GP Racing

ALPINESTAR­S A 50 ANS

- Par Michel Turco. Photos Jean-Aignan Museau et DR.

Créée en 1963 au pied des Dolomites par un cordonnier du nom de Sante Mazzarolo, la marque Alpinestar­s fait aujourd’hui référence dans l’univers du sport moto. Une histoire de famille et de passion qui fête cette année son cinquantiè­me anniversai­re.

1 et 2- Sante Mazzarolo, le créateur de la marque Alpinestar­s ouvre en 1963 son premier atelier à Maser, dans la province de Trévise. 3- Kenny Roberts fut la première star américaine à porter les bottes Alpinestar­s en Grands Prix. Le triple champion du monde est resté proche de la famille Mazzarolo. 4- En Italie ou en Californie, Alpinestar­s dispose aujourd’hui de laboratoir­es ultra-modernes.

Si ça n’avait pas été pour Sante et Gabriele, je ne me serais jamais infusé un aller- retour San Francisco/ Milan en moins de 48 heures ! » Kenny Roberts n’a jamais eu pour habitude de s’embarrasse­r la vie, et ça n’est pas à 61 ans que ça changera. Retiré des bécanes, le triple champion du monde se la coule douce aujourd’hui du côté de sa Californie natale. Mais quand Gabriele Mazzarolo l’a invité à venir participer à la soirée d’anniversai­re d’Alpinestar­s, début septembre, le King n’a pas mis longtemps à accepter la propositio­n du patron de l’équipement­ier italien. « Il y a quelques années, je suis allé rendre visite à Sante, le père de Gabriele, raconte Roberts. Il venait de faire construire une nouvelle maison, et nous sommes allés faire un tour dans son garage. Il n’y avait qu’un poster sur les murs, c’était moi. J’ai toujours eu d’excellente­s relations avec Sante. La première fois que je l’ai rencontré, c’était en 1978. J’étais venu à Imola pour les 200 Miles. À l’époque, je portais des bottes Hi- Point, l’importateu­r Alpinestar­s aux États- Unis. Sante avait demandé à me rencontrer. Il avait un atelier où travaillai­t une dizaine de personnes. Il m’a invité chez lui, m’a fait boire le vin de sa vigne. Son fi ls Gabriele jouait avec son vélo... Il ne parlait pas très bien anglais, mais nous sommes vite devenus amis et depuis, je n’ai jamais cessé de porter des bottes Alpinestar­s. » Quand il crée sa société, en 1963, du côté de Maser, dans la province de Trévise, dans le nord- est de l’Italie, Sante Mazzarolo est un cordonnier qui a appris à travailler le cuir avec son père et son grand- père et qui a en tête de dessiner et fabriquer des chaussures de montagne aussi solides que confortabl­es. Ambitieux et malin, il voit déjà grand quand il monte sa petite entreprise. Elle ne s’appellera ni San Carlo, ni San Giorgio ni San Vittore, mais Alpinestar­s. « C’était un peu diffi cile à prononcer pour les Italiens, s’amuse Mazzarolo, mais je me disais qu’un nom à consonance américaine rendrait ma société plus intéressan­te. » Alpinestar­s pour Stella Alpine, en italien. Edelweiss en français. Une fl eur rare qui pousse en haut des montagnes, loin des regards, et que les alpinistes aiment être les premiers à découvrir quand arrive l’été. « Mon père avait déjà en tête l’idée d’innovation technologi­que, de confort et de protection » , témoigne Gabriele qui a vu le jour quelques semaines avant que ne soit créée la marque familiale, et qui fut très vite associé à sa réussite, tout comme sa mère Dolly et ses soeurs Lucia et Michela. La moto, elle arrive très vite chez Alpinestar­s. « Un type avait tracé un terrain de cross à quelques kilomètres de chez nous, se souvient Sante. À l’époque, c’était plutôt des fi ls de bonne famille qui venaient rouler car tout le monde ne pouvait pas s’offrir une moto. C’est en les observant que je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire pour la protection des motards. C’est comme ça que j’ai commencé à fabriquer mes premières bottes de moto. » Plaque en métal pour protéger le tibia, boucle de fermeture en métal en remplaceme­nt des lacets... Les produits Alpinestar­s deviennent vite des références dans leur domaine. Dès 1965, Sante Mazzarolo se met aussi à travailler sur des bottes plus souples pour un usage routier. Passionné de compétitio­n, Mazzarolo fait par ailleurs la connaissan­ce d’un certain Roger De Coster sur le circuit de Gallarate, là même où le quintuple champion du monde gagnera son tout premier Grand Prix. « Sante m’a demandé d’essayer ses bottes et j’ai tout de suite été conquis, raconte Roger “The Man” De Coster, lui aussi invité de marque au cinquanten­aire de la marque italienne. Nous partagions la même envie de faire du mieux possible dans notre domaine, de nous impliquer pour atteindre le but que nous nous étions fi xés. En quelque sorte, nous avions la même vision de la vie. » Comme le pilote belge fut le premier, en 1971, à glaner un titre de champion du monde de motocross avec des bottes Alpinestar­s, Kenny Roberts fut le premier à en faire autant, sept ans plus tard, sur les circuits

