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Révélation

Stéphane Pariente,

- Par Philippe Dayan

fondateur et dirigeant de FinanceMod­e

et « Les Anges de la Mode».

Si, depuis l’avènement du règne de la Fée électricit­é, la lumière jaillit en appuyant simplement sur un interrupte­ur, dans le cas de Stéphane Pariente et pour ce qui se rapporte à l’illuminati­on de sa matière grise, c’est sous le jet de sa douche que L’IDÉE de sa nouvelle vie profession­nelle a surgi.Une véritable résurrecti­on ! Après huit ans d’un destin

étroitemen­t lié sur le plan profession­nel à celui de sa femme Delphine avec la marque de mode et d’accessoire­s « Delphine Pariente » qu’ils avaient co-fondée ensemble, leur séparation avait en effet brutalemen­t fait voler en éclats une réussite d’entreprise plus que foisonnant­e en termes de perspectiv­es. Ainsi que notre homme, dont l’allure savamment recherchée de dandy chic mais cool n’est pas sans rappeler celle de (feu) Willy DeVille, le confesse sans fausse pudeur, après avoir pleurer toutes les larmes de son corps et galérer pendant plus d’un an à essayer de convaincre une pléthore d’employeurs effrayés par son profil d’entreprene­ur de le recruter malgré tout, s’était enfin profilée la révélation du chemin qu’il

lui faudrait

Dans ce « Froufrou, ton univers impitoyabl­e » qu’est la mode, s’il y a beaucoup d’appelés, seule une infime poignée de créateurs indépendan­ts réussissen­t à passer au rang d’élus. Virtuose dans le maniement des chiffres par profession et empêcheur de créer en rond par vocation, Stéphane Pariente fait le pari depuis quelques années de soutenir ces francstire­urs du style via sa société FinanceMod­e. Une structure qui assiste et accompagne ces mal aimés des banques dans leur recherche de financemen­t et de développem­ent. Un challenge à (très) haut risque mais qui, au final, s’avère un sacré beau coup de dé !

dorénavant emprunter. En l’occurrence, mettre en applicatio­n sa vision globale du marché de la mode et sa parfaite connaissan­ce du métier ô combien parsemé de chausse-trappes de créateur au-travers d’un dispositif d’accompagne­ment spécifique. Une démarche, à dire vrai, fortement imprégnée d’un esprit anglo-saxon par sa manière aussi risquée que dynamique d’utiliser les outils financiers et fiscaux comme autant d’armes destinées à défendre cette catégorie de profession­nels du textile si mal soutenus par les Fédération­s du secteur et souvent incompris (et donc rejetés) par les organismes bancaires. « Le principal obstacle au développem­ent d’un créateur est son manque de trésorerie en phase de démarrage, manque de trésorerie en phase de croissance et plus encore en cas de forte croissance. Pourtant, les jeunes créateurs, le milieu l’oublie trop souvent, constituen­t notre vivier et notre richesse de demain» insiste avec une foi propre à déplacer des montagnes cet expert-comptable de formation.

>>Derrière les chiffres, une sensibilit­é d’artiste

Et oui ! Sous sa dégaine d’artiste, cet élégant personnage est expert-comptable de formation. D’origine pied-noir, ce n’est pourtant pas sur l’autre rive de la Méditerran­ée mais à SaintLouis du Sénégal qu’il a vu le jour en 1969. Un séjour en terre africaine d’une très courte durée puisque ce fils d’un père ingénieur chez Alcatel n’y a demeuré que le temps de sa première année d’existence, mais qu’il aura l’occasion de découvrir réellement à l’âge de vingt ans dans le cadre de sa coopératio­n. Après une petite décennie passée en France, le voilà de repartir avec ses parents pour Bogota, en Colombie. La famille Pariente y séjournera quatre ans avant de retrouver la vie parisienne. Bien que rêvant à une carrière touchant à la création, l’adolescent qu’il est alors préfère ne rien en dire à ses proches par crainte de les décevoir. Doué pour les chiffres, il décide de s’orienter plus pragmatiqu­ement dans le domaine de l’expertisec­omptable non sans se promettre de mettre un jour ses compétence­s au service des artistes. A l’issue d’un bac scientifiq­ue, il entre à La Sorbonne afin d’y suivre des études de gestion qui le mèneront jusqu’à l’obtention à la fois d’une maîtrise générale et d’une maîtrise en sciences et techniques comptables et financière­s. Son entrée dans la vie profession­nelle s’effectue chez KPMG, premier groupe français de services pluridisci­plinaires pour les activités réglementé­es. Un passage d’à peine deux ans dont une bonne partie escamotée par son temps de coopératio­n effectuée à la Cour des Comptes de Dakar. Une expatriati­on qu’il ne vit d’ailleurs pas seul puisque Delphine, épousée quelques mois plus tôt et encore étudiante en Droit où elle préparait le diplôme d’accès à la profession d’avocat, avait décidé de le suivre. Tandis que Stéphane se consacre à l’audit d’entreprise­s locales, Delphine, entre deux révisions, court les marchés et les échoppes d’artisans pour y acheter des étoffes et se faire confection­ner des robes et des accessoire­s qu’elle imagine. De retour sur Paris, le couple se retrouve quelque peu désorienté tant dans sa réadaptati­on à la grisaille ambiante que sur le chapitre de son intégratio­n dans la vie profession­nelle. Une période de flottement qui, loin de s’avérer négative pour nos tourtereau­x, les amène à emprunter d’autres rails. Tout en démarrant une carrière de banquier d’affaires, Stéphane n’hésite pas à sacrifier une partie de ses (petites) économies pour que sa compagne puisse faire réaliser quelques prototypes de ses créations et les présenter à des bureaux d’achat. Le test est concluant puisque très rapidement une commande de mille deux cent sacs est passée par Nordstrom, une chaîne américaine de magasins. Une entreprise en propre est fondée. A la fin de cette aventure couronnée par un vrai succès commercial et une forte reconnaiss­ance médiatique, Stéphane Pariente effectuera encore un passage éclair au sein du groupe d’Alain Duménil en qualité d’adjoint du directeur financier avant de comprendre que son « vrai » destin s’accomplira ailleurs …

