Infrarouge

Felipe Oliveira Baptista, archi doué

- Par Aude Bernard-Treille.

Le nouveau directeur artistique de Lacoste manie la mode avec élégance. Tout comme pour sa marque éponyme, c’est avec des coupes très architectu­rales, des jeux de volumes, des lignes simples, qu’il amène la marque au croco sur un terrain plus chic, mais toujours inattendu.

Petit garçon, quel était votre métier préféré ?

J’ai, depuis toujours, été fasciné par la photograph­ie, je le suis encore aujourd’hui.

Qu’avez-vous appris de plus important pendant vos études de design de mode à l’université de Kingston à Londres ?

D’une manière générale, en Angleterre, on valorise beaucoup la jeunesse, ne serait-ce qu’à travers la culture Pop. A Londres, mes études m’ont paru plus libres, moins académique­s qu’en France. De plus, les écoles et université­s anglaises sont très réputées dans le domaine de la mode, beaucoup de directeurs artistique­s en poste aujourd’hui sont d’ailleurs issus de ces écoles.

Quelle était votre image de la maison Lacoste avant d’en devenir le directeur artistique ?

J’ai connu la griffe, comme beaucoup d’enfants, en portant des polos. Le premier que j’ai reçu en cadeau à 14 ans était bleu marine ; avec le temps il est devenu indigo. C’est un véritable objet de réminiscen­ce que je porte encore parfois en vacances. J’ai toujours admiré l’histoire incroyable de René Lacoste et plus largement le style Lacoste : décontract­é, clean et simple. Pour moi, Lacoste a toujours incarné le sportswear à la française, à la fois chic et démocratiq­ue.

Vos collection­s très réussies apportent un style beaucoup plus urbain, sophistiqu­é et couture, plus éloigné du sportwear originaire de la marque, est-ce une volonté d’amener Lacoste vers d’autres territoire­s ?

D’emblée, j’ai voulu que le polo reste un incontourn­able, mais j’avais envie de montrer qu’on peut aussi porter autre chose chez Lacoste. Je me suis donc beaucoup concentré sur les vêtements en leur appliquant une approche volumétriq­ue élaborée, qui est un peu ma signature. Je souhaite garder la dimension « aristo chic » de la maison, mais l’inscrire dans un esprit plus contempora­in. Développer la femme pour en faire une vraie garde-robe transversa­le qui marie l’esprit urbain et le casual.

Peut-on dire qu’un styliste qui aime jouer avec les lignes et le graphisme est en quelque sorte un architecte du vêtement ?

La mode et l’architectu­re sont très proches, leur vocation principale est pour les deux de protéger le corps.

Qu’est-ce que vous vous autorisez pour les collection­s de votre propre marque que vous ne faites pas (ou pas encore) pour Lacoste ?

Ce sont deux univers différents, chez Lacoste je me permets tout, mais en restant fidèle à l’ADN de la marque.

Quelle est votre définition de l’élégance ?

Une élégance désinvolte et sans réflexion.

Citez une pièce de votre dressing qui ne sera jamais démodée ?

Un trench qui reste un intemporel.

Que détestez-vous le plus dans le milieu de la mode ?

On est dans une période charnière où tout le monde semble un peu perdu. Les marques de mode sont toujours plus nombreuses et multiplien­t les collection­s et les pré collection­s car il faut vendre toujours plus. Cette offre pléthoriqu­e encombre le marché, l’asphyxie même. Et l’escalade, aux démonstrat­ions spectacula­ires, continue au détriment de la qualité et d’une création réaliste.

Qu’est-ce que vous aimez chez les autres, mais qui ne va pas du tout sur vous ?

Les imprimés.

Ce qui vous fait rire dans votre travail ?

Parfois les accidents et une certaine dose d’ironie.

Enfin, quelle est votre devise ?

« Définir, c’est limiter » d’Oscar Wilde, mais je me répète aussi souvent « keep it simple stupid » afin de désintelle­ctualiser.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France