À CASABLANCA, TOUS LES IMMEUBLES ÉTAIENT ÉQUIPÉS D’ASCEN- SEUR, LES APPARTEMENTS AVAIENT TOUS UNE DE SALLE DE BAIN
Le Doge, hôtel particulier construit dans les années trente, est récemment devenu un hôtel de la chaîne Relais et Châteaux. Les 16 chambres sont
dédiées à des artistes des années trente. Ici la chambre Scott Fitzgerald, le père de GatsbyLeMagnifique. Quelques églises subsistent de la période coloniale ; si la cathédrale du Sacré-Coeur construite par Paul Tournon (1930) a été désacralisée, il est toujours possible d’assister à une messe Arts déco dans la très épurée église Notre Dame de Lourdes éclairée par 850m2 de vitraux aux couleurs vives réalisés en dalle de verre par Gabriel Loire. À l’Est, les quartiers Alsace-Lorraine, Mers Sultan et Gironde. Au Sud et à l’Ouest Gauthier, Palmiers, Maarif et Racine… Des noms d’époque conservés et partout des innovations mises au service duconfort, où les immeubles conçus par les architectes français dépassent souvent en équipement ceux de Paris à la même époque. « Nousvivionsen Amérique,quandonallaitenFrancec’étaitlacampagne » se souvient l’architecte Philippe Michel qui a grandi à Casablanca. « Lesimmeubles,deluxe commelespluscourants,étaienttouséquipésd’ascenseurs,lesappartementsavaienttousunesalle debain. » En 1950 le premier gratte-ciel du continent africain, l’immeuble Liberté de Léonard Morandi haut de 78 mètres, sort de terre.
qui borde l’océan Atlantique au pied de la colline d’Anfa qu’affectionne la très haute bourgeoisie casablancaise, les piscines s’alignent jusqu’aux plages de Aïn Diab et l’ultra-moderne temple de la consommation du Morocco Mall. Philippe Michel se souvient de son enfance : « Chaquecommunauté,chaquecatégoriesocialefréquentaientsapiscine.Lapluspopulaire, fréquentéeessentiellementparlesMarocains, c’étaitlapiscinemunicipale. » La piscine municipale considérée comme la plus grande du monde avec ses 480 m de long a été choisie en 1986 pour y poser la future mosquée Hassan II. Inauguré en 1993, ce pharaonique monument de béton couvert de zelliges et imaginé par Michel Pinseau, s’enorgueillit d’avoir le plus haut minaret du monde (201m) et de pouvoir accueillir jusqu’à 120 000 fidèles ! Casablanca toujours tournée vers l’avenir se prend aujourd’hui des envies de Dubaï. En prolongement de la Mosquée Hassan II et face à l’ancienne Médina, le projet Casablanca Marina prend forme : port de plaisance, centre commercial, palais des congrès… Livraison prévue en 2015. Si Casablanca n’a pas la touche orientaliste d’un Tanger ou l’exotisme de Marrakech, le flou de sa légende reste entier. Loin de toute muséification, son patrimoine exceptionnel est toujours ancré dans le quotidien des habitants. Jean-Louis Cohen, historien de l’architecture, qualifie Casablanca de « Ville-monde,façonnéeparl’idéalaméricain,qu’il s’agissedeceluidelavilleverticaleincarnéepar New York, ou celui de la ville-paysage diffuse incarnéeparLosAngeles.Inversement,lemonde ascrutédèslesannées1920l’essorspectaculaire deCasablancaquiadonnél’imaged’unchamp d’exercice pour la formation des langages de la modernitéarchitecturale. »
Tout au long de la Corniche