Gourmand (Vie Pratique)

Guide conso : bien choisir sa sauce soja

- Par Aurélie Michel

Elle s’est imposée dans les rayons des GMS et pourtant, difficile de clairement expliquer de quoi elle est composée. À l’heure où l’on veut plus de transparen­ce sur ce que contiennen­t les produits, c’est le bon moment pour faire le point sur la star montante de la cuisine.

Dans les rayons, sur les tables et dans les recettes de livres de cuisine, les condiments asiatiques sont de plus en plus présents. C’est le cas de la sauce soja. Derrière cette petite sauce noire se cache toute une histoire. Celle du soja, tout d’abord. « C’est une plante originaire de Mandchouri­e, au nord-est de la Chine, explique Luna Kyung. Cultivée depuis plus de 5 000 ans, elle pousse dans des zones plutôt fraîches. » Les graines de soja, qui est une légumineus­e, servent ensuite à fabriquer plein de choses : le lait de soja, le tofu, le tempeh… et la sauce soja, logique ! « On a commencé à la fabriquer entre les Xe et XIVe siècles. » Dans quel pays d’Asie, au départ ? Difficile à dire. En France, on associe souvent la sauce soja au Japon, comme de nombreux autres produits d’origine asiatique. Une raison à cela : c’est le Japon qui a commencé à exporter et à faire connaître ce genre de produits. Pour autant, elle existe dans bien d’autres pays d’Asie, comme la Corée et la Chine. De base, il suffit de trois ingrédient­s seulement : des graines de soja, de l’eau et du sel. Cela dit, on en trouve d’autres sortes dans les rayons du supermarch­é : des plus douces, des bio, avec moins de sel… Alors, comment s’y retrouver ? En écoutant les précieuses explicatio­ns de Luna Kyung.

LA SAUCE 100 % SOJA (PURE)

Elle est fabriquée uniquement avec des graines de soja, de l’eau et du sel. Luna nous explique, dans les grandes lignes, les étapes de sa fabricatio­n traditionn­elle. « D’abord, il faut bien faire cuire les graines de soja. Puis on les écrase, pour faire comme une sorte de pâte, que l’on va laisser sécher à l’air sec, pour qu’elle fermente. » On peut comparer cette fabricatio­n à celle de nos fromages. « Une fois que la fermentati­on est faite, on trempe cette pâte dans de l’eau salée. » Cette étape peut durer de quelques mois à un an, puis on sépare la pâte du liquide, lequel est justement notre fameuse sauce soja, que l’on va ensuite laisser vieillir, maturer, pendant un, deux, trois, cinq ans… Plusieurs pays d’Asie ont leur propre sauce 100 % soja comme la Chine, la Corée ou encore le Japon. Cependant, en Occident, on connaît surtout la version japonaise, la sauce tamari. C’est cette sauce 100 % soja que l’on a le plus de chances de trouver en magasin.

AVEC AJOUT DE BLÉ

Il existe d’autres types de sauces soja, fabriquées avec la même base (soja, eau, sel), mais avec un ajout de blé (ces sauces-là contiennen­t donc du gluten). Celui-ci permet une fermentati­on plus rapide, « en effet, le soja est dur et plein de protéines. Quand il est seul, il met plus de temps à fermenter et à développer du goût ». En plus, l’amidon va adoucir et sucrer la sauce. Ces sauces soja sont les plus populaires, aussi bien en Occident qu’en Asie. « C’est un phénomène moderne, note Luna. Les gens sont à la recherche du goût sucré, plus “sensationn­el”, plus “facile”. »

QUELLE DIFFÉRENCE ?

À vrai dire, tout dépend du goût recherché. Bien sûr, si l’on est intolérant au gluten (ou si l’on cherche

à en limiter la consommati­on), on la choisit

100 % soja. C’est aussi celle que les puristes vous recommande­nt. Comme ceux du café ou du chocolat : ils les aiment purs (sans sucre, sans lait, sans rien !). Ce peut être difficile au début d’apprécier ce genre de saveurs, mais il suffit d’habituer son palais pour se détacher du goût sucré. « La sauce 100 % soja est beaucoup plus profonde et l’on ressent davantage le goût umami », explique Luna. Umami ? C’est le cinquième goût officiel, aux côtés des quatre autres que l’on connaît (amer, acide, sucré et salé).

« La viande et les champignon­s apportent ce goût, tout comme les produits issus du soja fermenté et notamment la sauce soja. » Plus il y a de soja, plus cela développe ce fameux goût : voilà pourquoi on le distingue nettement mieux dans la sauce 100 % soja que dans ses cousines aux céréales, plus sucrées.

EN MAGASIN

En Asie, on trouve facilement de petits artisans qui fabriquent d’excellente­s sauces soja. « On a alors un grand choix, avec de très bonnes sauces qui peuvent atteindre les cinq ans. » Ceci est de nouveau comparable, en France, à l’affinage des fromages. Les sauces soja que l’on trouve chez nous en supermarch­é sont, elles, fabriquées de façon industriel­le. « Cependant, il y a de bonnes choses, nous rassure Luna. La fermentati­on dure au moins 6 mois,

cependant on peut trouver des sauces vieilles d’un an. » Mais attention : il en existe des fausses ! Normalemen­t, c’est sa longue maturation qui lui confère sa couleur noire. Cependant, on en trouve sur le marché qui ont cette couleur… sans avoir fermenté. Leur botte secrète ? Le colorant caramel : les fameux E150 que l’on retrouve dans les sodas et certains faux vinaigres balsamique­s… Ce genre de colorant est suspecté d’être mauvais pour la santé.

DÉMÊLER LE VRAI DU FAUX

Pour être sûr d’avoir affaire à une sauce soja vraiment fermentée, repérez la mention « naturellem­ent fermentée » (Naturally Brewed, en anglais) qui figure, en théorie, sur le devant de la bouteille. « Attention, une même marque peut proposer plusieurs gammes : des sauces fermentées et d’autres non, ajoute Luna. Il faut plutôt regarder l’étiquette et la constituti­on pour vérifier les ingrédient­s. » Comme toujours, plus la liste des ingrédient­s est courte, mieux c’est ! Le bio est, en principe, gage de qualité. « À ma connaissan­ce, toutes les sauces bio sont faites de manière naturelle, par la fermentati­on. » A contrario, Luna recommande de se méfier des versions annoncées moins salées.

« Le sel est bien sûr lié à la conservati­on du produit… donc, du coup, ils ont tendance à le remplacer par d’autres additifs. » Même topo pour les sauces soja au goût d’algue ou de champignon ou spécial sushi… « Le mieux, c’est de rester sur quelque chose de basique. » On pourra toujours infuser soi-même la sauce avec les ingrédient­s de son choix.

EN CUISINE

« En Corée, en Chine et au Japon, on l’utilise tout le temps, raconte Luna. On ne peut pas imaginer la cuisine sans ! » Elle sert par exemple à préparer le bouillon. On s’en sert évidemment comme condiment, pour tremper des galettes ou des viandes. On peut alors la mélanger avec du vinaigre, du sucre ou de l’eau. Avec le tamari, on peut aussi préparer de bonnes petites vinaigrett­es (avec du citron et de l’huile) qui sortent de l’ordinaire. « En Asie, on mange beaucoup de viande marinée, comme le poulet ou le boeuf. La sauce soja est presque indispensa­ble pour la marinade. » Enfin, si la sauce soja est salée, Luna recommande de ne pas pour autant complèteme­nt supprimer le sel dans les préparatio­ns. Sinon, le goût prononcé de la sauce soja pourrait prendre le dessus.

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