À VOS VACANCES ?
tous les filtres du monde n’y changeront rien. AGBOGBLOSHIE ( GHANA) : la banlieue de la ville d’accra est en effet connue comme la région la plus polluée du monde en raison des tonnes de déchets informatiques que les pays industrialisés y envoient afin qu’ils soient stockés dans d’immenses décharges sauvages. Même avec un verre de Spritz à la main, ça ne le fait pas. PRIPIAT ( UKRAINE) : désertée par sa population après l’accident de Tchernobyl, cette ville fantôme n’abrite plus que d’immenses bâtiments vides à l’architecture soviétique. À réserver aux adeptes du dark tourism et autres fans du jeu vidéo Stalker. Aujourd’hui, il n’y a rien de plus épuisant que de partir à l’autre bout du monde pour s’apercevoir que, finalement, le goût des saucisses est souvent le même à Valparaíso. D’où cette question lancinante : mais à quoi bon aller voir ailleurs ? Contraction de « to stay » ( rester) et « vacation » ( vacances), le staycation figure une nouvelle pratique qui permet de s’envoler vers une destination restée bien souvent inexplorée : chez soi. Apparu dans le sillage de la crise de 2007, cet exotisme d’appartement est d’abord le fruit d’une nécessité, puisqu’il découle dans 63 % des cas de ressources financières insuff isantes ( étude de l’union nationale des associations familiales). Au- delà d’une situation subie, il existe une véritable originalité à explorer en détail son environnement proche. Alors, plutôt que de vous lancer dans un banal remake du film Les Randonneurs en allant arpenter les GR 20 en Corse, pourquoi ne pas vous lancer à l’assaut du GR 2024, une boucle de 50 kilomètres qui fait le tour de Paris et réserve à l’aventurier intrépide une faune ( pigeons obèses, etc.) et une flore ( oui, ce brin d’herbe a yant sur vécu à des hectolitres d’urine) inattendues. Si vous êtes encore plus radical, vous pouvez rester sur votre canapé et lire Chez soi, une odyssée de l’espace domestique de Mona Face à l’explosion des applis type Google Trips et autres services Experience de Airbnb, conjuguée à un marché en baisse de valeur (- 2,2 selon GFK en 2016), on a vu ces dernières années les guides monter en gamme. L’air du temps touristique est désormais à la personnalisation de son séjour, à la recherche de lieux et d’expériences subtilement alternatifs à ceux de la masse – une relecture post- matérialiste, façon capital économique vs capital culturel, décrite par la sociologue Elizabeth Currid- Halkett dans son récent ouvrage Thesumofsmallthings, A Theory of the Aspirational Class. D’où des guides, tels que Les Carnets de Michelin ou la collection « Out of the Box » aux Arènes, qui se transforment en similis magazines de voyage et de lifestyle à la rencontre des personnalités locales ( par exemple, l’agricultrice bio qui fournit en navets le plus chic restaurant locavore du coin) et des lieux à forte valeur informationnelle ajoutée. Une façon également d’insuffler un peu de l’esprit pionnier au marketing hipster. Le problème, c’est qu’à l’heure où vous lirez ces lignes, vous ne serez déjà plus le premier à liker.