Journal de France

LES GAFAM PLUS FORTS QUE LES ÉTATS ?

- Robert LAFONT

Pas besoin d’être grand clerc pour observer que chaque jour, des entreprise­s, et notamment les géants du web, grossissen­t à vue d’oeil sans parler des fusions-acquisitio­ns incessante­s. Ce n’est pas le cas des États-nations qui se contentent de 1 à 5 % de taux de croissance en moyenne. Le poids économique de ces multinatio­nales va peser de plus en plus lourd et constituer de véritables oligopoles technologi­ques et financiers sur des secteurs vitaux.

Sur des fonctions aussi stratégiqu­es que le numérique ou l’intelligen­ce artificiel­le, quelques milliardai­res (la plupart américains : Elon Musk – X, Tesla, SpaceX-, Bill Gates – Microsoft -, Jeff Bezos – Amazon -, Mark Zuckerberg – Facebook, Meta -, Sergey Brin et Larry Page – Google – ou Sam Altman – OpenAI, ChatGPT) disposent d’une véritable mainmise. Et notre consoeur, Christine Kerdellant, signe un excellent essai sur le sujet intitulé

« Ces milliardai­res plus forts que les états » (Éditions de l’Observatoi­re) où elle les nomme explicitem­ent, prenant soin d’ajouter que :

«Plus ces milliardai­res prendront le pas sur les États, moins la démocratie régnera, plus l’arbitraire s’installera, plus les inégalités et distorsion­s s’accroîtron­t… » Cela promet. Au même moment où l’on apprend que justement Mistral AI, la pépite française de l’intelligen­ce artificiel­le, censée assurer une certaine souveraine­té européenne en la matière, ne trouve rien de mieux que d’accueillir à son capital Microsoft au lieu de le faire avec OVH ou Iliad, par exemple.

Autant de signaux qui doivent pousser à consolider au niveau mondial le droit des nations et des États. Ce qui n’empêche nullement de chercher à favoriser au maximum la liberté pour les citoyens sur le terrain comme je le suggère à Michel Onfray, le formidable philosophe qui a tendance à trop vite passer par pertes et profits les avantages du libéralism­e à l’intérieur même d’une nation. Un exemple à mettre en oeuvre immédiatem­ent au niveau mondial : la bonne régulation de l’IA afin d’exiger une certificat­ion pour tout texte ou vidéo publiés et produits par l’intelligen­ce artificiel­le. Sinon, la confusion va être à son comble, et on ne pourra plus distinguer ce qui est humain ou vrai de ce qui est artificiel ou spéculatif, et on ne pourra plus échanger en confiance. Ce qui reste la base de la civilisati­on. Ne l’oublions jamais !

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