SPOT DE FRANCE
Serre Ponçon, un top spot dans les Hautes Alpes
Coincé par les montagnes au coeur des Alpes, le lac de Serre-Ponçon peut surprendre les non-initiés. Car qui pourrait imaginer que derrière ces pics enneigés se cache un spot de kite aussi agréable à rider qu’à regarder ? Si pour les vacances vous décidez d’un petit séjour hors cadre, voilà les réponses aux questions que vous pourriez vous poser avant de vous jeter dans les eaux douces d’un lac qui ne manque pas de sel.
LA MONTAGNE, CE N’EST PAS POUR LE SKI?
Non évidemment ! Les pentes sont avant toutes choses destinées au plaisir des yeux et aux gambadages périlleux de quelques locaux à poils et à cornes tels les chamois et autres marmottes cornues. Si effectivement les touristes vont au ski l’hiver, dès que le manteau neigeux se fait plus discret, le lac devient un terrain de jeu hautement réjouissant pour les kiteurs. Il est grand avec quelques spots faciles, il est beau avec ses montagnes verdoyantes saupoudrées de blanc qui plongent directement dans le bleu éclatant, et il est venté. En ce qui concerne les déplacements d’air, il ne faut en aucun cas se fier aux chiffres officiels de Windguru. Ils sousestiment quasiment systématiquement le vent quand ils ne se trompent pas carrément dans la direction. Les amateurs de glisse et de kite bénéficient parfois des courants de mistral qui se font canaliser par la vallée de la Durance. On a souvent du 20 noeuds de sud-ouest voire un peu plus dès lors que le vent souffle entre le nord-ouest et le sud-ouest sur le littoral provençal. Mais la configuration la plus habituelle, c’est quand le régime de brise classique s’installe. Tant que celles-ci sont orientées à l’ouest, le plan d’eau bénéficie des thermiques et des effets de goulet. Le vent se fait sentir dès la baie Saint Michel, plus on va vers Embrun plus il est fort. Ce ne sont pas les brises des Canaries, mais un bon petit flux qui va de 8 noeuds les mauvais jours à 18 noeuds les bonnes journées. Grosso modo, bien équipé, un kiteur peut sortir quasiment tous les jours. Seuls un flux de nord-est ou un temps très couvert peuvent vraiment casser cette dynamique qui commence en avril et s’achève en général en septembre.
LE VENT SE FAIT SENTIR DÈS LA BAIE SAINT MICHEL, PLUS ON VA VERS EMBRUN PLUS IL EST FORT. CE NE SONT PAS LES BRISES DES CANARIES, MAIS UN BON PETIT FLUX QUI VA DE 8 NOEUDS LES MAUVAIS JOURS À 18 NOEUDS LES BONNES JOURNÉES.
CE N’EST PAS UN PEU ÉTROIT UN LAC POUR FAIRE DU KITE?
Pour ceux qui aiment tirer des bords de 400km, ce n’est pas l’idéal, mais pour à peu près 100 % des kiteurs, c’est largement suffisant. Question taille, malgré un horizon barré de montagnes, même au taquet, il faut quelques minutes pour traverser le lac dans sa largeur. Après, libre à vous de tirer des bords pour remonter ou descendre au vent. Vous voulez des mensurations ? Il y a environ 1,2milliard de m3 d’eau pour une superficie de 28km2. Les deux mois d’été, quand le niveau est au plus haut, il fait 20km de long et 3 km de large. Le lac de SerrePonçon est le plus grand lac artificiel d’Europe. Autant remercier tout de suite les hommes qui ont réalisé ce projet dantesque, sinon, il faudrait rider les cailloux et les eaux turbulentes de la Durance. Après des travaux pharaoniques et le déplacement de villages, la mise en eau a été faite en 1960. Le but était initialement de couper court aux crues meurtrières tout en produisant de l’énergie. Mais au-delà, toute l’agriculture de la vallée de la Durance a profité du contrôle de l’irrigation. En ce qui nous concerne, la création d’un plan d’eau XXL fut du pain béni pour le tourisme. Les deux mois d’été voient la population de pédalos, de windsurf, SUP et kite prendre possession des quelques parcelles de rivage accessibles.
ON NE RISQUE PAS DE SE RETROUVER PERCHÉ DANS UN SAPIN?
La pratique est comme sur tous les spots. Il faut éviter de se mettre à l’eau n’importe où et n’importe comment sans connaître un minimum les réactions du vent et du relief sur certains coins. En fait, le niveau d’eau varie selon les saisons. En hiver, il peut baisser de plus de quinze mètres. Cette marée basse a deux conséquences. D’abord, le plan d’eau se rétrécit. Il faut donc tirer des bords un peu plus courts. La bonne nouvelle c’est qu’il y a plus de place pour préparer les ailes à terre. Ensuite, d’un point de vue esthétique le lac perd un brin de sa beauté. Les plages qui apparaissent sont caillouteuses, et la vase séchée n’a pas la couleur homologuée office de tourisme. Ceux qui ont les pieds sensibles ont tout intérêt à se munir de chaussons. Les mises à l’eau sont alors innombrables et la seule limite est celle du vent qui n’apprécie pas certains virages et reliefs du trait de côte. Mais les deux mois d’été,
quand la hauteur d’eau atteint son maximum, la largeur de la plage se réduit nettement sur quasiment tout le lac. La proximité de nombreux arbres et buissons rend le décollage périlleux. Il n’y a véritablement que vers la plage dite des EauxDouces que l’espace est assez grand pour décoller l’aile en toute sécurité avec un espace dédié. Ensuite, la navigation est très tranquille. Hormis quelques bouts de bois qui se la jouent « monstres du Loch Ness » après les grosses pluies, il n’y a pas de piège. Si le vent tombe, la berge n’est jamais très loin, comme il n’y a ni vague ni courant, on se sent tout à fait en sécurité.