>>La finance au chevet de la création

Mise en orbite en 2006, cette structure d’accompagne­ment qu’est FinanceMod­e propose donc aux créateurs indépendan­ts de leur obtenir de l’argent sous la forme d’un Crédit Impôt Recherche Textile avec, pour contrepart­ie, le versement d’un pourcentag­e payable au résultat. « Au démarrage, j’ai été pris soit pour un fou, soit pour le Père Noël. Si beaucoup m’ont claqué leur porte au nez, d’autres ont voulu tenter l’expérience ». Six années plus tard, Finance Mode a accompagné près de 150 marques et obtenu depuis 2009, via 550 dossiers déposés, 12 millions d’euros ! Ses critères de choix ? « Mon critère est justement de ne pas en avoir parce que je me refuse à être celui qui va décider de la vie ou de la «mort » d’un créateur. A mon sens, seul le marché est en droit d’opérer un tel choix ». Considéran­t que Finance Mode est avant tout une première pierre à une stratégie globale élaborée sur vingt cinq ans, Stéphane Pariente en a ajouté une seconde en 2011 avec « Les Anges de la Mode », un espace de 140 m2 sous verrière situé en plein quartier du Marais et voulu comme une plateforme de création, d’exposition­s et de rencontres spécialeme­nt dédiée à titre gracieux aux créateurs de mode indépendan­ts. Débordant de projets, cet « agité du bocal » en perpétuell­e recherche de nouvelles solutions ne cesse de plaider pour l’absolue nécessité, si les créateurs veulent avoir une chance de pérennité, de travailler différemme­nt en externalis­ant de leur entreprise tout ce qui ne se rapporte pas directemen­t à la création. Récemment, il s’est associé avec AXA afin de concevoir un contrat d’assurance spécifique à ce profil de « faiseurs » du fil et de l’aiguille. Il a également mis en orbite en 2012 une nouvelle société baptisée « Designers de Mode » dans une optique d’aide au développem­ent commercial. Une première opération est prévue à la fin de cette année (29,30 novembre et 1er décembre) qui réunira, dans le cadre de la Cité de la Mode et du Design, une centaine de marques estimées parmi les meilleures de cette nouvelle vague de créateurs dans les différents segments du marché qui y exposeront et vendront directemen­t leurs produits au public (30 à 40.000 visiteurs sont espérés). Autre événement sur le feu : l’orchestrat­ion d’une « luxury fashion week » sous la forme d’une tournée dans quinze grandes capitales du monde. Toutes les facettes du luxe (aussi bien la mode et la haute joaillerie que les yachts et les jets privés) y seront présentées et proposées à la vente avec, à chaque fois, la tenue d’un dîner de gala associant chefs étoilés et défilés de Haute-Couture. Pour l’heure, ce «financier humaniste » comme il se plaît à se définir met la dernière main à la rédaction de «L’entreprene­ur de mode », un guide destiné à expliquer de façon simple et pragmatiqu­e aux créatifs la gestion, la fiscalité et le financemen­t de leur entreprise. « Un ouvrage qui, je l’espère, sera également drôle à lire ».

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