Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire
L'affaire : une filiale en perte d'autonomie jusqu'à sa liquidation judiciaire
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Un groupe oeuvrant dans le domaine du verre était passé sous pavillon japonais en 2010. À partir de cet événement, une filiale du groupe avait perdu progressivement une bonne part de son autonomie :
- dans toutes les initiatives qu'il avait prises (rapports et projets sur la situation de la filiale, gestion de litiges commerciaux, signature de lettres d'embauche, d'avertissement ou encore de rupture, acceptation des congés, conclusion d'un accord salarial), le directeur de la filiale agissait avant tout en qualité de représentant de la société mère ;
- la filiale avait confié, à compter de février 2012, la gestion de ses ressources humaines à la société mère, laquelle lui facturait ce service ;
- une autre filiale du groupe avait pris en charge sa gestion administrative, là encore contre rétribution ;
- sa trésorerie était gérée par la société mère ;
- la filiale était contrainte de traiter diverses commandes, rarement rentables, pour d'autres sociétés du groupe ;
- la filiale était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe. La société avait finalement été fermée en 2012, puis mise en liquidation courant 2013. Le groupe avait alors repris les actifs de la filiale, dans des conditions jugées désavantageuses par les salariés.
Plusieurs membres du personnel avaient contesté le caractère réel et sérieux de leur licenciement pour motif économique, tout en cherchant à faire reconnaître la qualité de coemployeur de la société mère pour que celle-ci soit condamnée in solidum à payer les dommages et intérêts.
Sensible aux arguments des salariés, la cour d'appel de Caen avait recensé les différents éléments caractérisant l'immixtion de la société mère dans la gestion économique et sociale de sa filiale pour conclure, selon la formule consacrée, à une confusion d'intérêts, d'activité et de direction entre les deux entités et les déclarer coemployeurs.
Or, la Cour de cassation va justement profiter de cette affaire pour revoir les critères du coemploi, dans un arrêt du 25 novembre 2020 destiné à la plus large diffusion, puisque mis en ligne sur son site internet et appelé à figurer dans son rapport annuel (FPPBRI).