GQ (France)

Battle TENNIS

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à lui posé quelques kilomètres plus bas, à Portland même, dans un bâtiment de verre et d’acier de dimensions plus modestes, situé près de vieux entrepôts. Il y règne une atmosphère accueillan­te, à la bonne franquette. La seule sécurité en place se résume à une dame aux cheveux gris et à l’air un peu fatigué, qui m’encourage à écrire mon nom au marqueur sur un autocollan­t blanc. Paul Gaudio, directeur monde du design, occupe un bureau de l’aile est de l’immeuble. C’est un vétéran de l’entreprise : il y a passé les vingt dernières années, à l’exception d’un bref intérim chez Norton Motorcycle­s. Il porte court ses cheveux poivre et sel ; sous ses paupières joliment tombantes brillent des yeux bleu ardoise. Le jour où nous le rencontron­s, il est vêtu d’un T-shirt noir, d’un jean à coupe droite et d’une vieille paire de bottes de moto. Les initiales de sa femme sont tatouées sur ses phalanges. Sur une table est posée une paire de Yeezy 750. Gaudio explique à demi-mot que le modèle, par son prix de 320 euros et sa rareté, possède un statut économique comparable, toutes proportion­s gardées, à celui d’une Porsche 918 Spyder : ce sont deux produits extrêmemen­t convoités et dont l’existence même sur le marché valorise à elle seule l’ensemble de la marque qui les a fabriqués. « Une sorte d’aura émane de cette chaussure, affirme Gaudio en la prenant dans la main. Et on espère que cette aura rejaillira sur tout ce que nous sortirons par ailleurs. C’est une pièce qui tient lieu de statement, vous comprenez ? Le reste de notre offre profite de tout ce qu’il y a de captivant en elle. » Derrière Gaudio, on aperçoit une série de croquis de sneakers : nous avons promis à Adidas de ne pas en parler à qui que ce soit, sous aucun prétexte, et nous nous contentero­ns de dire ici que nombre d’entre eux sont beaux et étranges, évoquant ici des serres d’oiseaux de proie, là des vaisseaux spatiaux profilés sortis de la gueule même de l’étoile noire. Ces dessins réalisés par une équipe de jeunes designers représente­nt bien le genre de produits atypiques et provocateu­rs que Gaudio attend de son studio satellite de Brooklyn. Il ajoute qu’il est important de donner à ces talents juvéniles l’occasion de pouvoir travailler tantôt ici près de lui, tantôt à New York, tantôt ailleurs. Gaudio explique qu’environ 25 employés oeuvreront à Brooklyn, parmi lesquels on comptera des chercheurs en étude de consommate­urs ainsi qu’une équipe spécifique­ment dédiée aux réseaux sociaux. On leur laissera volontaire­ment beaucoup de mou, afin de les encourager à jouer avec des concepts qui n’auraient jamais été considérés auparavant chez Adidas, et encore moins chez Nike. Si Adidas a convaincu la troïka de Nike de quitter leur maison-mère c’est, dit-on, grâce à Brian Foresta, vice-président du design en charge du basket. Foresta ayant lui aussi travaillé chez Nike par le passé, il sait mieux que quiconque que la branche dont il s’occupe aujourd’hui doit relever un défi particuliè­rement ardu. Il a 41 ans mais en paraît vingt de moins : il a les cheveux soigneusem­ent plaqués en arrière et porte sa barbe longue mais taillée. Son bureau est une sorte de repaire moquetté et arrangé avec un soin presque maniaque. L’ensemble a des airs de moodboard gran-

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