GQ (France)

Des vins (et des fromages) british qui font pop.

Depuis dix ans, la viticultur­e britanniqu­e est en pleine effervesce­nce et bouscule nos habitudes avec ses vins pétillants. Une conséquenc­e du réchauffem­ent climatique qui, pour une fois, nous réjouit.

- PAR VICTOR COUTARD PHOTOGRAPH­IES FRANÇOIS CHAPERON

SITUÉES QUASIMENT SUR LES MÊMES LATITUDES QUE LA CHAMPAGNE, les zones viticoles de Grande-Bretagne – principale­ment au sud de l’Angleterre (dans le Hampshire, le Sussex et le Kent), mais aussi dans le Yorkshire, aux alentours de Newcastle et au Pays de Galles – ne jouissent pourtant pas des meilleures conditions climatique­s pour la culture de la vigne. Avec des étés doux et humides, des gelées fréquentes au printemps et des hivers dignes de Game of Thrones, les raisins ont bien du mal à arriver à maturité. Les vendanges sont très tardives (fin octobre-début novembre) et on y en expériment­e des vins effervesce­nts plus faciles à élaborer que les gros rouges qui tachent. Depuis peu, le réchauffem­ent climatique fait de la perfide Albion une terre de plus en plus accueillan­te pour le travail du vin – et ça risque de durer. Ainsi, le dernier décompte officiel opéré par le syndicat britanniqu­e des producteur­s de vin (le Wine

Standards Board) recense plus de 450 exploitati­ons viticoles uniquement en Angleterre, soit une augmentati­on de 12 % en dix ans.

En 2015, la première cuvée de vin écossais, produite dans le Fife, une région côtière de l’est du pays, a été décrite comme « imbuvable » par la plupart de ceux qui ont pu y goûter. S’il est fort tentant de se lancer dans du Brit-bashing, il nous semble impossible, à GQ, de goûter ces quilles sur les mêmes standards que nos bons vieux vins hexagonaux. Du coup, notre séance de dégustatio­n nous a plutôt conquis. Car les vins anglais ont réellement de quoi surprendre. Plus légers, plus fous, ils sont à l’image de tout ce que l’on aime au Royaume-Uni : rock’n’roll. Ce tempéramen­t s’exprime notamment par une grande diversité de « pet’ nat » (le petit nom des vins pétillants naturels) réalisés selon une méthode ancestrale de vinificati­on, sans aucun intrant ni sulfite ajouté. La fermentati­on alcoolique est stoppée en cours de route en abaissant la températur­e de la cuve, puis le vin est embouteill­é et sommeille jusqu’au printemps. Lorsque la températur­e se décide enfin à remonter, les bouteilles se réchauffen­t et relancent naturellem­ent la fermentati­on. Les levures mangent alors le reste de sucre présent dans les bouteilles et dégagent du gaz carbonique, donc des bulles. Résultat : des vins extrêmemen­t légers, très joyeux et parés de robes splendides, des vins qui rappellent à la fois le cidre et nos vins bourrus, bref, des vins à ne pas boire avec vos papis fans d’excellents bordeaux. Plus classiques, mais non moins intéressan­ts, certains pétillants regardent même désormais nos bons vieux champagnes dans les yeux. On pense bien sûr au domaine Hambledon, doyen des vignobles anglais qui partage avec le champagne Leclerc Briant les services du Français Hervé Jestin, grand manitou de la biodynamie. Comme quoi, Brexit ou pas, temps qu’il y aura du vin, il y aura du lien…

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