Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire
Dé-connexion : de quoi au juste ? Imposée, choisie, raisonnable ?
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Droit pour le salarié mais devoir patronal au titre de l'obligation de sécurité, le contenu de ce mot-valise a considérablement évolué depuis que l'auteur de ces lignes a publié en novembre 2002 « Naissance du droit à la déconnexion, le droit à la vie privée du XXIE siècle »
Il y a 17 ans, être connecté grâce au magnifique Blackberry professionnel ostensiblement posé devant soi pendant les réunions était un signe extérieur de pouvoir, quand la marée montante des courriels n'était alors qu'une vaguelette. Avec l'arrivée du micro-ordinateur portable qu'était l'iphone 1 de juin 2007 – il y a seulement douze ans – puis l'irruption des si interactifs réseaux sociaux internes ou externes, où qu'il soit dans le monde, le cadre peut rester branché grâce au « portable » qu'il emporte partout. Généralement un beau portable professionnel incitant à rester connecté à l’entreprise : la Toile, au sens arachnéen. Mais souvent aussi un portable personnel dont les collègues, voire les clients et autres fournisseurs ont le numéro, « au cas où »….
A fortiori avec la génération Alpha, ce nouveau produit né après l'an 2000, dotée d'un smartphone devenu sa troisième main dès la Moyenne Section et envoyant plus de 90 textos par jour. Dès avant l'internet des Objets, elle ne se connecte plus car elle vit connectée, dans un joyeux mélange professionnel/personnel : développement, plus ou moins officiel, du BYOD («Bring Your Own Device ») et groupes d’amis-collègues sur les réseaux sociaux externes. Pour cette génération, la déconnexion obligée relève du non-sens ou d'un paternalisme désuet, et demain d’un « traitement inhumain et dégradant » au sens de la CEDH. Souvent seniors et pensant donc encore qu'un téléphone sert à téléphoner, les négociateurs des accords d'entreprise sur le droit à la déconnexion feraient bien d'y songer, s'ils veulent survivre aux prochaines élections.