Intérêts Privés

VENTE AUX ENCHÈRES D’UN BIEN IMMOBILIER

MODE D’EMPLOI ET FRAIS D’UNE PROCÉDURE SANS FILET

- Isabelle Gallay

marre des prix astronomiq­ues de l’immobilier vendu par agence dans les grandes villes ? Vous envisagez d’acheter autrement. Sachez que trois modes de ventes aux enchères coexistent sur le marché pour les biens immobilier­s : - Les ventes notariales. Organisées par des études notariales, elles se déroulent généraleme­nt à la chambre départemen­tale des notaires. Elles concernent des biens volontaire­ment mis en vente par leurs propriétai­res ;

- Les ventes judiciaire­s. Organisées par des cabinets d’avocat, elles ont lieu devant le tribunal de grande instance (TGI). Les biens proviennen­t, en grande majorité, de saisies pour impayés. Le reste concerne des biens en indivision pour lesquels les indivisair­es ne s’entendent pas.

- Les ventes domaniales. Il peut également arriver que soient mis aux enchères des biens appartenan­t

à l’État ou issus de succession­s dites « en déshérence » (c’est-à-dire non réclamées). Les enchères sont alors organisées par le service des Domaines.

Cet article ne présente que les ventes aux enchères judiciaire­s.

Maison, appartemen­t, studio, hôtel particulie­r, terrain, garage, cave, parking… toutes sortes de biens peuvent faire l’objet d’une mise aux enchères. Et ce, dans toute la France : en ville, à la campagne, en bord de mer comme à la montagne, ….

Les enchères présentent l’avantage d’un prix de départ nettement en dessous de la valeur de marché du bien, avec un prix de vente final (encore appelé « prix d’adjudicati­on ») restant souvent très intéressan­t (on peut espérer 20 à 30 % moins cher par rapport au marché). Exemple : Un appartemen­t T3 (83 m²) situé à Angers (49), libre de locataire, à rénover, mise à prix : 95000 € ; prix d’adjudicati­on : 153000 € ; estimation moyenne de son prix sur le marché de l’immobilier (source : www.meilleursa­gents.com) : 215400 €.

Mais attention à ne pas vous laisser entraîner par l’effet d’emballemen­t des enchères car, en plus du prix adjugé, vient se rajouter un certain nombre de frais (voir encadré). En outre, la décote peut aussi tenir compte de certains désagrémen­ts, comme la présence d’un locataire ou un logement en mauvais état pour lequel il faudra alors prévoir une enveloppe travaux subséquent­e.

➜ À VÉRIFIER AVANT LE JOUR DES ENCHÈRES

Vous avez repéré un bien immobilier qui vous intéresse ? Respectez plusieurs étapes afin de mettre

toutes les chances de votre côté pour enchérir à votre avantage.

• Renseignez-vous sur le bien visé. Rapprochez-vous du cabinet d’avocat chargé de la vente du bien afin d’obtenir tous les renseignem­ents le concernant.

Vous pouvez aussi vous rendre sur place aux dates et heures des visites précisées dans l’annonce. Ainsi, par exemple, pour une vente aux enchères organisée au TGI de Bordeaux le jeudi 16 mai 2019, 2 visites sur place étaient prévues : les jeudis 2 et 9 mai, de 10h à 12h. À vous de vous rendre disponible. Ne faites pas l’impasse car les achats immobilier­s sur adjudicati­on excluent tout recours à l’encontre de l’ancien propriétai­re pour vices cachés. Vous les achetez en l’état. Or, il ne faut pas se leurrer, ces biens, notamment ceux vendus dans le cadre d’une saisie, sont souvent mal entretenus. À vous de faire une visite minutieuse, voire de vous faire accompagne­r par un profession­nel pour chiffrer les travaux de rénovation et vérifier que la structure est saine.

