GQ (France)

STACY MARTIN, DE LONDRES À LA LUMIÈRE La jeune actrice francobrit­annique révélée par Nymphomani­ac est à l’affiche du Redoutable, le nouveau film de Michel Hazanavici­us. Portrait.

Révélée dans Nymphomani­ac, la jeune actrice franco-anglaise est aujourd’hui à l’affiche du Redoutable de Michel Hazanavici­us. Le début de la gloire ?

- Par Toma Clarac

IL EXISTE des entrées en cinéma plus brutales que d’autres. Dans le premier volet du diptyque Nymphomani­ac, du démiurge danois Lars von Trier, Stacy Martin campe Joe, une jeune femme qui développe une addiction traumatisa­nte pour le sexe ( dans la deuxième partie, le rôle est repris par Charlotte Gainsbourg). La matière est incandesce­nte, la forme expériment­ale et l’héroïne sulfureuse : en 2013, pour ses premiers pas devant l a caméra, Stacy Martin se lance sans filet. « C’était très instinctif, explique l’actrice dans un bistrot en vue de Pigalle où elle assure la promo du Redoutable, le nouveau film de Michel Hazanavici­us. À la base, je ne pensais pas avoir le rôle. Du coup, tout était très abstrait. » L’actrice, née à Paris d’un père français et d’une mère anglaise, a- t- elle tout de même été tentée de faire marche arrière ? « La question ne s’est jamais posée, assuret- elle. Nymphomani­ac, c’est un scénario de 400 pages. Je l ’ ai lu comme un roman et je me suis raccrochée à cette expérience. Quand je me suis retrouvée sur le plateau, je me suis très bien entendue avec Lars. Il y a bien eu des moments de doute, mais je ne m’en rendais pas forcément compte. Lars me disait simplement : “On arrête cinq minutes”. Le reste du temps j’étais dans une bulle. »

DÉMARRER une carrière avec un rôle aussi exposé peut donner des ailes comme les brûler définitive­ment. Mais Stacy Mart in s ’ est- el l e seulement posé la question ? À

26 ans, l’actrice a encore la mine candide d’une ado espiègle. Détail insignif iant – ou non –, elle mange une compote. Un goût qu’on s ’ empresse, sans aucune raison, d’attribuer à sa double nationalit­é franco- anglaise. « Ça ne vous embête pas ? » demande- t- elle. « Pas du tout » , répond- on benoîtemen­t, avant de préciser qu’on trouve ça « super » . .. Quand elle parle, on croit deviner un léger accent britanniqu­e, mais ce n’est sûrement qu’une affaire d’idiotismes ou alors un désir inavoué de la fantasmer en néo- Jane Birkin, avec qui elle partage quelques ( jolis) traits physiques.

LE JEU a d’abord été pour elle une passion auxiliaire. Avant le casting de Nympho

maniac, qui l’a propulsée face à Shia Labeouf et Uma Thurman, elle a suivi, à Londres où elle vit toujours, des études de communicat­ion. Ou de sociologie. Ou de médias. Bref un truc anglais sans équivalent précis en France : « Quelque chose comme la continuati­on d’un bac ES » , explique Stacy Martin. Soit des études qu’on entreprend sans trop savoir où elles mènent : « Je n’ai absolument aucune idée de ce que j’aurais fait si je n’étais pas devenue actrice » , admet- elle sans détour. Heureuseme­nt, des séances de mannequina­t lui permettent de mettre quelques sous de côté. Économies qu’elle investit dans un cursus théâtral suivi lors d’une année de césure.

DIT COMME ÇA, les choses ont l ’ ai r rudement simples mais c’est sans doute absolument faux. D’ailleurs, entre les échecs de La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil, du dessinateu­r star Joann Sfar, et de Taj

Mahal de Nicolas Saada, et en dépit d’une apparition merveilleu­se dans le curieux Tale of Tales de Matteo Garrone ( le réalisateu­r de Gomorra), l’après Lars von Trier s’est avéré laborieux. Au vu de l’aisance avec laquel le l ’ actrice évolue dans Le Redoutable, il n’y a toutefois aucune raison de s’alarmer. En brossant dans son nouveau f ilm le portrait du couple orageux formé par Jean- Luc Godard et Anne Wiazemsky, Michel Hazanavici­us entraîne l’actrice sur un terrain qu’elle ne connaissai­t pas: la comédie. « L’univers part i - culier imaginé par Michel pour ce film, pas si éloigné de The Artist ou D’OSS 117 m’a, au f inal, permis de m’approprier l e rôle » , indique Stacy Martin, visiblemen­t peu consciente des charmes qu’ e l le déploie dans le f ilm. Doit- on voir dans ce commentair­e excessivem­ent timide un accès de candeur ou une manifestat­ion furtive d’espiègleri­e ? Qu’importe, en définitive : comme pour la compote, on lui pardonne volontiers.

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Ne prononcez pas Stacy « Marteen » , mais « Martin » , ( comme Jacques).
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Anne Wiazemsky ( Stacy Martin), et Jean- Luc Godard ( Louis Garrel) : une liaison orageuse.

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