INVESTIR SON ARGENT DE FAÇON DURABLE…
L’ESSOR SYMPATHIQUE DE LA « FINANCE VERTE »
L’offre s’est considérablement développée : la finance responsable regroupe pas moins de 488 fonds pesant 149 milliards d’euros fin 2018. S’y ajoute la finance solidaire dont les encours avoisinent les 13 milliards d’euros. Point commun : ces produits permettant d’investir « autrement » sans poursuivre un unique objectif de profit visent à la fois la recherche de performance financière mais aussi un impact sociétal ou environnemental. Il s’agit de produits d’investissement socialement responsable (ISR), de fonds thématiques spécialisés, par exemple, sur la transition éner
gétique, de fonds à impact social, de produits solidaires, etc.
Une offre floue pour l’épargnant mais Une collecte en croissance
« Le secteur est en plein essor. Souvenez-vous que la finance responsable ne représentait que quelques millions d’euros il y a quinze ans », rappelle Anne-Catherine Husson-Traore, la directrice générale de Novethic.
L’organisation de la COP 21 à Paris en 2015 a favorisé la prise de conscience en faveur du réchauffement climatique, qui est l’une des thématiques majeures mise en avant par de nombreux produits. « Ce n’est que le début de l’histoire. Les encours ont progressé de 11 % l’an dernier, et la loi Pacte (lire notre encadré) va accélérer le phénomène », se réjouit Anne-Catherine Husson-Traore. Mais la route est longue. Car la dénomination de finance responsable reste, pour une large majorité d’épargnants, assez floue. En effet, si 63 % des Français déclarent accorder une place importante aux impacts environnementaux et sociaux dans leurs décisions de placements, 65 % déclarent n’avoir jamais entendu parler d’ISR. Ces chiffres issus d’une enquête IFOP pour le Forum pour l’Investissement Responsable (FIR) et Vigeo Eiris en septembre 2018 montrent le chemin qu’il reste à parcourir. « Nous constatons une accélération de l’intérêt pour la dimension sociétale des placements depuis 2018. Mais ces produits souffrent toujours d’un déficit de notoriété, car les établissements financiers les mettent peu en avant », commente Grégoire Cousté, délégué général du FIR. En effet, seules 5 % des personnes interrogées par l’IFOP se sont vues proposer de l’ISR par leur conseiller.
Une démarche personnelle compatible avec les enveloppes classiques
C’est donc à l’épargnant de se prendre en main pour investir autrement. Le choix est large puisque les produits concernés sont à la fois disponibles dans l’épargne salariale, l’assurance-vie, le plan d’épargne en actions (PEA) et l’épargne retraite.
Aucun problème non plus pour trouver un placement responsable adapté à votre profil de risque : toutes les classes d’actifs sont représentées, du monétaire sans risque au fonds actions, en passant par les produits diversifiés, les fonds obligataires et même le capital investissement. « Avant toute chose, il faut vérifier que l’objectif du fonds correspond bien à votre vision, à vos préoccupations et à vos valeurs », conseille Grégoire Cousté du FIR. Cela implique d’être capable de bien différencier les nombreuses familles de produits.
ancienneté de l’isr
La catégorie la plus développée est celle des fonds d’investissement socialement responsables (ISR). Ces produits placés en actions, obligations, monétaires ou un mix de ces trois
classes d’actifs intègrent des critères dits ESG (environnement, social, gouvernance) aux côtés des classiques ratios financiers. « Les fonds ISR ont des objectifs de performance comparables à ceux des fonds non-ISR : l’investisseur ne renonce en aucun cas à la performance financière. Ils peuvent donc se substituer à des fonds classiques dans un portefeuille actions ou obligations », précise Anne-Laurence Roucher, directrice générale déléguée de Mirova, la société de gestion de Natixis IM dédiée à l’investissement responsable.
À chaque produit son approche : d’aucuns excluent systématiquement les entreprises qui ne respectent pas certaines conventions internationales (droits humains, etc.), d’autres refusent certains secteurs d’activité (alcool, tabac, jeux d’argent, nucléaire, etc.). Il est aussi possible de trouver des fonds mettant plus l’accent sur la gouvernance ou davantage tournées vers le social ou l’environnement.
Les fonds thématiques plus « lisibles »
Ces process de gestion aussi complexes que variés rendent parfois l’ISR difficile à appréhender (et critiquable aux yeux de certains puisqu’il existe des fonds ISR répliquant assez largement les grands indices boursiers). C’est pourquoi de nombreux épargnants privilégient les fonds ISR thématiques, dont le concept est souvent plus parlant pour le grand public. Il s’agit, par exemple, de fonds spécialisés dans les énergies renouvelables, l’eau, l’emploi, la santé ou encore le changement climatique. De nombreux produits cherchent, par exemple, à limiter leur empreinte carbone. Novethic recense 147 fonds thématiques, dont l’encours atteint 36 milliards d’euros fin 2018, en hausse de 18 % sur un an. Mais, aussi varié soit-il, l’ISR n’est pas la seule façon d’investir autrement. La finance solidaire permet, elle aussi, de donner du sens à ses placements, avec une dimension très sociale.
finance Solidaire : pour tous !
L’association Finansol calcule que l’encours total de la finance solidaire atteint 12,56 milliards d’euros fin 2018, un chiffre en hausse de 8,7 %. Il s’agit à la fois de placements bancaires (livrets solidaires, fonds de partage), de fonds solidaires principalement commercialisés dans le cadre de l’épargne salariale et de parts de capital d’entreprises sociales pouvant être souscrites en direct par les particuliers. Le Crédit Coopératif est l’un des établissements les plus actifs avec ses livrets solidaires (livret Agir, 1 % brut/an jusqu’à 15 300 €) et des fonds ISR, solidaires et de partage. Ces derniers reposent non pas sur un objectif de performance financière mais sur celui du don : les livrets et les fonds de partage reversent chaque année tout ou
partie des gains à des associations. Ayant atteint près de 8 milliards d’euros, les fonds solidaires constituent le segment le plus développé de la finance solidaire. Ces produits ont l’obligation de consacrer 5 % à 10 % de leur actif au financement de structures solidaires bénéficiant de l’agrément ESUS (entreprise solidaire d’utilité sociale). La quasi-totalité de ces fonds sont par ailleurs gérés avec une approche ISR.
« Il ne faut pas opposer performance financière et impact social. Les fonds solidaires démontrent que les deux concepts peuvent être réunis dans un même produit : c’est ça leur plus-value », explique Patrick Sapy, le directeur de Finansol, qui estime que l’ensemble de la finance solidaire a permis de créer ou consolider 48 000 emplois l’an dernier et d’accueillir 3 500 personnes dans des logements ou places d’hébergement. Investir autrement est donc à la portée du plus grand nombre. Mais il n’est pas toujours aisé de finaliser la démarche en choisissant un produit. Plusieurs labels aident à y voir plus clair en permettant à l’épargnant d’identifier les produits réellement engagés. Le label Finansol, créé en 1997, récompense ainsi 150 produits solidaires, parmi lesquels des fonds, des contrats d’assurance vie solidaires ou encore des actions non cotées. Il existe, par ailleurs, deux labels publics : l’un pour les fonds ISR, l’autre pour les fonds « verts » (lire notre encadré). Créé par le ministère des finances, le Label ISR récompense 218 fonds parmi lesquels des produits de BNP Paribas AM, La Banque Postale AM, Mirova, Meeschaert, Axa IM, Amundi ou encore Ecofi Investissements.ll