Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire
Qui dit privation de dividendes ne dit pas pour autant abus
Cass. com. 10 juin 2020, n° 18-15614
Dans une SA, la mise en réserve systématique des bénéfices est votée depuis plusieurs années. Lors de la dernière assemblée, la mise en réserve des bénéfices, d'un montant de 550 000 €, est à nouveau votée. S'estimant lésé, un associé minoritaire demande en justice l'annulation de cette décision pour abus de majorité.
Les juges constatent que la société n'a ni emprunt, ni projet d'investissement en cours et que ses liquidités s'élèvent à plus de 740 000 €.. En outre, les réserves de la société se chiffraient déjà à plus de 620 000 € avant le dernier vote. Rien ne justifie, selon les juges, une politique de thésaurisation qui prive l'actionnaire minoritaire de ses dividendes. Les juges annulent en conséquence la décision de l'assemblée.
Les actionnaires majoritaires forment un pourvoi et soulignent que l'absence de dividendes les concerne tout autant que l'associé minoritaire. Or, pour caractériser un abus de majorité, la décision doit avoir été prise dans l'unique dessein de favoriser un majoritaire au détriment d'un minoritaire. La décision de l'assemblée ne constitue donc pas, selon eux, un abus de majorité. La Cour de cassation valide leur raisonnement et casse la décision des juges.
En pratique, les assemblées peuvent librement décider la mise en réserve des bénéfices, cette décision ne pouvant, à elle seule, favoriser un associé.
RF Web 2019-5, § 798