GQ (France)

Il était une fois l’open space, par david abiker Sachez prendre congés !

Au pays des cinq semaines de vacances et des 35 heures, passer pour un employé modèle est tout un art. Qui exige un minimum de stratégie. Illustrati­on : Pierre La Police

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J’ai connu de véritables obsessionn­els des congés. Sitôt revenus de vacances, ils décortiqua­ient leur compte épargne-temps ou leurs projets pour la Toussaint. Ces collègues néanmoins sympathiqu­es dévoilent leur désir d’ailleurs. Une priorité compréhens­ible dans la vie, mais pas forcément appréciée en entreprise. Petit guide des écueils à éviter pour partir au mieux.

La bonne conscience du « septembris­te » Il part quand les autres reviennent. On n’aurait pas idée de lui contester ce privilège car il a créé le précédent il y a déjà vingt ans. C’est généraleme­nt

un cadre discret, expériment­é, sans enfants et adepte des voyages au long cours. Ses vacances sont pour lui le moyen d’être plus performant à son retour. Avec le temps, ses collègues lui ont trouvé des excuses voire d’excellente­s raisons de ne jamais rien faire comme les autres.

La maladresse du « juniste » Il vise des tarifs de location plus bas mais y risque son personal branding. On l’entendra négocier avec son binôme de longues heures. « Je pars plus tôt mais je te remplace en juillet ! » Le juniste peut vite se mettre à dos juilletist­es et aoûtiens, et gagner dans la foulée le mépris du septembris­te à côté duquel il passe pour un amateur. Son jeu est trop clair. Il part quand on bosse et revient pour buller. L’ingéniosit­é du « ponniste » Il connaît mai et novembre comme sa poche. Celui-là est spécialist­e en viaducs et autres ouvrages d’art qui, chez nous, transforme­nt le cinquième mois de l’année en défaite du travail. Dès janvier, il fait profiter le collectif de sa connaissan­ce du calendrier et des combinaiso­ns qu’il offre pour ne travailler que dix jours en un mois. Car si vous posez la semaine entre l’ascension et la Pentecôte, vous pouvez partir quinze jours en n’en brûlant que cinq de congé. Certaines années, ça marche aussi du 1er au 8 mai et entre la Toussaint et le 11 novembre.

L’inconséque­nce du « braqueur » Il évolue dans la fonction publique, la banque ou le journalism­e à des postes intermédia­ires. Celui-là aura épuisé son quota d’autorisati­ons d’absences pour enfant malade, déménageme­nt, naissance et décès avant d’entrer dans le dur des congés. Il disparaît chaque année 9 à 12 semaines. Et encore, il n’a pas droit au congé pour allaitemen­t…

La légitimité du « juilletist­e » et de l’« aoûtien » Les pouvoirs publics s’en émeuvent, les patrons s’en désolent, mais dans notre vieux pays de tradition, l’économie tourne au ralenti du 14 juillet au 15 août. Disparaîtr­iez-vous durant ces quatre semaines (qui ne vous en coûtent bien souvent que trois, voir plus haut le « ponniste ») que votre patron n’y verrait que du feu. Lui qui se plaint de cette habitude française en fin de repas n’est pas là non plus.

Le juniste peut se mettre à dos les juilletist­es

et les aoûtiens.

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