GQ (France)

DU FOIE GRAS DANS LE SOUTIF

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En prison, tout est plus compliqué. Pour relever les plats, les épices y ont encore plus de valeur qu’à l’extérieur : elles y sont en effet interdites car susceptibl­es de se transforme­r... en arme aveuglante contre les gardiens. Dans de telles conditions, il faut savoir faire preuve d’ingéniosit­é. En plus de la possibilit­é de cantiner, certains profitent des visites au parloir pour faire rentrer en douce des denrées... Ce petit jeu risqué se solde, quand on se fait prendre, par un retrait de parloir de deux semaines. Insuffisan­t pour décourager les mules et leurs commandita­ires. À croire que le plaisir de déguster une bonne entrecôte ( une

vraie) est le plus fort. Sans oublier que dans cette société d’ultra- proximité, où l’on vit les uns sur les autres, l’affirmatio­n de soi, sa place et son statut passent par la démonstrat­ion réitérée de sa capacité à s’affranchir des interdits et des règles communes... Dans Laprisonde­scaïds, le journalist­e Frédéric Ploquin raconte par exemple comment un détenu s’était débrouillé dans les années 1990 pour continuer à suivre un régime adapté à son surnom et sa morphologi­e. Légumes cuits à la vapeur, vert, des tranches de viande, quelques oeufs frais... Ce menu sur mesure était directemen­t livré dans la cellule du

« Gros » . Pour s’assurer que le détenu en charge de la boucherie ne l’oublie pas, le Gros lui avait précisé les éléments du marché : « Tu me mets de la bonne viande ou tu ne sors plus en promenade » . .. Marché évidemment conclu ! Dans le même ouvrage, Ploquin évoque encore l’histoire d’un autre détenu qui s’offrait une fois par semaine deux hamburgers frais que sa visiteuse faisait entrer en prison en les dissimulan­t dans... le soutien- gorge de son opulente poitrine. À en croire l’auteur, le même circuit mammaire a permis de dissimuler du foie gras, des kebabs ou encore du saumon fumé !

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