HARRI, UN AMI QUI LEUR VEUT DU BIEN
Têtière « C’est compliqué pour moi de photographier des filles aujourd’hui ; elles ont toutes des tatouages et des pubis épilés en forme de coeur », disait Harri Peccinotti il y a dix ans. Car ce qui anime profondément le photographe phare des années 1970
ncore aujourd’hui, on peut le voir attablé, un café à la main, dans les locaux de journaux féminins où il discute avec les rédactrices de mode d’une prochaine collaboration. Oui, Harri Peccinotti, grand directeur artistique et photographe, reconnaissable à sa longue barbe blanche, continue d’apporter, à 82 ans, son regard affûté aux magazines et campagnes de pub. C’est en 1965 qu’il réalise ses premiers nus pour la revue anglaise Nova – « le nouveau type de magazine pour un nouveau type de femme » –, dont il assure la direction artistique. Contrairement à Lui, qui fut créé en 1963 en France en proposant de la photo de charme dans sa plus pure tradition, Nova s’adresse à une femme émancipée, intellectuelle, maîtresse de ses choix. Une femme libre qui aime la vie, qui aime faire l’amour et qui ne voit pas d’un mauvais oeil toutes ces f illes nues qu’harri photographie parfois de très très près. « Eh bien, toutes les femmes qui travail laient au magazine étaient
féministes, mais pas antisexe » , explique- t- il lors d’une interview à Vice. Un vent de folie décomplexée, échevelée et colorée souff lait au fil des pages ; ce qui primait, c’était la fraîcheur, l’humour et la volupté. La sensualité joyeuse qui se dégage de ces images, loin de toute représentation stéréotypée du corps de la femme, trouve son point d’orgue dans les calendriers Pirelli de 1968 et 1969. La femme exulte, le téton pointe ( une première dans l’histoire du calendrier), les poils triomphent sans craindre la censure arbitraire des réseaux sociaux. Peccinotti montrent seins, ventres, sexes, bouches et grains de peau en tant que tels, sans arrière- pensée, dans un souci uniquement graphique. Son imaginaire puise sans relâche dans ses années d’apprentissage, lorsqu’il se destinait à être graphiste publicitaire. Son désir n’a jamais été de faire de la photographie érotique, mais de photographier des femmes nues. Tout simplement parce qu’harri, comme il le dit lui- même, les préfère sans vêtements ! Ses photographies sont une allégorie de cette période de grâce libératrice, où la pilule entrait dans les moeurs et où le sida ne menaçait encore personne. Une parenthèse enchantée.
À FLEUR DE PEAU Photo prise en Jamaïque en 1974, pour le magazine 19. FEMME À LUNETTES Farniente kenyan en 1975.