Conserver, préparer & cuisiner les champignons
L’automne approche, nos envies de champignons reviennent. Si, faute de connaissances, il n’est pas toujours évident d’aller en ramasser soi-même dans la forêt, il nous reste toujours les variétés du commerce : les incontournables champignons de Paris, mais aussi les pleurotes et autres shiitakés. On apprend aujourd’hui à les choisir, mais aussi à bien les préparer et à les mitonner.
Mi-septembre, déjà ! Bientôt, la nature va revêtir ses couleurs chatoyantes et les forêts se peupler de beaux champignons. Les connaisseurs en profiteront pour aller faire un tour dans leurs coins à champignons, panier et couteau sous le bras, à la recherche de cèpes et autres rosés-des-prés, qui poussent dès la fin de l’été. Ceux qui n’ont pas cette chance se consoleront – plus que bien – avec les variétés cultivées : les champignons de Paris, bien sûr, mais aussi les pleurotes, les pieds-bleus ou encore les shiitakés. Jacky Roulleau, champignonniste depuis plus de 40 ans, en connaît un rayon. Ou plutôt, une cave : la sienne, la Cave vivante du champignon, établie dans une ancienne carrière d’extraction de tuffeau au Puy-Notre-Dame, dans la région de Saumur. Aujourd’hui, il nous donne plein de petites astuces pour choisir, conserver et cuisiner les champignons.
PAS DE SAISON !
Du moins, pas pour les champignons cultivés. « Pas de saison, dans nos caves : on fait des champignons du 1er janvier au 31 décembre ! », assure Jacky Roulleau, champignonniste de père en fils. Justement, il y pousse quoi, dans ces caves ? Des champignons par milliers ! De Paris, plus particulièrement, 95 % de sa production. Pour parler technique, l’ensemencement avec du mycélium se fait dans un compostage à base de fumier de cheval et de paille, pasteurisé au préalable. « Il faut compter 9 à 10 semaines de travail pour récolter les premiers champignons. » Les champignons de Paris sont aussi appelés « champignons de couche » ou, en latin, Agaricus bisporus. Ce sont les plus consommés dans le monde. Évidemment, les champignons dits « sylvestres » (de forêt), eux, ont bel et bien une saison : cèpes, morilles, girolles, chanterelles… ceux-là poussent généralement de septembre à décembre. On en retrouve aussi sur les étals des marchés et supermarchés.
ILS ONT TOUT BON
S’il y a bien un légume à mettre dans nos assiettes, c’est celui-ci. D’ailleurs, on ne devrait pas parler de légume. Les champignons sont véritablement à part. « C’est le monde du champignon. Ils ont une biologie déconcertante ! On peut dire que c’est un fruit car il provient d’un filament fructifère, qui vient de la compatibilité de deux filaments primaires provenant de deux spores différentes. » Compris ? Quoi qu’il en soit, ils sont excellents pour la santé : ils sont riches en vitamines (B2, B3), en minéraux, en fibres. Ce sont aussi de véritables petites bombes de protéines ! Pour couronner le tout, ils sont très peu caloriques (3 g de glucides, 0,24 g de lipides et 25 kcal pour 100 g). Avis, donc, à celles et ceux qui surveillent leur ligne !
LE BON CHOIX
Le chapeau nous donne déjà un précieux indice : dans le cas du champignon de Paris, il doit être bien fermé sur le pied. Surtout, le champignon ne doit pas être ramollo, mais bien ferme. « Ils doivent être durs quand on y touche. C’est à cela que l’on reconnaît leur fraîcheur. Les champignons de Paris ne sont pas forcément blancs, car il en existe en réalité quatre variétés : blancs, crème, blonds, ivoire… » Les blancs sont les plus répandus. Les blonds ont tendance à être plus parfumés. Si on les choisit prédécoupés en lamelles, on veille à ce qu’elles n’aient pas bruni. Côté taille, tout dépend comment on souhaite les cuisiner : les mini-champignons sont délicieux dans les plats
mijotés ou à la grecque, tandis que les tailles maxi, comme les galipettes (de gros champignons de Paris), sont idéaux pour les farces. Enfin, il faut faire attention à l’étiquette, et donc à la provenance : les champignons de Paris viennent souvent de Pologne et des Pays-Bas, les deux leaders en Europe (la France arrive troisième). « Je ne peux que recommander d’acheter français, cocorico ! », plaisante Jacky, pourtant on ne peut plus sérieux. « Le champignon français aura moins de durée de transport et sera forcément plus frais. »
UN TEMPS DE CONSERVATION COURT
Il faut en effet toujours garder en tête qu’un champignon se conserve très peu de temps. « Sa durée de vie est relativement courte : 4 à 5 jours au réfrigérateur ! » Il faut d’ailleurs veiller à ne pas les laisser étouffer dans un sac plastique (c’est valable pour tous les végétaux). « Le mieux, c’est de les laisser à l’air et de ne pas les couvrir. » Enfin, le must du must, c’est de choisir des champignons qui ont poussé dans des caves souterraines. En France, il en existe 15 sur les 45 champignonnières existantes, le reste étant des salles climatisées hors sol. « Dans une cave, ils vont pousser plus lentement et de manière plus simple. Elles sont ventilées naturellement, il fait toujours noir, la température est toujours la même (15-16 °C) et l’hygrométrie (taux d’humidité) y est importante. Les champignons poussent en symbiose avec l’environnement de la cave, ce qui donne des champignons très fruités, très goûteux. » Difficile à trouver, cependant, si on habite loin des lieux de production, la grande majorité étant
cultivée dans le Val de Loire… « Acheter des champignons français qui poussent dans des salles climatisées, c’est déjà bien ! », conclut Jacky.
