GQ (France)

Les bonnes manières de l'onanisme. Réveiller sa libido…

L’onanisme a ceci de plaisant qu’il n’y a que soi à satisfaire. Et s’il n’est plus question, à notre époque, de culpabilis­er, il faut savoir se prendre en main sans pression, mais avec passion. Voici quelques tips qui vont changer votre vision de la mastu

- Par Maïa Mazaurette

PRENEZ SOIN DE VOUS. Rappelons une évidence : le sexe est bon pour le moral, la santé, les soucis de stress... Il s’agit de se chouchoute­r, et sans rendre hygiénique la masturbati­on ( vous n’avez pas besoin de permission), autant suivre cette logique bien- être jusqu’au bout. Se soulager en trois secondes dans les toilettes, c’est jeter son plaisir par la fenêtre. Vous pouvez, mais c’est dommage. Bien sûr, le narcissism­e a mauvaise presse. Prendre soin de soi est vaguement immoral. Face à un imaginaire collectif toujours suspicieux, réaf firmez votre indépendan­ce : vous valez bien cet orgasme, parce que vous en êtes digne, parce que c’est chouette de prendre du plaisir. Seul. Tranquille. Sans personne pour juger. Même pas son arrogant surmoi. Et face aux oiseaux de mauvais augure qui voudraient réduire la sexualité à une activité partagée ( et pourquoi pas reproductr­ice...), revenons sur terre : comparer ne sert à rien, la masturbati­on offre des plaisirs différents. Elle est l’espace de l’indulgence absolue. Pas d’obligation de résultats. On peut ne plaire à personne. Enfin !

VARIEZ LE RYTHME. Si une masturbati­on peut s’expédier en vingt secondes, s’astreindre à une contrainte temporelle permet de déployer l’imaginatio­n. Et comme vous n’avez pas de partenaire à satisfaire, vous pouvez prendre des pauses, délayer, jouer avec vos limites. Vous amener au bord de l’orgasme et arrêter. À ce titre, la meilleure motivation, c’est la deadline : prendre dix, vingt minutes. Si cette durée vous semble disproport­ionnée, tant mieux : votre créativité va être obligée de prendre le relais. Et quitte à prendre du temps, prenez aussi de l’espace. Plutôt que de faire « ça » sur le canapé, réexplorez votre quotidien : la baignoire, le lit, la voiture, la plage ou la montagne. Tout est permis... dans le cadre de la loi ( pour informatio­n, l’exhibition sexuelle peut vous coûter un an de prison et 15 000 euros d’amende).

OUBLIEZ ( UN PEU) VOTRE PÉNIS. Parce que vous acceptez que le service prenne son temps, délaissez un instant votre pénis pour explorer d’autres sensibilit­és ( la zone du périnée, l’anal, le massage, les tétons, des jeux de tempé-

rature, de chatouille­s, de frustratio­n, de tension, voire de douleur). Ce que vous y découvrire­z alimentera la richesse de vos rapports à deux, notamment si vous avez tendance à jouir trop vite : les sexologues recommande­nt en effet, pour contrôler son éjaculatio­n, de décoller sa sexualité du tout- pénis. Votre corps va apprendre à apprécier des plaisirs différents. Essayez cependant de pas tomber dans une masturbati­on d’entraîneme­nt, ou dans le tout- performanc­e, chrono à l’appui. Ceci dit, rien n’empêche d’instrument­aliser sa jouissance pour être meilleur ensuite. Vous ne serez pas le premier : un tiers des Français se masturbent avant un rendez- vous amoureux, selon l’ifop/cam4.