« ALPINESTAR­S, C’ÉTAIT UN PEU DIFFICILE À PRONONCER POUR LES ITALIENS »

de vitesse. Et comme De Coster, le Californie­n restera fi dèle à la marque italienne jusqu’à la fi n de sa carrière. « Sante voulait toujours améliorer ses produits, et c’est aussi pour cela que je me suis toujours très bien entendu avec lui, glisse Kenny. On avait commencé à protéger les orteils des frottement­s de la piste avec une plaque de métal, puis il a réussi à créer une résine qui résistait bien à l’abrasion, tout en étant plus légère et confortabl­e. Sante respectait mon travail et moi le sien. »

UNE ENTREPRISE DE PRÈS DE 500 PERSONNES

Dans les années 80, la plupart des pilotes de Grands Prix adoptent les bottes Alpinestar­s. De son côté, après des études à l’université de Venise, Gabriele Mazzarolo prend petit à petit la main sur l’entreprise familiale. En 1986, le fi ls de Sante part en Californie pour installer la marque sur le continent américain. Les bureaux de Torrance, au sud de Los Angeles, demeurent aujourd’hui encore un haut lieu du développem­ent et de la communicat­ion d’une marque qui s’est aussi installée à Tokyo, autre berceau de la moto, et qui emploie dans le monde près de cinq cents personnes. Comme Alpinestar­s, Randy Mamola a lui aussi cinquante ans. Arrivé en Grands Prix à la fi n des années 70, le pilote américain a joué un rôle important auprès de Gabriele Mazzorolo de qui il est encore très proche aujourd’hui. « J’ai disputé mes premiers Grands Prix, en 1979, avec des bottes Alpinestar­s, témoigne Mamola. J’ai vécu l’époque où les performanc­es des motos ont énormément progressé et où la sécurité est devenue une préoccupat­ion essentiell­e des acteurs de ce sport. Gabriele l’a vite compris en faisant évoluer ses bottes vers toujours plus de protection. J’ai été l’un des premiers à faire du show à la fin des Grands Prix, et il m’est arrivé plus d’une fois de jeter mes bottes dans le public. C’est à cette époque que j’ai dit à Gabriele qu’il fallait aussi évoluer vers des produits plus colorés, plus fl ashy. C’est ce qu’il a fait. » Dans les années 90, Alpinestar­s diversifi e sa production en créant ses premières combinaiso­ns. Carlos Checa sera l’un des premiers pilotes de GP qui aidera la famille Mazzarolo au développem­ent de ses cuirs. Aujourd’hui, les technicien­s Alpinestar­s poursuiven­t la mise au point de leur airbag baptisé Tech Air Race System. Présente dans l’univers du sport auto, Alpinestar­s s’affi che aujourd’hui sur tous les circuits du monde grâce à une politique de communicat­ion particuliè­rement agressive. Motard aguerri, passionné de compétitio­n, ami avec la plupart des pilotes qu’il équipe, Gabriele Mazzarolo a su perpétuer l’esprit qui habitait son père dès la création d’Alpinestar­s. « “One goal, One vision”, notre slogan, résume parfaiteme­nt la philosophi­e de notre entreprise, conclut le patron de la marque italienne. J’ai passé ma vie avec des athlètes de haut niveau, et je sais que nous sommes proches parce que nous partageons ce même engagement et cette même déterminat­ion à réussir en donnant le meilleur de nousmêmes. Mes parents ont démarré ce projet, mais il ne serait pas devenu ce qu’il est aujourd’hui si tous ceux qui ont travaillé et travaillen­t encore avec nous n’avaient pas partagé cette mentalité. »

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