GP Racing

BRAD BINDER LES FINS DE COURSE SONT DEVENUES MON POINT FORT

- Par Michael Scott. Traduction Élodie Frioux. Photos Jean-Aignan Museau.

À Jerez, Brad Binder remportait son premier Grand Prix. Une victoire sud-africaine qui arrive 35 ans après le dernier succès sud-af, celui de Jon Ekerold, champion du monde 350 en 1981. Autant dire historique.

À Jerez, il s’agissait bien d’une victoire exceptionn­elle. Brad, parti en fond de grille à cause d’une entorse au règlement de son équipe ( électroniq­ue non conforme), a ensuite dépassé 34 pilotes avant de s’imposer. Dans l’ère moderne des GP, seuls deux pilotes ont réussi le même exploit. Noboru Ueda au Japon en 1991 et Marc Marquez à Estoril ( 125) et à Valence ( Moto2). Le jeune offi ciel KTM Red Bull Ajo nous répond avec la fraîcheur de ses 20 ans.

Brad, as-tu été surpris de gagner en partant de la dernière ligne ? C’était une surprise, c’est certain, mais au fi nal, je suis plus ravi qu’étonné. J’ai toujours su que je fi nirais par gagner un Grand Prix, mais comme ça, c’est vraiment quelque chose de spécial. En tout cas, ça fait du bien.

Tu sembles avoir acquis une certaine dose de maturité cette année, sur la piste et en dehors... Ces dernières années, je me mettais tout seul dans un état de panique. Mon team manager ne m’appelait pas « Radical » , mais « Panical » . C’est effectivem­ent un aspect sur lequel on a beaucoup travaillé avec mon équipe. Avant, quand j’entrais dans le box, si je n’apparaissa­is pas sur la feuille des temps, je commençais à m’affoler. Aujourd’hui, j’arrive, je fais mon job, et tout se passe beaucoup mieux.

Et en termes de pilotage ? Je suis parfois trop agressif, mais je parviens à me tempérer depuis peu. Enfi n... il m’arrive encore de déraper mais maintenant, je sais comment me comporter lorsque mes pneus commencent à faiblir. Les fi ns de course sont devenues mon point fort.

Certains de tes adversaire­s comme Fenati et Antonelli ont un caractère très explosif. En profites-tu ? Très sincèremen­t, ma priorité numéro un, c’est de me concentrer sur ce que je fais. Je n’ai pas à me soucier de ce qui se passe à côté. J’ai déjà bien assez à faire avec moi.

Un jour, Ekerold m’avait raconté cette anecdote où, pour perturber un concurrent, il lui avait donné une accolade sur la grille : « Je l’avais senti trembler.Je savais qu’il était déjà battu »... ( Rires) J’imagine bien qu’à cette époque, ils jouaient beaucoup plus à ce genre de petits jeux, mais à présent, on ne voit même pas les autres pilotes. On reste concentrés sur nos affaires. Perso, je ne traîne avec aucun de mes adversaire­s. Il y a quelques pilotes Moto3 avec qui je m’entends très bien mais ceux contre qui je me bats en course ne sont pas vraiment des copains.

Comment es-tu arrivé sur la scène internatio­nale, autrement plus active que celle de l’Afrique du Sud ? Je dois remercier mon père pour ça. En Afrique du Sud, j’ai d’abord fait du karting. J’ai été champion en catégorie 50, mais je n’aimais pas le karting autant que la moto. J’ai d’ailleurs fi ni par l’avouer à mon père. À 10 ans, je suis passé aux deux- roues. Après deux saisons en Afrique du Sud, comme ça se passait plutôt bien, mon père a voulu que l’on tente quelque chose en Europe. On a rencontré Garth Harradene qui travaillai­t en Formule 1 à l’époque. Il s’est occupé de moi et m’a trouvé une moto pour l’Aprilia Superteen Series. Le mercredi, mon père achetait la moto et le vendredi, je courais à Brands Hatch. C’était très grisant, j’ai adoré ça. Dès mon arrivée, j’étais déjà le plus rapide sur quelques séances, c’était prometteur. J’ai terminé deuxième de la course. Ensuite, j’ai participé à la Rookies Cup pendant trois ans, et en 2012, j’ai fait ma première saison en Moto3.

Aujourd’hui, tu possèdes l’une des meilleures motos du plateau. Contrairem­ent à ton arrivée... Je n’étais pas dans les meilleurs teams. Les gens avec qui j’étais étaient formidable­s, mais ils n’avaient pas les meilleures motos. Et avec du recul, c’était une bonne chose. J’ai dû me battre encore plus fort et lorsque j’ai eu une meilleure moto, tout a été plus facile.

Tu disais vouloir changer de catégorie. Feras-tu comme Jack Miller en passant directemen­t de la Moto3 à la MotoGP ? Je ne pense pas qu’on me le proposera. C’est un énorme changement. J’ai eu l’occasion d’essayer la Moto2 de Johann Zarco l’année dernière à Valence, et ça n’avait déjà plus rien à voir avec la Moto3. Alors, se retrouver sur une MotoGP...

As-tu des options pour l’année prochaine ? Je ne sais pas, c’est mon manager qui s’en occupe. J’aurai une conversati­on avec lui lorsque toutes les offres seront tombées.

As-tu un modèle, un héros en tant que pilote ? Autant que je me souvienne, j’ai toujours connu le numéro 46. Valentino Rossi est mon héros, mais j’admirais aussi beaucoup Casey Stoner. J’ai aimé sa façon de faire : il est arrivé, a fait le boulot, puis s’est retiré. Il ne s’est pas vraiment impliqué dans quoi que ce soit en dehors de la piste. J’aimerais mener ma carrière de la même façon.

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