C’EST PROPRE L’EAU D’UN LAC?
Eh oui ! L’eau vient directement des montagnes environnantes et elle est renouvelée en permanence. Bien sûr, la Durance traverse quelques villages, évidemment quelques animaux font pipi discrètement sur les berges de l’Ubaye. Mais globalement l’eau est impeccable. Et si elle n’est pas claire, c’est simplement qu’elle est chargée de sédiments. La Durance et le Boscodon fournissent une eau particulièrement riche en minéraux qui donnent une teinte à l’eau juste hallucinante. Ce qui ressemble à une vase quelconque hors de l’eau donne une couleur bleue des mers du sud surprenante. Vous pouvez avoir l’impression de tracer des bords aux Caraïbes sans craindre les patates de corail ! Outre le bleu de l’eau qui pique les yeux, ce qui fait une grande partie de l’attrait du coin, c’est que vous avez beau être sur un lac artifi- ciel, la nature est livrée à l’état brut. Les forêts nombreuses et denses vont se tremper les pieds sans vergogne, on se retrouve avec des contrastes de couleurs saisissants. La beauté du site attire naturellement pas mal de touristes de toute l’Europe. On y trouve un climat ensoleillé et très sain. Heureusement, si les vacanciers débarquent aux beaux jours, les plans d’eau sont encore très loin des standards de la Côte d’Azur. Hormis quelques zones plus fréquentées vers Savine, dès que vous traversez vers la rive nord, l’humain se fait rare. Pour résumer les choses, quand vous kitez à Serre- Ponçon, vous avez le soleil de Provence, les paysages de montagnes et les alizés des Caraïbes. Rien que ça !
ALTITUDE KITE
Le spot des Eaux-Douces est le rendezvous incontournable des kitesurfeurs de Serre- Ponçon. On y trouve l’unique école de kite du lac, Altitude-Kite. C’est Arnaud Le Guennec qui se cache derrière cette enseigne. Installé sur la région depuis 10 ans, il a bourlingué à travers les spots et les pays en tant
que moniteur avant de s’installer à son compte voilà 5 ans. Pour Kiteboarder, il revient sur les 3 questions clefs qui taraudent tout pratiquant normalement constitué.
OÙ NAVIGUER?
La pratique du kite est autorisée sur l’ensemble du lac. Elle est interdite près des infrastructures comme les ponts ou le barrage et bien sûr dans les zones de baignade. Mais en fait, 95% de la pratique du kitesurf se fait entre le pont de Savine et Embrun. Le spot principal, c’est celui des Eaux- Douces. C’est le seul grand terrain qui est approprié au décollage et à l’atterrissage des ailes durant les deux mois d’été. Il arrive qu’avec une météo différente on puisse naviguer ailleurs, mais c’est rare. D’autres spots fonctionnent comme Crot Beach, mais ils sont trop petits. Quand on a un vent météo bien établi, il est possible de kiter jusqu’à la baie Saint Michel ou à proximité de Savine, au pré d’Émeraude. Certains vont même dans la vallée de l’Ubaye par sudest quand le temps est dépressionnaire, mais c’est rare.
QUELLE PRATIQUE?
En fait, on peut faire de tout. Simplement selon le matos on navigue moins. C’est vrai que le foil est un bon outil, il permet de naviguer de 11 h jusqu’à la nuit quasiment tous les jours d’été. Mais on peut naviguer en twintip et faire du freestyle, simplement la fenêtre météo favorable est souvent plus courte.
QUAND Y ALLER?
Certains naviguent dès le mois d’avril, mais il ne faut pas être frileux, l’eau est à 10 degrés. Au printemps, les écarts thermiques sont plus marqués entre les sommets et le lac, c’est à ce moment que le vent est le plus accéléré. Le mois de septembre est pas mal encore, la baisse des températures favorise encore les thermiques. Mais pour kiter, le mieux reste l’été. Les eaux sont hautes et assez chaudes, autour de 23 degrés. Avec le beau temps, on navigue quasiment tous les jours. Le vent se lève en général à partir de 11 h du matin. Au début c’est léger, du coup on sort souvent en foil. On peut avoir de petits thermiques de 7 à 8 noeuds, mais la plupart du temps on a entre 10 et 15 noeuds au meilleur de la journée. C’est un thermique stable et régulier. S’il est couplé avec un vent météo, il est un peu moins stable, mais il va aller jusqu’à un bon 20 noeuds. Quand le ciel est bouché, en général, le vent foire. Il faut savoir que la météo est impossible à anticiper. Aucun site ne fonctionne et ne parvient à faire de prévisions fiables. Les interactions entre le relief, les échanges thermiques et le vent rendent imprévisibles l’arrivée, la force et la direction du vent. ALTITUDE KITE. École, surf-shop et snack. Tél. 0652593258