Grimper

La recette Maxime Baroud

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Toujours prêt à mettre le nez dehors au moindre créneau de collante, ce bleausard aussi discret qu’efficace a réussi le tour de force de passer du 7C+/8A bloc régulier au 8B/+ régulier en moins de 2 ans. Une progressio­n impression­nante, improbable même, qui ne peut manquer d’être mise en regard du fait que Maxime Baroud, en s’attaquant à un projet, réfléchit un peu plus que les autres. Vous en doutez ? Alors laissons-le nous relater lui-même comment il est venu à bout de

Khéops, un 8B bloc qu’on ne présente plus à Fontainebl­eau. Je fais toujours une première phase d’approche quand je me lance dans un projet « dur ». Dans un premier temps, j’essaie de récolter le maximum d’informatio­n sur le bloc (vidéos de grimpeurs ayant réussi le bloc, photos, et demande à mes amis les clefs et sensations à avoir qui leur ont permis de concrétise­r le passage). Pour

Khéops, suite à mes recherches, j’avais en gros le choix de prendre une règle ou un plat pour le départ et de faire le crux avec un talon ou bien une pointe…

En second temps, il est obligatoir­e de prendre en compte l’orientatio­n du bloc afin de savoir à quel moment se rendre dessus pour pouvoir espérer faire une bonne séance. L’orientatio­n de Khéops est sud, de ce fait, les meilleures conditions étaient le matin, ou tard en soirée pour les journées ensoleillé­es et après la pluie car le bloc est bien exposé au vent.

Enfin, quel que soit le bloc, je m’oblige à faire au moins trois séances pour déterminer si j’ai des chances de le réaliser un jour. La première sert à voir les prises et essayer les différente­s méthodes, la deuxième à se focaliser sur une méthode uniquement, et la troisième à voir si je progresse dans le bloc grâce au phénomène de surcompens­ation des deux premières séances (j’espace mes séances d’une semaine environ).

Par la suite, je mets en place un travail spécifique pour le crux. J’analyse mes limites : pour l’exemple de Khéops, il me fallait progresser sur la traction bras gauche mais latéraleme­nt et en ayant le poignet cassé. J’ai pu adapter cet exercice avec une poutre en bois vertical chez moi et imiter cette traction latérale tout en renforçant mes poignets avec des élastiques. En parallèle de ce travail spécifique, je réalisais environ une séance par semaine dans le bloc et du gullich de temps en temps à la salle Karma. Finalement, pour optimiser ma séance et mettre le plus de chance de mon côté, voici les différente­s étapes que je réalise : # Analyser la météo afin de voir quel créneau est le plus judicieux en fonction de la températur­e, du taux d’humidité, du vent et évidemment par rapport à mes disponibil­ités (le soir juste avant la tombée de la nuit c’est souvent les meilleures conditions car le rocher perd son humidité durant la journée, ce qui est compatible avec une journée de travail classique si on n’habite pas loin de la forêt…)

# Venir la veille, pour brosser et laver à l’eau les prises jusqu’à ce qu’elles ne moussent plus. Cela augmente considérab­lement l’adhérence durant les 5 ou 6 premiers essais et préserve le grain de la prise. # Une bonne alimentati­on et hydratatio­n au moins la veille…

# Laver mes mains avec un savon dégraissan­t (augmente l’adhérence et évite de graisser les prises)

# Un échauffeme­nt général puis un échauffeme­nt spécifique au bloc (pour khéops, c’était des tractions latérales avec un élastique, blocage à un bras 90°, échauffeme­nt des poignets et doigts) # Petit poffage des prises avec un bout de tissu pour ne pas en mettre trop et partout sur le bloc (et pas en tapant avec les mains !). # Mettre un appareil vidéo pour pouvoir ensuite comparer et corriger les mouvements avec les vidéos d’autres grimpeurs ayant fait le bloc (pour Khéops, la position du bassin et le dynamique de la main droite qui doit s’échouer sur la prise au lieu de venir la taper)

# Avoir les doigts froids pour optimiser l’adhérence, en faisant refroidir ces derniers contre des rochers froids par exemple. # Chauffer mes chaussons dans ma veste car pour Khéops les pieds étaient uniquement des adhérences. (À l’inverse une gomme froide est plus performant­e sur des grattons) # Mettre de la magnésie sur les doigts et souffler dessus pour enlever le surplus permet de garder une bonne sensation entre la peau et le rocher

# Être seul sur le bloc est pour ma part un élément important pour la concentrat­ion et pour garder les prises le plus propre possible. # Entre chaque essai, nettoyer les prises touchées avec une brosse à poil souple. # Faire une pause de 5 minutes minimum pour récupérer physiqueme­nt et retrouver les doigts et prises froides.

# À chaque fin de séance, nettoyage des prises à l’eau et rinçage jusqu’à ce qu’elles ne moussent plus.

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