GQ (France)

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« Murderable ». C’est le mot le plus juste et le plus fort que j’ai lu jusqu’à présent sur le sentiment étrange qui nous accompagne depuis les attentats du 13 novembre et du 7 janvier 2015. « Murderable », comme cette impression d’être « vulnérable » et « mortel » à la fois, et que seul l’anglais parvient à condenser en une seule expression. « Murderable », comme si la langue française ne pouvait pas encore traduire le flip inédit de se sentir « visé personnell­ement », pour longtemps. Ce trait de génie littéraire, c’est l’écrivain irlandais Robert Mcliam Wilson qui l’a eu. Il a vécu le Belfast de la guerre civile. Il vit aujourd’hui à Paris. Il sait de quoi il parle. Il ne nous épargne pas. Lisez, amis lecteurs, l’analyse saisissant­e qu’il livre à nos journalist­es Gonzague Dupleix et Toma Clarac (en intégralit­é sur le site de GQ et en short edit dans ce numéro p. 42). Les mots de Mcliam Wilson m’ont éclairé, réconforté, aidé à « panser » l’événement. J’habite à cent mètres du Bataclan. Comme tant de Parisiens, j’ai passé la nuit du 13 novembre entre ma fenêtre et BFM TV, les hurlements de sirènes et les sons d’armes automatiqu­es, mon téléphone, les SMS « vous êtes ok ? » et quelques images qui me hantent encore – ce jeune homme qui marche, T-shirt en sang et couverture de survie scintillan­te, très calme. Comme tant de monde, j’ai passé les jours suivants à tout lire, tout voir, pour tenter de comprendre, d’exorciser. Jusqu’à l’overdose morbide. Ce mot, « murderable », a finalement eu la même fonction salvatrice que deux autres « traits de génie », graphiques ceux-là. Je veux parler du fameux « Je suis Charlie » que le directeur artistique Joachim Roncin avait posté sur Twitter dans les minutes qui ont suivi l’attaque du journal satirique. « Je n’avais pas les mots », avait-il expliqué humblement. C’est le même pouvoir créatif, symbolique et viral, qui a conduit le graphiste Jean Jullien à tirer un simple trait sous le symbole « Peace and Love » – inventé par Gerald Holtom en 1958 contre les armes nucléaires – pour en faire cette « Eiffel Power » universell­e qui a fleuri partout à Rio, Sydney et en bas de chez moi. Lui non plus n’avait pas de mots. En ce mois de janvier 2016, nous sommes tous devenus « murderable », mais attention, nous dit Mcliam Wilson, ce n’est pas forcément un drame, au contraire : « Vous allez même devenir plus drôles », nous prévient-il, provocateu­r. Banco. Et Happy New Year !

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