Révélation
Stéphane Pariente,
fondateur et dirigeant de FinanceMode
et « Les Anges de la Mode».
Si, depuis l’avènement du règne de la Fée électricité, la lumière jaillit en appuyant simplement sur un interrupteur, dans le cas de Stéphane Pariente et pour ce qui se rapporte à l’illumination de sa matière grise, c’est sous le jet de sa douche que L’IDÉE de sa nouvelle vie professionnelle a surgi.Une véritable résurrection ! Après huit ans d’un destin
étroitement lié sur le plan professionnel à celui de sa femme Delphine avec la marque de mode et d’accessoires « Delphine Pariente » qu’ils avaient co-fondée ensemble, leur séparation avait en effet brutalement fait voler en éclats une réussite d’entreprise plus que foisonnante en termes de perspectives. Ainsi que notre homme, dont l’allure savamment recherchée de dandy chic mais cool n’est pas sans rappeler celle de (feu) Willy DeVille, le confesse sans fausse pudeur, après avoir pleurer toutes les larmes de son corps et galérer pendant plus d’un an à essayer de convaincre une pléthore d’employeurs effrayés par son profil d’entrepreneur de le recruter malgré tout, s’était enfin profilée la révélation du chemin qu’il
lui faudrait
Dans ce « Froufrou, ton univers impitoyable » qu’est la mode, s’il y a beaucoup d’appelés, seule une infime poignée de créateurs indépendants réussissent à passer au rang d’élus. Virtuose dans le maniement des chiffres par profession et empêcheur de créer en rond par vocation, Stéphane Pariente fait le pari depuis quelques années de soutenir ces francstireurs du style via sa société FinanceMode. Une structure qui assiste et accompagne ces mal aimés des banques dans leur recherche de financement et de développement. Un challenge à (très) haut risque mais qui, au final, s’avère un sacré beau coup de dé !
dorénavant emprunter. En l’occurrence, mettre en application sa vision globale du marché de la mode et sa parfaite connaissance du métier ô combien parsemé de chausse-trappes de créateur au-travers d’un dispositif d’accompagnement spécifique. Une démarche, à dire vrai, fortement imprégnée d’un esprit anglo-saxon par sa manière aussi risquée que dynamique d’utiliser les outils financiers et fiscaux comme autant d’armes destinées à défendre cette catégorie de professionnels du textile si mal soutenus par les Fédérations du secteur et souvent incompris (et donc rejetés) par les organismes bancaires. « Le principal obstacle au développement d’un créateur est son manque de trésorerie en phase de démarrage, manque de trésorerie en phase de croissance et plus encore en cas de forte croissance. Pourtant, les jeunes créateurs, le milieu l’oublie trop souvent, constituent notre vivier et notre richesse de demain» insiste avec une foi propre à déplacer des montagnes cet expert-comptable de formation.
>>Derrière les chiffres, une sensibilité d’artiste
Et oui ! Sous sa dégaine d’artiste, cet élégant personnage est expert-comptable de formation. D’origine pied-noir, ce n’est pourtant pas sur l’autre rive de la Méditerranée mais à SaintLouis du Sénégal qu’il a vu le jour en 1969. Un séjour en terre africaine d’une très courte durée puisque ce fils d’un père ingénieur chez Alcatel n’y a demeuré que le temps de sa première année d’existence, mais qu’il aura l’occasion de découvrir réellement à l’âge de vingt ans dans le cadre de sa coopération. Après une petite décennie passée en France, le voilà de repartir avec ses parents pour Bogota, en Colombie. La famille Pariente y séjournera quatre ans avant de retrouver la vie parisienne. Bien que rêvant à une carrière touchant à la création, l’adolescent qu’il est alors préfère ne rien en dire à ses proches par crainte de les décevoir. Doué pour les chiffres, il décide de s’orienter plus pragmatiquement dans le domaine de l’expertisecomptable non sans se promettre de mettre un jour ses compétences au service des artistes. A l’issue d’un bac scientifique, il entre à La Sorbonne afin d’y suivre des études de gestion qui le mèneront jusqu’à l’obtention à la fois d’une maîtrise générale et d’une maîtrise en sciences et techniques comptables et financières. Son entrée dans la vie professionnelle s’effectue chez KPMG, premier groupe français de services pluridisciplinaires pour les activités réglementées. Un passage d’à peine deux ans dont une bonne partie escamotée par son temps de coopération effectuée à la Cour des Comptes de Dakar. Une expatriation qu’il ne