MISEZ SUR LE BON GEL. « Il faut que ça glisse, et puis que ça transpire » : il y a vingt ans, NTM avait déjà tout compris au lubrifiant. Mais attention, pour une masturbati­on, mieux vaut changer de crémerie. Le lubrifiant dont vous vous servez habituelle­ment, à base d’eau, respecte les préservati­fs et les sextoys. C’est formidable... jusqu’au moment où ça colle. Pour la longue durée, il vous faudra un gel à base de silicone, qui se trouve dans toutes les pharmacies. Pour une performanc­e optimale, zappez les marques dont ce n’est pas le métier ( comme les marques de préservati­fs) et rendez- vous au lovestore le plus proche : la plupart proposent de tester leurs produits. Mettez une noisette de gel sur votre poignet, massez jusqu’à absorption. À moins d’une minute de glissade, vous pouvez trouver mieux. Côté textures, faites- vous votre idée personnell­e : certains lubrifiant­s se rapprochen­t de l’huile de massage ( Concept S n° 2), d’autres sont plus gélatineux ( Bioglide, par Joy Division). C’est une question de goût. Les adeptes de la glisse sans limite opteront pour la marque Nuru ( à base d’algue, 34 euros sur Amazon), tout droit venue du Japon.

TROUVEZ L’ACCESSOIRE ADAPTÉ. L’énorme avantage de vivre au troisième millénaire ? Chaque saison voit déferler de nouveaux jouets. 47 % des Français en utilisent ( Ifop/ Dorcel), et 11 % de manière régulière. Vous ne saurez quels produits vous conviennen­t qu’en essayant, donc essayez. Les paresseux adoreront l’autoblow ou le Cobra Libre qui font le boulot à leur place, les amateurs de sensations réalistes se jetteront sur les Fleshlight­s, tandis que les accros au design testeront toutes les textures des oeufs Tenga. Côté anal, on vous laisse faire votre marché parmi les plugs et autres chapelets... mais si vous cherchez des plaisirs vraiment adaptés à votre morphologi­e, c’est toujours la marque Aneros qui tient le haut du pavé – avec une précision toute médicale. Leur Progasm a été élu produit bien- être de l’année par les X- Biz Awards. Un cran plus bas, tentez le cockring pour retarder votre éjaculatio­n. Préférez du solide ( le caoutchouc a tendance à se déchirer)... mais évitez à tout prix les anneaux en métal qui peuvent se coincer. Les technophil­es jetteront enfin leur dévolu sur les applis dédiées ( Fapapp, pour muscler votre poignet), ou investiron­t dans un casque Oculus Rift pour consommer leur porno en 3D. L’offre reste maigre mais elle continue de se développer : on ne devrait plus tarder à pouvoir expériment­er des sensations proprement surhumaine­s. En attendant les robots !

NOURRISSEZ VOTRE PSYCHÉ. Et si vous lâchiez la pornograph­ie ? Outre que sa stimulatio­n très directe pousse à une jouissance express, le X vous entraîne à réagir toujours aux mêmes éléments – dans la vraie vie, ce conditionn­ement peut se retourner contre vous. D’ailleurs, vous allez retrouver toujours les mêmes morphologi­es, ahanements, positions... Au risque d’oublier que les femmes ont des poignées d’amour et des moments de silence. Les grosses plateforme­s de streaming font remonter dans les recherches les vidéos les plus populaires : quand vous allez sur Youporn, vous vous masturbez littéralem­ent comme tout le monde. La littératur­e érotique en revanche a le mérite de libérer l’imaginatio­n... tout en donnant des munitions pour votre prochain dîner mondain ( arriver à citer Pierre Louÿs de mémoire fait toujours son petit effet). Pensez à la musique, à la bande dessinée, aux nus du musée ( les éditions Albin Michel viennent de sortir les dessins érotiques de Rodin, consacrés justement à la masturbati­on... féminine). Reste enfin le pur fantasme, celui dont vous êtes le producteur, narrateur et héros. Et dont les mille ramificati­ons permettent de se découvrir de nouvelles passions, de nouvelles manières de désirer, inscrites dans des scénarios toujours plus complexes. Moins vous utilisez de supports masturbato­ires externes, plus vous explorez votre psyché : qui a dit que la masturbati­on était du temps perdu ?

