensibleme­nt dans l'exercice de la donation-partage – ne serait-ce que pour réduire la note fiscale. Dans le cas où seul l'enfant repreneur bénéficier­ait de cette « astuce », ses cohéritier­s pourraient vouloir en découdre lors de la succession, l'impression – parfois fondée – d'avoir été dupés étant une incitation forte à agir. La solution sus-décrite leur fournirait un vent favorable.

La question se corse lorsqu'il s'agit d'incorporer une donation antérieure. À titre d'exemple, le cas du donataire d'un bien immobilier qui y a fait réaliser à ses frais d'importants travaux de rénovation, alors même que, « donateur comme donataires, sont d'avis que la valeur de ce bien devrait être estimée à la date précédant les travaux ».

S'appuyant sur l'article 1078 du Code civil, le notaire considère que la valeur du bien doit être celle constatée à la date de la donation-partage, suivi en cela, sur la pointe des pieds, par les services du Ministère de la justice qui considèren­t que la chose « ne semble pas possible » en raison d'« un principe d'unicité de date interdisan­t de choisir des moments d'évaluation différents » (rép. Le Roch n° 53590, JO 7 juin 2016, AN quest. p. 5113).

Une date unique, d'accord, mais il me semble, à l'endroit d'une part importante de la doctrine, que la réponse comme la question sont passées à côté du véritable sujet, à savoir l'état. L'incorporat­ion doit, à mon sens, donner lieu à évaluation au jour du partage… mais dans l'état du bien transmis au jour de la donation, en prolongeme­nt de l'esprit tant du rapport que de la réunion fictive, qui extournent ce qui ne provient pas du donateur.

Pour terminer, évoquons la forte contrainte que la Cour de cassation a imposée au notariat, et à nos clients, en matière de donation-partage (voir § 12-7).

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