GQ (France)

Rester un parfait gentleman ( même quand il fait froid).

-

— L’allure, d’abord. L’homme- ours est baraqué, bourru, épais, équipé d’une sorte de dad bod sous testostéro­ne. Les muscles ne sont pas tracés, mais peuvent soulever un bon 100 kg sans échauffeme­nt en développé couché. La sèche ? Jamais de la vie. Il aime trop manger et le sport ne sert qu’à compenser son hédonisme. Souvent, il porte la barbe, il l’aime plus que tout, il en est presque devenu fétichiste. De loin, elle n’a pas l’air d’être méticuleus­ement taillée ; plutôt négligée, donc forcément cool. Un peu comme les cires qui donnent un air décoiffé, dont l’effet est de faire croire qu’il n’y en a pas. Imaginez si Jeff Bridges et Vincent Cassel avaient un gamin ensemble, et si ce gamin avait lui- même un autre gamin avec le fils d’ernest Hemingway et Vincent Lindon. Le résultat de cette fabuleuse union, saupoudré d’un peu de Jon Snow, est notre prototype parfait. Il porte des pulls à grosses mailles bien souvent vendus par de vieilles maisons

spécialisé­es type Saint James ou SNS Herning, des chemises à carreaux « de bûcheron » de chez Patagonia, des Vans ou des boots en cuir patiné. De loin, il paraît presque négligé avec ses T- shirts troués ; de près, toutes ces petites unicités le rendent mystérieux. Mais que fait- il dans la vie pour avoir un jean déglingué, une barbe mal taillée, un gabarit de troisième ligne et, en même temps, un poignet décoré de Rolex et bracelets Love de Cartier ? Car oui, l’homme ne renie absolument pas le luxe ; le savoir- faire et le travail des mains revêtent une immense importance pour lui. On dirait parfois un homme des cavernes mais il tente de vous convaincre que mettre 5 000 euros dans une sublime couverture en cachemire est entièremen­t normal ( comme les cafés « durable » à 6 € la tasse). Une couverture comme ça, il en a une très belle dans sa cabane de la côte Basque où il surfe toute l’année. La meilleure période, c’est bien évidemment l’hiver, « sans les touristes » , même s’il n’est pas de la région et n’y réside pas toute l’année. D’ailleurs, il dit « cabane » au lieu de « maison » parce que ça fait tout de suite penser au bois, et le bois, c’est cool. Le bois, ça dure, ça fait penser à la hache ( il en a une dans son garage et il sait l’utiliser – pas comme les hipsters), la sciure, la cheminée et les parfums Tom Ford. Il dit aussi ça parce que « maison de campagne » , c’est pour les bourgeois, et « cabane » , c’est modeste, comme les richissime­s Américains qui ont des « bungalows » à Malibu qui coûtent plus cher qu’un T12 en plein centre de Paris. Notre homme préfère fabriquer qu’acheter, il est un vrai « maker » comme on dit dans les milieux tech ( qu’il déteste). Ses enfants n’ont pas le droit d’utiliser l’ipad sauf pour regarder des tutoriels de bricolage, et pas pour ces saloperies de slime ( prononcer « slaïme » ) sans borax ( cette pâte visqueuse à pétrir, très prisée des petits). Avec son cambouis sur les mains et sa dégaine d’homme de Cro- Magnon, on pourrait presque le prendre pour un redneck aux pensées politiques hyper problémati­ques et obscuranti­stes. Bien au contraire ! Il vote à gauche, mais pas écolo parce qu’au fond de lui, il n’est pas utopiste : il veut avoir un vrai impact.

Michael Douglas, ( mauvais) génie de la finance dans Wallstreet ( Oliver Stone, 1987).

 ??  ?? Robert Redford, élégant mountainma­n dans Jeremiah Johnson ( Sidney Polack, 1972).
Robert Redford, élégant mountainma­n dans Jeremiah Johnson ( Sidney Polack, 1972).
 ??  ?? Des arbres, une barbe, un air pénétré... Matthew 
Mcconaughe­y en déserteur et homme des 
bois dans Freestate
of
jones ( Gary Ross, 2016).
Des arbres, une barbe, un air pénétré... Matthew Mcconaughe­y en déserteur et homme des bois dans Freestate of jones ( Gary Ross, 2016).
 ??  ?? Ralph Lauren, collection automne 2017. Tenu e camo uflag mais class e, e!
Ralph Lauren, collection automne 2017. Tenu e camo uflag mais class e, e!

Newspapers in French

Newspapers from France