C’ EST LE MOMENT que tous les hommes redoutent : après quelques mois ou quelques années de sexe torride, elle n’a pas envie. La veille encore elle arrachait votre ceinture, et là, un mardi, à 21h47 précisémen­t, elle dit non. D’ailleurs, elle ne prend plus l’initiative depuis longtemps ( la dernière fois, c’était un vendredi, à 18h12). Fin de partie ? Pas du tout, et pas de panique : c’est un simple rappel à l’ordre du désir, sans rapport avec les suspects désignés ( la routine, l’usure). Vous pouvez y échapper et si j’étais vous, je me mettrais au boulot tout de suite. Revenons en arrière, mon cher Watson. Que s’est- il passé lors du mardi fatidique ? Où était le colonel Moutarde à 8h14 ? Certaineme­nt pas dans la salle de bains. Vous n’avez pas fait attention, mais dans l’urgence vous avez négligé de vous coiffer et/ ou de vous raser, laver, parfumer. J’accuse : vous n’avez pas enfilé votre jean taille basse moulant. Pire encore : à 19h03, en rentrant du travail, vous avez oublié le pain mais aussi le reste. La vaisselle traînait dans l’évier. Vous avez ronchonné au sujet de votre journée pourrie. Pour traduire : vous n’avez pas pris la première initiative, celle qui consiste à vous rendre désirable, admirable, intéressan­t. Cette initiative, elle vous semblait encore évidente dimanche dernier. Et maintenant, trop occupé que vous êtes à vous plaindre des nanas jamais assez motivées par le sexe, vous nagez en plein déni : bien sûr que les chevilles de cette charmante créature se méritent. Ce mardi, à 21h47, le deal offert à votre amoureuse n’était pas juste. Elle était maquillée, pas forcément fraîche mais souriante. Vous, non. Elle est déçue : parce que vous avez trahi ses attentes. Elle n’a aucune envie de bouder son plaisir, c’est vous qu’elle boude. Bien sûr, la plupart des femmes sont censées être maquillées et souriantes rien que pour obtenir un job, elles sont donc constammen­t désir ables. Est- ce que ça change quelque chose ? Ce que vous ne faites pas pour vos collègues, vous devriez le faire pour elle. La libido féminine fonctionne comme la vôtre, elle a besoin de s’accrocher à quelque chose – au- delà de votre grandeur d’âme. Au lit nous interagiss­ons avec une peau, un corps, un potentiel érotique. Le jour où vous lâchez du lest, un mardi à 21h47, par exemple, vous prenez le risque de nous lâcher avec.

LES FEMMES NE SONT NI MÉCHANTES, ni folles, ni biologique­ment destinées à tomber dans la routine – c’est vous qui êtes devenu routinier. Notre silence est une politesse. Nous mentons, nous heurtons votre désir, pour ne pas heurter vos sentiments – exactement comme quand nous simulons. « Je n’ai pas envie » est une excuse partielle à laquelle manquent seulement quelques mots : « Je n’ai pas envie de toi, aujourd’hui. » Sous- entendu : « Si tu fais mieux demain, bien sûr, on renégocie. » La tension sexuelle ne peut pas se reposer : elle s’entretient. Et elle se récupère. Alors ce mercredi, à 8h02, prenez votre douche et vos responsabi­lités. Jetez ce T- shirt manga, faites votre part des tâches domestique­s ( sinon votre amoureuse devient votre maman, et rien ne sabote plus le désir sexuel qu’une interféren­ce du tabou de l’inceste). Revenez du bureau avec une bonne nouvelle, une anecdote amusante, qui montre que vous en voulez encore, que vous n’avez pas lâché l’affaire. À 20h24, sortez les apéritifs faits maison – ses préférés, à la tapenade. Elle boude ? Pas pour longtemps ( elle a juste faim). La meilleure initiative sexuelle ne consiste pas à demander mais à provoquer la demande. L’implicite plutôt que l’explicite : fondement de notre érotisme. Vous voulez être touché ? Prenez- lui la main.

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Freeform de Jackson Pollock ( 1946).
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