ODE À LA JOAN
C« COMME J’AI UN HOME-STUDIO, je passe déjà le plus clair de mon temps chez moi, donc j’avoue que ce confinement ne change pas grand-chose à mon quotidien », rigole Joan Wasser depuis son appartement de Brooklyn, où nous lui parlons via WhatsApp. « La seule chose qui va me manquer, c’est la tournée que je devais commencer le mois prochain, mais qu’on a dû annuler ! » À bientôt 50 ans, l’Américaine, plus connue sous le nom de Joan As A Police Woman (Police Woman étant le nom d’une série policière des années 1970 avec Angie Dickinson), publie Cover Two, qui, comme son titre l’indique, est le deuxième volume d’une collection de reprises – covers en anglais –, sorti onze ans après le premier. On y entend ses versions toutes personnelles de morceaux plus ou moins fameux : « Kiss » de Prince, « Out of Time » de Blur, ou des titres d’Outkast, des Strokes ou de Gil Scott-Heron. Un tracklisting qui reflète bien le mélange d’influences noires et blanches qui fait la singularité de Joan depuis ses débuts. « J’ai surtout choisi des chansons que j’aimais profondément, en me demandant comment me les réapproprier, en insistant sur un détail de l’original ou en refaisant carrément tous les arrangements, parfois au point de les rendre méconnaissables. »
Car la chanteuse est au départ une interprète : violoniste de formation, elle a longtemps joué pour les autres (Antony & the Johnsons, Lou Reed, Elton John pour citer les plus célèbres) avant de se lancer dans une carrière solo alors qu’elle avait déjà la trentaine bien sonnée. « Je ne regrette pas du tout d’avoir commencé tard à signer mes propres chansons. Je crois même que ça me permet d’être plus juste dans ce que j’écris : j’ai forcément plus d’expérience qu’un artiste de vingt ans qui pense avoir déjà tout compris à la vie ! » Adepte de costumes et des mises en scènes sophistiquées dans ses clips, Wasser construit depuis bientôt quinze ans une oeuvre qui ne ressemble à aucune autre, tout en restant très accessible. Sûrement parce qu’elle combine un talent évident pour le songwriting classique à une vision extrêmement moderne de la pop. Femme mûre en pleine possession de ses moyens, elle revendique son indépendance. « La technologie a tout changé pour les artistes féminines. Avoir un home-studio, ça nous évite de nous retrouver dans de vrais studios où l’on ne travaille qu’avec des hommes ! » On espère sa tournée européenne reportée à la rentrée. Sinon on appelle la police, direct.
Amatrice de reprises, la chanteuse Joan As A Police Woman sort un album où elle revisite classiques pop et morceaux plus méconnus.
(PIAS), SORTIE LE 30 AVRIL.