Infrarouge

Arabelle Reille, l’art et la manière

- Par Hervé Prouteau.

Aux commandes de l’une des rares émissions d’art à la télévision, Arabelle réussit le pari de nous faire découvrir, chaque samedi sur Paris Première, les tendances et les coulisses du marché de l’art. Et de façon vivante !

Progrès à faire… dans quel secteur de l’art avez-vous le plus de « pain sur la planche » ?

Il faut être toujours plus didactique, rallier tous les publics, j’aimerais que la ménagère qui fait son pain vienne sur ma planche ! Côté artistes, ils sont parfois trop intellectu­els et savonnent leur planche… C’est là que j’arrive avec ma cape et mon décodeur !

C’est « dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes », un exemple probant dans l’art ?

On redécouvre des artistes qui ont toujours été grands, mais qui ont élargi leur public sur le tard. Comme Pierre Soulages ou François Morellet.

La dernière fois que vous avez « raconté des salades » profession­nelles, c’était à quel sujet ?

Je suis parfois obligée de faire mijoter à feu doux certains de mes intervenan­ts, mais lorsque les ingrédient­s sont bons, la sauce prend !

Parmi ceux qui, régulièrem­ent, « crachent dans la soupe médiatique », qui trouve encore grâce à vos yeux ?

La soupe, c’est la critique, les galeristes, les collection­neurs ; les artistes vivent dans leur univers, ils ne s’en préoccupen­t pas tant que ça. Le boulot des marchands c’est justement d’être l’interface et de libérer les artistes des contingenc­es.

Perso ou business, racontez-nous votre plus beau « four » ?

Il y a quelques années, j’avais conseillé à un collection­neur d’acheter une pièce d’un jeune artiste indien (Subodh Gupta) qui coûtait environ 25 000 €. La femme de ce collection­neur a fait annuler l’achat ; or cette pièce vaut aujourd’hui environ 600 000 €… elle a raté son assurance vie !

De quel « pain » ne mangerez-vous jamais ?

Du pain de la mauvaise foi, il a un goût amer qui donne des maux d’estomac.

Récemment… un artiste et son oeuvre dont vous n’avez pas « perdu une miette » ?

Loris Gréaud, ce garçon a un univers qui me fascine ! Ce type est un génie, il a une très bonne mécanique intellectu­elle. Et puis il est obsessionn­el, ce qui est une grande force créative.

Qu’appréciez-vous le plus dans l’appartenan­ce à ce qu’on appelle « le gratin » ?

C’est génial ! On est invités à des tas de vernissage­s dans de beaux endroits, avec des gens intelligen­ts ! C’est de l’hédonisme pur.

A quelle occasion avez-vous « bu du petit lait » dernièreme­nt ?

Lorsque j’ai reçu pour mon émission le satisfecit des gens de l’art qui m’ont félicitée pour la qualité du contenu. C’était important.

La dernière fois que vous avez eu du mal à « tenir votre langue », c’était à propos de quoi ?

Je ne la tiens jamais, je suis même assez cash. Je devrais parfois la tourner dans ma bouche d’ailleurs !

Le casting idéal d’un « dîner improbable » que vous organiseri­ez, c’est avec qui et pour quelles raisons ?

Maurizio Cattelan (artiste totalement barré), Brad Pitt (séduisant et collection­neur !), Daphné Roulier (qui est comme une soeur et qui séduirait une chaise…), Jean de Loisy (brillant directeur du Palais de Tokyo), Loris Gréaud (qui vient d’ailleurs et carbure à 12 000 tours !) et Péri Cochin (très drôle, elle ferait parler un caillou !).

Citez-nous un artiste qui illustre le « gâchis parmentier » : c’est beau, ça aurait pu être bien… mais ça ne l’est pas ?

« Bien de loin mais loin d’être bien », c’est ça ? Richard Prince, qui est pour moi l ’un des plus grands artistes que je connaisse mais qui cède un peu à la facilité. Il se repose sur ses acquis.

Racontez-nous la dernière fois qu’une oeuvre vous a fait « tourner sept fois votre langue dans votre bouche », avant de dire une bêtise ?

C’était sans doute à propos d’un artiste comme Paul McCarthy, californie­n, que le marché adore et que je déteste !

La critique est aisée, l’art est difficile. Mettez vous « à table » avec un exemple ?

C’est pour ça que lorsque je me permets de critiquer le travail de certains artistes, c’est parce qu’ils nous ont habitués au meilleur, et qu’ils nous rendent donc exigeants !

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Loris Gréaud est obsessionn­el, ce qui est une grande force créative.
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