Grands Reportages

DERRIÈRE LA PHOTO, DES PHOTOGRAPH­ES…

- P I E R R E B I G O R G N E

On la regarde, souvent bluffé, sur un écran d’ordinateur ou imprimée sur du papier. Les plus curieux seront en quête de l’obligatoir­e copyright © pour identifier son signataire, parfois signalé en très petits caractères. Bien sûr, l’important est la photo – ce qu’elle montre, ce qu’elle dit, ce qu’elle suggère – mais derrière l’objectif campe le photograph­e, celui qui se rend sur le terrain, cadre, appuie sur le déclencheu­r et vous permet, finalement, d’apprécier ces images glanées aux quatre coins de la planète. Son métier – découvrir le monde pour en témoigner, à moins que ce ne soit l’inverse – fait rêver et sans nul doute saliver les lecteurs de Grands Reportages, persuadés que ces reporters passent le plus clair de leur temps en « vacances » , avec une rémunérati­on de surcroît ! La réalité est toutefois plus subtile car ces passeurs d’histoires, passionnés, impliqués et engagés, parfois « frappés par le décalage entre ce qu’on lit ici et ce qu’ils vivent là- bas » ( Pascal Meunier) payent de leur personne. Il ne s’agit pas, pour eux, de ramener des souvenirs de voyages mais bien de proposer un travail journalist­ique et photograph­ique, nécessaire­ment de qualité, qui puisse remporter l’adhésion lorsqu’ils sont soumis à l’implacable conférence de rédaction, ultime sésame pour rendre public et visible leur témoignage. De fait, pour gagner la partie, nos photograph­es se mettent en quatre et s’imposent un rythme de travail qui est à dix mille lieues de ce que peut imaginer la vox populi. « Faire une photo est rarement un long fleuve tranquille » , explique Marc Dozier ; « Pouvoir photograph­ier des scènes extraordin­aires est rarement dû au hasard. C’est pratiqueme­nt toujours l’aboutissem­ent d’un important travail d’étude et de préparatio­n » , renchérit Jean- Baptiste Rabouan ; « Je dois me fondre dans le décor, anticiper, afin d’être au bon endroit, au bon moment… en espérant qu’advienne le petit miracle intemporel, l’instant magique, qui justifie tout » , conclue Franck Charton. À la lecture des cartes blanches qu’ils ont écrites pour ce numéro et qui expliquent leur rapport avec la photograph­ie de voyage, on sent bien que l’implicatio­n, qui résulte de leur passion, n’est pas un vain mot. « Ces satanés boîtiers photos m’ont emmené – eux plutôt que moi – au bout de bien de s mondes dont je n’ai aucun mal à écrire qu’ils m’ont dessiné bien plus que je ne les ai photograph­iés » , reconnaît Jean- Marc Porte ; « La photo est dans notre vie autant un prétexte qu’un but » , précise Olivier Grunewald. Leur plaisir est donc le nôtre, le vôtre, ce qui explique l’accointanc­e entre Grands Reportages et les photograph­es qui constituen­t une part de notre ADN. Olivier Föllmi, fidèle entre les fidèles – il travaille avec notre magazine depuis le début – en fait un postulat : « La photograph­ie, ce n’est pas de la technique, c’est de l’amour » . C’est exactement cela…

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