vit d’ailleurs pas seul puisque Delphine, épousée quelques mois plus tôt et encore étudiante en Droit où elle préparait le diplôme d’accès à la profession d’avocat, avait décidé de le suivre. Tandis que Stéphane se consacre à l’audit d’entreprises locales, Delphine, entre deux révisions, court les marchés et les échoppes d’artisans pour y acheter des étoffes et se faire confectionner des robes et des accessoires qu’elle imagine. De retour sur Paris, le couple se retrouve quelque peu désorienté tant dans sa réadaptation à la grisaille ambiante que sur le chapitre de son intégration dans la vie professionnelle. Une période de flottement qui, loin de s’avérer négative pour nos tourtereaux, les amène à emprunter d’autres rails. Tout en démarrant une carrière de banquier d’affaires, Stéphane n’hésite pas à sacrifier une partie de ses (petites) économies pour que sa compagne puisse faire réaliser quelques prototypes de ses créations et les présenter à des bureaux d’achat. Le test est concluant puisque très rapidement une commande de mille deux cent sacs est passée par Nordstrom, une chaîne américaine de magasins. Une entreprise en propre est fondée. A la fin de cette aventure couronnée par un vrai succès commercial et une forte reconnaissance médiatique, Stéphane Pariente effectuera encore un passage éclair au sein du groupe d’Alain Duménil en qualité d’adjoint du directeur financier avant de comprendre que son « vrai » destin s’accomplira ailleurs …
>>La finance au chevet de la création
Mise en orbite en 2006, cette structure d’accompagnement qu’est FinanceMode propose donc aux créateurs indépendants de leur obtenir de l’argent sous la forme d’un Crédit Impôt Recherche Textile avec, pour contrepartie, le versement d’un pourcentage payable au résultat. « Au démarrage, j’ai été pris soit pour un fou, soit pour le Père Noël. Si beaucoup m’ont claqué leur porte au nez, d’autres ont voulu tenter l’expérience ». Six années plus tard, Finance Mode a accompagné près de 150 marques et obtenu depuis 2009, via 550 dossiers déposés, 12 millions d’euros ! Ses critères de choix ? « Mon critère est justement de ne pas en avoir parce que je me refuse à être celui qui va décider de la vie ou de la «mort » d’un créateur. A mon sens, seul le marché est en droit d’opérer un tel choix ». Considérant que Finance Mode est avant tout une première pierre à une stratégie globale élaborée sur vingt cinq ans, Stéphane Pariente en a ajouté une seconde en 2011 avec « Les Anges de la Mode », un espace de 140 m2 sous verrière situé en plein quartier du Marais et voulu comme une plateforme de création, d’expositions et de rencontres spécialement dédiée à titre gracieux aux créateurs de mode indépendants. Débordant de projets, cet « agité du bocal » en perpétuelle recherche de nouvelles solutions ne cesse de plaider pour l’absolue nécessité, si les créateurs veulent avoir une chance de pérennité, de travailler différemment en externalisant de leur entreprise tout ce qui ne se rapporte pas directement à la création. Récemment, il s’est associé avec AXA afin de concevoir un contrat d’assurance spécifique à ce profil de « faiseurs » du fil et de l’aiguille. Il a également mis en orbite en 2012 une nouvelle société baptisée « Designers de Mode » dans une optique d’aide au développement commercial. Une première opération est prévue à la fin de cette année (29,30 novembre et 1er décembre) qui réunira, dans le cadre de la Cité de la Mode et du Design, une centaine de marques estimées parmi les meilleures de cette nouvelle vague de créateurs dans les différents segments du marché qui y exposeront et vendront directement leurs produits au public (30 à 40.000 visiteurs sont espérés). Autre événement sur le feu : l’orchestration d’une « luxury fashion week » sous la forme d’une tournée dans quinze grandes capitales du monde. Toutes les facettes du luxe (aussi bien la mode et la haute joaillerie que les yachts et les jets privés) y seront présentées et proposées à la vente avec, à chaque fois, la tenue d’un dîner de gala associant chefs étoilés et défilés de Haute-Couture. Pour l’heure, ce «financier humaniste » comme il se plaît à se définir met la dernière main à la rédaction de «L’entrepreneur de mode », un guide destiné à expliquer de façon simple et pragmatique aux créatifs la gestion, la fiscalité et le financement de leur entreprise. « Un ouvrage qui, je l’espère, sera également drôle à lire ».