FACE AU DÉVELOPPEMENT DE SES COUSINES ASIATIQUES, YANGON NE DEMANDE QU’UNE CHOSE : RATTRAPER SON RETARD
de perdre son âme dans ce développement programmé ? Voire. Nombreux sont ceux à craindre que la modernisation ne saccage son charme historique. « Je me réjouis du vent de liberté que connaît notre ville mais je souhaite que Yangon préserve son identité et son atmosphère coloniale romantique : les petites échoppes et les vendeurs de rue en longyi, le parc Kandawgyi, le lac Inya et la magie de Shwedagon » , espère Su Sandar Hlaing, une guide touristique attachée à sa ville. Perchée sur la colline Singuttara qui surplombe le centre- ville, la pagode de Shwedagon, est restée le coeur bouddhiste, spirituel et affectif de la cité. Rien ne semble ébranler « l’Or de Dagon » . Du lever au coucher du soleil, les fidèles – par dizaine de milliers chaque année – viennent toujours ici avec ferveur. Ville de pèlerinage depuis des siècles, la cité s’est en effet développée autour de la plus sacrée des pagodes, la Paya Shwedagon, sanctuaire qui fut, est, et sera probablement encore longtemps le plus important centre bouddhiste du pays.
Si les bâtiments modernes poussent déjà comme des champignons,
Yangon compte toujours le plus grand nombre d’édifices coloniaux de toutes les grandes villes d’Asie du Sud- Est. Tout au long de la fameuse rue Pansodan, les Britanniques ont légué un florilège de bâtiments victoriens qui donnent à la cité un air de décor de film. Mais pour combien de temps encore ? « Aujourd’hui, les vieux quartiers coloniaux sont rachetés par des investisseurs étrangers » observe Robert Dompnier, grand connaisseur du pays et co- fondateur de l’agence de voyages française Tirawa. « Les bâtiments de moindre importance sont détruits pour être rem- placés par des buildings modernes et les édifices plus monumentaux sont transformés en centres commerciaux ou en bureaux comme l’ancienne gare. » Bien qu’elle vive de profonds bouleversements, Yangon bénéficie toujours de la tendresse et de l’affection de tout le pays. À défaut d’être encore la capitale officielle, elle joue toujours un rôle de premier ordre dans l’avenir de la Birmanie. Il y a fort à parier qu’elle tiendra encore longtemps une place centrale dans la politique nationale. Aujourd’hui, elle reste – au moins – sa capitale de coeur. « Après des années de paralysie, la métamorphose de Yangon est une renaissance » , considère Hla Myint Maung, un peintre contemporain très connu en Birmanie avant de conclure avec un clin d’oeil très bouddhiste. « C’est une véritable réincarnation. »