Grimper

Abella de la Conca, une belle rencontre

- Turrón Tandtroll king, FestaMajor, Ladel

Caroline Ciavaldini et James Pearson nous donnent rendez-vous, à Francisco et moi-même, à Abella de la Conca. Nous partons de Barcelone et, en route, nous faisons une petite pause à Agramunt, capitale catalane du (nougat), puis dans l’une des rares stations essence que nous trouvons. C’est sec, désert, une station essence au milieu de rien ; un pompiste nous sert. Vieux, grand, maigre. Il ne doit pas gagner énormément en étant placé sur cette route, en pleine Catalogne… On file jusqu’à Isona, une petite ville de mille cent habitants, puis quelques virages après nous sommes à Abella de la Conca. L’excitation est là, mais arrive aussi une petite bouffée d’anxiété. Le village a l’air abandonné hormis deux ou trois fumées de cheminées… Niveau flotte de véhicules, c’est la même donne : trois vans dans un état tel que nous nous demandons si ce sont des épaves ou non. Nous entrons dans le village, avançons un peu jusqu’à un cul-de-sac. Malgré les nombreuses falaises qui nous entourent et qui font plaisir à voir, cela sent le plan foireux : Caroline et James sont injoignabl­es et nous ne trouvons pas le point de rendez-vous qu’ils nous ont donné (c’est-à-dire : une maison sur une place). Deux heures après nous comprenons. La place est plus une portion de route large qu’une véritable place, la maison un bâtiment qui tombe en ruine. Mais une fois à l’intérieur, oh surprise, il y a déjà une cuisine fonctionne­lle et une grande table dans la salle à manger. Nous avions les prémisses de l’endroit, et maintenant en 2014, nous sommes ébahis du résultat. Nicolas, un Français, et sa femme Eleanor, anglaise, ont retapé avec goût l’endroit pour en faire un refuge. Ils en ont aussi profité pour créer une associatio­n, Abella Climb, qui a pour but de développer une gestion écologique du village (chantiers participat­ifs d’agricultur­e bio, développem­ent durable de sports de pleinair…). C’est donc dans cet esprit que la rénovation a été effectuée, avec par exemple l’ajout d’un sauna chauffé au bois provenant de la taille des oliviers et des amandiers gérée par l’associatio­n. À l’instar de la maison qui a connu une seconde (ou une troisième, une quatrième…) jeunesse, les secteurs d’Abella qui abritaient quelques voies depuis des années sont maintenant beaucoup plus fournis avec près de deux cent cinquante voies équipées, du 3 au 9a. En 2011, nous avions découvert avec plaisir cet endroit, joli et plus au calme que Siurana et consorts. Maintenant nous revenons avec plaisir. Une autre saison, une autre vue sur ce village, d’autres amis, mais toujours cette ambiance calme, sereine. Enfin, peut-être que les mots « calme » et « sereine » ne sont pas les plus adaptés lorsque Klemen Becan (un grimpeur Slovène), Kevin Aglaé et Enzo Oddo sont dans les parages ! Klemen, arrivé quelques jours avant nous, est en mode machine. Enchaîner une dizaine de projets existants dans le 7 et le 8 (dont Somni Sauna, le premier 8c d’Abella, sur un mur déversant de 35 mètres, bariolé de micro-colos rouges, blanches et ocre) ne lui suffit pas. Il équipe alors une dizaine d’autres voies dont trois de 50 mètres (de 8a+ à 8c+). Les autres grimpeurs préfèrent commencer doucement au secteur du Canyon. Caroline réalise Sant Jordi, un 7b+ bien teigneux toujours à l’ombre et dans le vent, assurée par un James en doudoune en plein mois de Juin ! Kevin et Enzo préfèrent les colos neuves de Mala Maja, un 7c+ qui d’entrée de jeu les expose au style technique d’Abella. Le lendemain après vingt minutes d’approche, tout le monde découvre le joyau d’Abella : el Forat dels lladres, deux arches successive­s et une grosse grotte qui ont abrité les jeunes du village los de la guerre civile espagnole. Il faut dire que le secteur est difficile d’accès, empruntant une via ferrata de 35 mètres bien aérienne, et l’on peut comprendre que les troupes de Franco n’ont jamais tenté de les déloger. Les voies ici sont bien déversante­s, des toits, des trous, des colos et des réglettes, tout en restant techniques, la marque de l’escalade à Abella. Kevin enchaîne à la chauffe

8a (en suédois, « la dent du troll », nommée après que l’équipeur suédois s’est cassé une dent lors de l’équipement de la voie, à cause d’un coinceur récalcitra­nt qui l’a frappé violemment au visage) puis réalise la première ascension de 8b+. Enzo Oddo fait quant à lui la première de Naughty elephant party, 8c. La fatigue se fait sentir…

9 (?), et les projets en 8c/+ de la première arche ne tombent pas… Ces machines à grimper sont finalement humaines ! Après ces jours bien sympathiqu­es, il est temps de danser et de boire un coup ! C’est la fête de Caranima, la « mini grande fête du village », une sorte de répétition avant la grosse fête du village en octobre. Trois jours de soirée DJ, dîners et bal musette… L’ambiance

Les voies ici sont bien déversante­s, des toits, des trous, des colos et des réglettes, tout en restant techniques, la marque de l’escalade à Abella.

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Légende
 ??  ?? Ci-contre, toujours Klemen mais cette fois dans le long 8a+ (60 m) de En bas, Caroline Ciavaldini prof ite des derniers rayons du soleil dans le 7c+
au secteur Costera qui se situe à deux minutes à pied du refuge.
Ci-contre, toujours Klemen mais cette fois dans le long 8a+ (60 m) de En bas, Caroline Ciavaldini prof ite des derniers rayons du soleil dans le 7c+ au secteur Costera qui se situe à deux minutes à pied du refuge.

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