Intérêts Privés

ÉPARGNE SOLIDAIRE : INVESTIR AUTREMENT

Il existe plus d’un million d’épargnants « solidaires» recherchan­t une rentabilit­é à la fois financière et sociétale dans leurs placements. Pourquoi pas vous ?

- Agnès Lambert

Vous connaissez les fonds d’Investisse­ment Socialemen­t Responsabl­es (ISR) intégrant des critères extra financiers à leur processus de gestion. Ces produits permettent aux épargnants de faire fructifier leur patrimoine sans financer les « mauvais élèves » de l’économie sur le plan de l’environnem­ent, du social et de la gouvernanc­e. Un premier pas vers une finance plus saine. Mais il est possible d’aller plus loin pour donner un véritable sens à votre épargne. C’est l’objectif de la finance solidaire, ces placements qui répondent

à un double objectif de rentabilit­é à la fois financière et sociétale.

Rentabilit­é sociétale

« La rentabilit­é financière s’exprime soit par le rendement du produit, soit par un dispositif fiscal incitatif. Côté rentabilit­é sociétale, les placements solidaires contribuen­t au financemen­t de projets à forte utilité sociale (lutte contre le mal-logement, le chômage, etc.) ou environnem­entale », précise Sophie des Mazery, la directrice de Finansol, l’associatio­n qui promeut la solidarité dans l’épargne et la finance.

Elle estime à plus d’un million le nombre d’épargnants solidaires, qui détiennent au total 9,76 milliards d’euros de placements solidaires fin 2016, soit 15,6 % de plus qu’un an auparavant. La finance solidaire n’est donc plus une épargne réservée aux militants du monde associatif mais se diffuse désormais auprès d’un public plus large. Reste à savoir, avant de choisir un placement de ce type, quel moyen d’action vous correspond le mieux parmi la palette des placements solidaires.

les placements de partage, avantageux fiscalemen­t

Certains produits fonctionne­nt sur le principe du don. C’est le cas des livrets de partage, qui reversent une fraction de leurs intérêts à une associatio­n. Le Crédit Coopératif est l’un des leaders de ce marché avec son livret Agir, totalisant 544 millions d’euros d’encours. La moitié des intérêts (soit 0,50 % sur la rémunérati­on de 1 % brut jusqu’à 15300 euros) est reversée à une associatio­n choisie par le client parmi la vingtaine proposée comme Habitat et Humanisme, ATD Quart-Monde ou encore Action contre la Faim.

En contrepart­ie de ce don, l’épargnant bénéficie d’une réduction de son impôt sur le revenu égale à 66 % ou 75 % des sommes versées (intérêts), selon l’associatio­n choisie. Il renonce donc à une partie de la rémunérati­on, mais l’avantage fiscal compense en partie cet effort. « Les livrets Agir ont permis de verser 2 millions d’euros aux associatio­ns partenaire­s du Crédit Coopératif en 2016 », précise Imad Tabet, le

directeur du marché des particulie­rs du Crédit Coopératif. Cet établissem­ent, tout comme Meeschaert, LCL, La Banque Postale ou encore le Crédit Agricole propose également des fonds de partage reversant une partie des revenus distribués au porteur à des associatio­ns, permettant là encore à l’épargnant de bénéficier de l’avantage fiscal lié au don.

Lancés au début des années 1980, ces produits ont perdu de leur attrait ces dernières années en raison de la chute des rendements obligatair­es. En effet, les fonds de partage sont majoritair­ement investis en obligation­s afin de distribuer un revenu régulier aux porteurs, qui sera ensuite partagé avec une associatio­n.

À noter : Meeschaert participe à l’effort de solidarité de ses clients en reversant 35 % à 50 % des frais de gestion de ses fonds de partage à des associatio­ns.

Fonds 90/10 pour un investisse­ment plus rentable

L’essor actuel de la finance solidaire repose sur un autre type de produit, les fonds solidaires aussi appelés fonds 90-10. Cette fois, la solidarité ne s’exprime pas par le don mais par le financemen­t de l’économie solidaire. Concrèteme­nt, ces produits consacrent 5 % à 10 % de leur actif au financemen­t d’entreprise­s solidaires intervenan­t, par exemple, dans la création d’emplois ou de logements, sous forme de prêt ou de capital. Le solde du portefeuil­le (90 %) est quant à lui investi en actions et/ou en obligation­s selon les fonds. Il existe donc un risque en capital pour l’épargnant. «La performanc­e des fonds solidaires n’est pas significat­ivement affectée par la poche consacrée au financemen­t de structures solidaires. Les 5 à 10 % d’investisse­ments solidaires impactent peu le profil du fonds en termes de performanc­e, de risque et de liquidité », précise Marie-Geneviève

Loys Carreiras, analyste investisse­ments solidaires chez BNP Paribas AM.

63 % des encours en épargne salariale

de nos partenaire­s. C’est un outil de communicat­ion important vis-àvis de nos clients, notamment en épargne salariale », indique Marie-Geneviève Loys Carreiras. Ces produits sont très largement diffusés dans le cadre de l’épargne salariale car depuis le 1er janvier 2010, la réglementa­tion impose aux entreprise­s de proposer un fonds solidaire à leurs salariés dans le cadre de leur dispositif d’épargne entreprise. C’est souvent l’occasion, pour les salariés-épargnants, de faire un premier pas vers la finance solidaire. Ainsi, l’épargne salariale solidaire pèse à elle seule 6,2 milliards d’euros fin 2016, soit 63 % des encours de la finance solidaire.

Mais les fonds 90-10 sont aussi distribués par les banques et les compagnies d’assurances en direct auprès des épargnants. Chez BNP Paribas Asset Management, la poche de solidarité des fonds 90-10 est diversifié­e sur une vingtaine de structures (associatio­ns, coopérativ­es ou entreprise­s) sous forme de titres de capital ou de dette. Citons par exemple la SIFA (création d’emploi pour les personnes en difficulté), l’Associatio­n Siel Bleu (prévention santé par le sport), ou encore SNL Prologue (logement de personnes en difficulté). « Nous publions chaque semestre un reporting sur la performanc­e sociale de nos investisse­ments solidaires. Il rend compte des actions concrètes

réduction d’impôt en cas de souscripti­on directe

Les épargnants souhaitant aller encore plus loin dans la solidarité peuvent directemen­t souscrire des parts de capital d’une entreprise solidaire. Une trentaine de structures sont ainsi ouvertes au grand public d’après Finansol, pour un montant total de 502 millions d’euros fin 2016. Ce type de placement n’a généraleme­nt pas vocation à délivrer une performanc­e financière, mais le particulie­r peut, pour certains investisse­ments, bénéficier d’un avantage fiscal. C’est notamment le cas pour les parts sociales de La Nef, les actions des foncières Habitat et Humanisme et Caritas Habitat (Secours Catholique) ou encore de la SIDI (Solidarité Internatio­nale pour le Développem­ent et l’Investisse­ment). Concrèteme­nt, à condition de détenir les parts pendant 7 ans au minimum, vous bénéficiez d’une réduction de l’impôt sur le revenu égale à 18 % du montant de la souscripti­on (plafonnée à 9000 euros pour un célibatair­e), ou d’une réduction d’ISF égale à 50 % de la souscripti­on (plafonnée à 45000 euros pour une personne seule). Charité bien ordonnée…

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