PETITE LEÇON DE PRÉPARATION
Avant de les cuisiner, on coupe la partie terreuse et on les rince très rapidement sous un petit filet d’eau froide pour les débarrasser d’éventuels petits grains de sable. Par contre, on évite à tout prix de leur faire faire trempette pour ne pas en altérer le goût. On les sèche ensuite à l’aide d’un linge ou d’un papier absorbant. Si on les pèle ? C’est une grande question, à laquelle Jacky a sa réponse : « Il ne faut jamais les éplucher, ça ne sert à rien ! » Esthétiquement parlant, ils seront juste plus blancs. Dans ce cas, on utilise un petit couteau pointu et on retire la peau du bord vers le sommet du chapeau. Si on compte les consommer crus, on peut les citronner pour éviter qu’ils ne s’oxydent et ne noircissent.
MILLE ET UNE FAÇONS DE LES CUISINER
Crus, ils se glissent dans des salades et les apéros dînatoires et apportent un peu de fraîcheur aux raclettes. On les adore aussi dans leur version « à la grecque », en entrée. En version chaude, tous les champignons sont délicieux, simplement poêlés. « On les coupe en lamelles, on les met dans une poêle à feu doux, on fait réduire le jus et on y ajoute ensuite un peu de beurre ou d’huile d’olive, de l’ail, du persil, des échalotes, ce que l’on veut… et on les fait fricasser ! » Libre à nous d’ajouter un peu de crème fraîche pour encore plus de gourmandise… Miam, on en a déjà l’eau à la bouche ! S’il reste du jus, pas de gâchis : on le garde (on peut le congeler) et on le glissera dans une soupe.
FARCIS À LA SAUMUROISE
La spécialité du coin de Saumur, ce sont les champignons farcis : « D’abord, il faut bien faire cuire de gros champignons à part au four, avec un peu de sel. Quand ils sont pratiquement cuits, on les remplit d’une farce légère à base de rillettes, fromage de chèvre et beurre escargot. Pendant 3 minutes, on la fait fondre dans les champignons. » Pour les champignons farcis, on se débarrasse des pieds pour ne garder que les chapeaux mais, pour autant, pas question de les jeter ! Ils peuvent s’additionner à la farce. Sinon, on peut aussi s’en servir dans des soupes et veloutés. Les shiitakés donnent, quant à eux, d’excellents beignets : il suffit de farcir les chapeaux avec de la chair à saucisse, puis de les tremper dans une pâte à crêpes non sucrée avant de les faire frire quelques minutes dans un bain d’huile. Un petit péché mignon (bon, là, par contre, le champignon devient une bombe calorique !).
PROMENONS-NOUS DANS LES BOIS…
Par un beau dimanche d’automne, il est toujours très tentant d’aller ramasser des champignons. Cependant, méfiance : mieux vaut s’y connaître un minimum. « Il faut se faire aider de connaisseurs et en particulier de mycologues », affirme Jacky, qui, en plus d’être champignonniste, est un grand passionné de champignons sauvages. « C’est très important pour ne pas se tromper, car peu de champignons sont comestibles et beaucoup se ressemblent. Il faut faire très attention. » Nous voilà prévenus. Bonne nouvelle : il existe des associations mycologiques dans tous les départements (rendez-vous sur Mycodb.fr/ societe.php). Elles organisent des sorties permettant de se familiariser avec la cueillette des champignons sauvages. Dans tous les cas, on ne part pas dans la nature sans un couteau pour couper les champignons, qu’ils soient destinés à notre consommation ou à la « journée découverte des champignons » des enfants, à l’école. « Il ne faut surtout pas les arracher car le champignon est en réalité un arbre souterrain fait de kilomètres de filaments mycéliens, explique Jacky. Pour ne pas abîmer ses “branches” souterraines, il faut donc couper le champignon (le fruit) au niveau du sol avec un couteau. »