GQ (France)

UNE RÉSOLUTION FRANÇAISE

Quand un ancien ministre de gauche, chantre du « made in France », se lance dans le business et accepte de le raconter, c’est une petite révolution. Ce mois-ci, GQ consacre donc sa couverture à un homme politique, une fois n’est pas coutume !

- Arnaud Montebourg

Lorsque nous avons appris en novembre dernier qu’arnaud Montebourg voulait soudain embrasser une nouvelle carrière d’homme d’affaires, monter sa start-up et qu’il faisait sa rentrée à l’lnsead, ce prestigieu­x centre de formation des top-managers, nous n’en avons cru ni nos yeux ni nos oreilles : « Mark Zuckerberg, sors de ce corps ! » Lui, le ministre le plus turbulent et « frondeur » des gouverneme­nts Ayrault puis Valls, lui le « colbertist­e », si peu suspect de vénérer la libreentre­prise, si attaché à l’interventi­on de l’état en matière économique que les charolaise­s de Saône-etLoire à leur pré, lui, la grande gueule de gauche capable de mettre des coups de pression à Lakshmi Mittal (Arcelor) ou à Patrick Kron (Alstom), serait devenu du jour au lendemain un fan des « direct PNL » et des marges brutes d’exploitati­on ? Oui, lui. L’homme qui nous confie en exclusivit­é ce mois-ci son business plan pour 2015 (voir p. 74) et sera même l’invité de la prestigieu­se université américaine de Princeton le mois prochain, est bien le même que celui qui confiait à Capital en 2014 : « Je dis aux patrons : “Arrêtez vos jérémiades” ». Ou à M Le Monde en 2013 : « Je ne déteste pas les patrons, je n’aime pas les cons, c’est différent. »

Mais passée la surprise de voir l’un des héros de la « gauche de la gauche » marcher sur les traces de Mark plutôt que celles de Marx, avec avouons-le une forme d’incrédulit­é amusée, on se rend vite compte à la lecture de ce portrait-interview que la révolution profession­nelle et personnell­e de Montebourg dépasse le simple coup de com’ à visée 2017. D’abord parce qu’elle prend sa source bien avant le départ tonitruant du gouverneme­nt du « ministre du Redresseme­nt productif » (l’intitulé roosevelti­en nous fait encore beaucoup rire). Ensuite parce qu’elle résonne finalement avec les ambitions ou les doutes de chacun d’entre nous. Doit-on « tout quitter pour trouver tout » comme le formula un jour joliment le cinéaste Wim Wenders ? Faut-il devenir son propre boss pour cesser de subir chaque jour un N+1, une multinatio­nale sans (état d’) âme ou le filet de hoki du restaurant d’entreprise ? La gestion d’une boîte peut-elle décemment être la continuati­on de la politique par d’autres moyens ?

C’est à beaucoup de ces questions que répond Arnaud Montebourg dans ce numéro, confiant par exemple à notre journalist­e Fabrice Tassel l’une des possibles clés de cette « reconversi­on », le ressort psychologi­que de ce grand écart entre sa conscience de gauche et son esprit start-up : « Changer de vie est un acte profondéme­nt révolution­naire ». Révolution, il faut voir. Résolution, sûrement. À méditer en tout cas, en ce début d’année 2015, que toute la rédaction de GQ vous souhaite chic et stylée !

« Changer de vie est un acte révolution­naire. »

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