Grands Reportages

Maroc

LE RENOUVEAU DE CASABLANCA

- TEXTE ET PHOTOS BRUNO MORANDI

Arts déco, art nouveau, Bauhaus, fonctionna­lisme, néomauresq­ue… Au début du XIXe siècle, « Casa » a rivalisé de créativité architectu­rale qui, aujourd’hui, ne se dément pas.

Casablanca, la Ville Blanche en espagnol, bâtie par des Français en territoire marocain et rendue mythique par le cinéma hollywoodi­en des années quarante, a été le théâtre de la modernité architectu­rale du XXe siècle. Pendant plus de 50 ans, la ville s’est imposée comme un bouillonna­nt laboratoir­e d’urbanisme et d’architectu­re. Quatrième plus grande ville d’Afrique, avec pour symbole la démesure de la mosquée Hassan II flottant sur l’océan, Casablanca incarne le Maroc moderne d’hier et préfigure celui de demain. Si de nombreux chefs-d’oeuvre ont été détruits, des architecte­s et des habitants se mobilisent aujourd’hui pour protéger et sauver ses bâtiments. En vue, le classement au Patrimoine Mondial de l’Unesco.

« De tous les troquets de toutes les villes du monde, c’estdans le mien qu’elle a choisi d’entrer. » Rick Blaine (Humphrey Bogart), combattant anti-franquiste en Espagne et ancien trafiquant d’arme, reconnaît Ilsa Lund (Ingrid Bergman) qu’il a aimée dans le passé à Paris. Si les acteurs de Casablanca, le film culte de 1942 de Michael Curtiz, n’ont jamais mis les pieds au Maroc, depuis 2004 l’Américaine Kathy Kriger a rendu la légende réelle en recréant dans les moindres détails le Rick’s Café adossé à l’ancienne médina de Casablanca. Tout est là, le piano angoissé de Sam, un Pleyel 1930, les arcades et les balcons dominant la salle, des éclairages projetant des ombres hitchcocki­ennes sur les verres de whisky sec alignés sur le bar… L’incontourn­able Rick’s Café est situé sur l’une des entrées de l’ancienne Médina, coeur historique d’Anfa, l’ancien nom de Casablanca. Anfa, la colline en langue amazigh, celle des Berbères, était un repaire de corsaires que les Portugais mirent à sac en 1468. L’explorateu­r Léon l’Africain rapporte au XVIe siècle dans son ouvrage Descriptio­n d’Afrique :« Lavilled’ Anfabâtiep­arles Romains surlerivag­edelamerét­aitembelli­edemosquée­s somptueuse­s,derichesma­gasins,debonnesbo­utiques,de superbes palais; Les citoyens d’Anfa s’habillaien­t fort propre mentet trafi quaientave­c les Anglais, mais leurs pirateries ont causé leur perte. Aujourd’hui ne reste que des masures, depuislete­mpsquelesP­ortugaisl’ontsaccagé­e. » Au XVIIIe siècle, le Sultan Sidi Mohammed Ben Abdellah (Mohammed III) décide de reconstrui­re la place forte d’Anfa pour parfaire son dispositif défensif sur la côte Atlantique entre Rabat et El Jadida. Il nomme la ville Dar El Baïda, Maison Blanche en arabe qui deviendra Casa Blanca en espagnol. Pour se développer, Casa comme la surnomment ses habitants, a surtout besoin d’un port et son aménagemen­t commence en 1907. À cette époque, la vie se concentre toujours dans la Médina, investie depuis le XIXe siècle par une importante communauté cosmopolit­e de 46 000 habitants : 35 000 Marocains, 9 000 Juifs, 7 000 Français, 2 500 Espagnols et 2 200 Italiens.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France