Consultez également le cahier des conditions de la vente (ancienneme­nt appelé « cahier des charges ») qui contient des informatio­ns relatives au bien vendu (descriptif de l’immeuble, diagnostic­s techniques immobilier­s, derniers PV d’assemblée générale pour un appartemen­t en copropriét­é, éventuelle­s servitudes, contrat de location si le bien mis en vente est occupé, …) ainsi que les modalités de la vente aux enchères. Vous pouvez le consulter au cabinet de l’avocat qui organise la vente et au greffe du TGI où auront lieu les enchères. Il est également consultabl­e le jour de la visite. Cette recherche d’informatio­ns est d’autant plus importante que vous ne disposez pas, comme pour une vente immobilièr­e classique, d’un délai de réflexion de 10 jours après la vente pour y renoncer sans pénalités !

• Assurez-vous de pouvoir disposer des fonds nécessaire­s pour régler non seulement le prix d’adjudicati­on mais également les frais annexes. Si vous pensez avoir recours à un prêt bancaire, prenez rapidement contact avec votre banque, afin d’être sûr d’avoir le financemen­t nécessaire si vous remportez l’enchère. En effet, une vente aux enchères ne comporte pas de condition suspensive d’obtention de prêt. Vous devez donc avoir les fonds nécessaire­s à l’achat, au plus tard dans les 60 jours qui suivent l’adjudicati­on.

Attention à bien évaluer le budget total ! Au prix maximum que vous vous êtes fixé pour les enchères, n’oubliez pas d’ajouter les frais d’adjudicati­on (voir encadré). C’est cette somme to

tale que vous devrez être capable de régler, si vous remportez l’adjudicati­on.

➜ COMMENT AGIR LE JOUR DES ENCHÈRES

Dans le cadre d’une vente judiciaire, il ne vous est pas possible d’enchérir directemen­t. Vous devez obligatoir­ement passer par l’intermédia­ire d’un avocat (inscrit au Barreau du TGI dans lequel la vente est effectuée) afin qu’il vous représente le jour de l’audience des ventes (moyennant des honoraires à lui payer, voir encadré).

Après avoir vérifié votre capacité d’acquérir et de financemen­t, l’avocat vous demandera :

– de signer un mandat écrit lui donnant pouvoir d’enchérir jusqu’à la somme maximale convenue entre vous ;

– deux chèques de banque de consignati­on : l’un représente 10 % de la mise à prix, avec un minimum de 3000 €. En cas d’adjudicati­on à votre profit, cette consignati­on sera déduite du prix de vente ; l’autre sert à couvrir partiellem­ent les frais préalables à la vente ainsi que les frais postérieur­s (droits d’enregistre­ment, émoluments, frais de publicatio­n).

À savoir : Si vous ne remportez pas l’enchère ou que, finalement, vous n’enchérisse­z pas, ces chèques vous seront rendus à l’issue des enchères. Dans le cas contraire, ils ne seront encaissés que lorsque la vente est définitive (c’est-à-dire après expiration du délai de surenchère).

➜ APRÈS LA VENTE AUX ENCHÈRES

Vous avez remporté l’enchère ? Ne vous emballez pas ! Il vous faut encore attendre 10 jours, pour que la vente devienne définitive. En effet, pendant ce délai, n’importe qui peut encore faire une surenchère du 10ième du montant de l’adjudicati­on, surenchère qui aboutit alors à la remise en vente du bien.

Une fois le délai de 10 jours écoulé sans surenchère, la vente devient définitive. Si vous êtes considéré comme étant propriétai­re du bien dès le jour de l’adjudicati­on, la remise des clés ne se fera qu’au paiement intégral du prix (enchères + frais annexes) dans les 60 jours qui suivent les enchères. À savoir : pas besoin de passer chez un notaire : le jugement d’adjudicati­on va constituer votre titre de propriété.

➜ ET SI LE LOCAL ÉTAIT OCCUPÉ ?

Deux cas de figure sont à envisager :

- S’il était occupé par l’ancien propriétai­re, ce dernier devient occupant sans droit ni titre ; de sorte que s’il refuse de quitter les lieux spontanéme­nt, le jugement d’adjudicati­on constitue un titre exécutoire permettant de l’expulser. Pas besoin d’engager une procédure devant un tribunal, un huissier de justice suffit.

- S’il était occupé par un locataire, vous devez reprendre le bail en cours dans les conditions fixées par le contrat de location comme si vous l’aviez signé vous-même.ll

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