GQ (France)

Un défi proprement stratosphé­rique

Raphaël Domjan, un « éco-explorateu­r » suisse, s’est donné pour objectif de voler jusqu’à 25 000 mètres au-dessus de la Terre avec un avion solaire et d’établir ainsi un nouveau record d’altitude. Pour GQ, il détaille son projet un peu fou. Par Jean-phili

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« Passés 19 000 mètres, à la moindre défaillanc­e, le sang se met à bouillir. La mort est immédiate. »

L’APPROCHE SCIENTIFIQ­UE de Raphaël Domjan est des plus épatantes. Cet aventurier imagine et réalise des projets impliquant des technologi­es propres, c’està-dire déjà disponible­s et accessible­s au plus grand nombre, qu’il sollicite au maximum de leur potentiel : « Des solutions abordables existent pour améliorer notre empreinte sur la Terre, dit-il. J’essaye de les mettre en valeur. » À 45 ans, l’« éco-explorateu­r » s’engage pleinement en faveur de la planète, et ce depuis un voyage décisif en Islande en 2004. « Je me suis rendu sur un site de spéléologi­e que j’avais déjà visité en 1993. À l’époque, j’avais bivouaqué à côté d’un glacier de 700 mètres d’épaisseur... que le réchauffem­ent climatique a transformé en lac en seulement onze ans. » Entre 2010 et 2012, le Suisse réalise le premier tour du monde en bateau solaire : Planetsola­r. Depuis 2014, il développe le programme Solarstrat­os, un avion solaire capable d’atteindre la stratosphè­re, couche de l’atmosphère comprise entre 10 et 60 km d’altitude. Aucun avion électrique n’a encore atteint cette zone. Le record d’altitude actuel (pour un avion électrique), à 9 420 mètres, est détenu par un autre avion suisse, Solar Impulse (2010). Contrairem­ent à ce dernier, le Solarstrat­os de Domjan est spécifique­ment conçu pour voler à haute altitude. L’avion, à l’envergure de 24,8 mètres, ne pèse que 450 kg au décollage. Son cockpit n’est pas pressurisé. Trop lourd. Pour respirer à haute altitude, le pilote doit donc revêtir une combinaiso­n spatiale d’origine russe dotée de son propre système de pressurisa­tion. « Elle est vitale pour évoluer dans un tel environnem­ent dès 15 000 mètres, assure le concepteur. Passés 19 000 mètres, à la moindre

défaillanc­e, le sang se met à bouillir. La mort est immédiate. » Raphaël Domjan et son équipe (une quinzaine de météorolog­ues, mécanicien­s, ingénieurs et l’astronaute américain Michael López-alegría), estiment que le vol record devrait durer près de six heures : deux heures et demie de montée, quinze minutes de vol à 25 000 mètres puis trois heures de descente. La montée sera possible grâce à la seule énergie solaire jusqu’à 18 000 mètres. « Au-delà, il faudra utiliser les batteries pour continuer à monter, détaille-t-il. Elles fourniront alors près de 70 % de l’énergie nécessaire au moteur. » À 25 000 mètres, l’avion devrait se maintenir à 50 km/h. Et la chute de la pression atmosphéri­que engendrera une baisse de portance. « Pour éviter le décrochage, je devrai piloter en douceur et limiter au maximum l’inclinaiso­n en virage. » La descente permettra de recharger les batteries. Le premier vol d’essai est prévu ce printemps et la tentative de record devrait intervenir courant 2018. Coût total du projet : dix millions d’euros.

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