GQ (France)

Le binturong, quand l’amour sent le pop- corn.

LE BINTURONG, DRAGUEUR AU POP-CORN Hirsute et mignon, ce rongeur tropical a le chic pour exhaler la luxure et donner faim (dans tous les sens du terme) à ses femelles.

- Par Étienne Menu

LE POP- CORN est un snack sympathiqu­e et régressif, qui peut éventuelle­ment vous faire bien voir d’une fille à laquelle vous en tendrez une boîte dans l’obscurité d’une salle de cinéma. Mais il va sans dire que les seuls effluves de ces grains de maïs soufflés ne suffiront pas à faire tomber votre crush sous votre charme. Quel dommage, tout de même, lorsqu’on sait que sous des latitudes plus clémentes que les nôtres, il existe un singulier rongeur arboricole dont on dit les femelles vivement émoustillé­es – et nous resterons pudiques – par l’odeur de cette fameuse recette américaine.

LÀ OÙ I L VIT, EN ASIE DU SUD et Asie du Sud- Est, le binturong se croise surtout de nuit et au sommet des arbres. Difficile, donc, de l’étudier : les scientifiq­ues ignorent encore beaucoup de choses sur ses affaires quotidienn­es et, pour en savoir plus, doivent soit le capturer, soit l’observer grâce à des caméras infrarouge­s. Mais ils ont néanmoins relevé, en arpentant la jungle, un agréable parfum beurré, très proche de celui du popcorn. On a d’abord cru ce fumet sécrété par des glandes odorantes situées sous les testicules du mâle. Puis on a découvert qu’il émanait en fait de son urine, dont il arrose très classiquem­ent son territoire. Flottent ainsi sur les frondaison­s de la canopée des vapeurs évoquant les salles obscures, La Boum et les goûters d’anniversai­re. On a longtemps cru et raconté que l’air ainsi imprégné possédait des vertus aphrodisia­ques sur les femelles, qu’il les avertissai­t du début de la saison des amours et les mettait en rut. Hélas, certains éthologues ont jugé bon de casser l’ambiance en affirmant, après d’interminab­les recherches, que rien ne corroborai­t cette hypothèse – et en éthologie, on ne peut pas imprimer la légende comme dans le monde de la presse. Mais il n’empêche que l’animal réussit à produire lui- même une exhalaison semblable à celle du maïs cuit, donc chaud, alors que sa températur­e corporelle attestée est bien trop faible pour faire griller quoi que ce soit. Un mystère reste à éclaircir. Peut- être qu’en sentant monter en eux l’excitation du contact physique, les binturongs se façonnent comme une sorte de petite chaudière interne et fantasmati­que, qui ferait pour ainsi dire rissoler quelques bactéries et générerait cette odeur inimitable ? C’est l’hiver : allez donc essayer de faire pareil, au lieu de vous précipiter au coin du feu ou près d’un radiateur.

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