DÉFI KITE GRUISSAN
Une 7e édition mémorable
7 ans, c’est l’âge de raison pour le Défi kite. Comme les années précédentes, la compétition a été un succès sur bien des tableaux. 3 jours de course, trois jours de vent ! Normal, Gruissan est le coin le plus venté de France. Normal aussi, les rideurs ont souffert avec 140 km dans les bras et les jambes en 3 jours. Normal encore, les 400 rideurs ont quand même pris un plaisir dingue malgré l’âpreté des conditions. Normal enfin, on vous raconte tout ça avec des mots, des photos et la bonne humeur d’un Défi Kite réussi.
UN DÉFI, DES RECORDS
L’édition 2019 qui se déroulait du 24 au 26 mai sur l’incroyable plan d’eau de Gruissan était remarquable sur bien des points. Il semble bien que les années se suivent et les faits marquants continuent de s’additionner. Le record du nombre de participants a fait un bond en avant. 400 inscrits un mois avant le début de la compétition. La liste d’attente était longue comme un jour sans vent. Il semble bien que le Défi Kite ait perdu cette image de course pour l’élite. Les rideurs ont pleinement pris conscience que cette course est dure, mais accessible et surtout que ce n’est pas qu’une course. Et puis le boucheà-oreille fonctionne, devant l’avalanche de retours positifs, les amis viennent avec d’autres rideurs. La peur du vent de terre et du côté tempétueux du vent s’éclipse peu à peu ; Les gens viennent avec de petites ailes adaptées, ils ont bien vu que le dispositif de sécurité est solide. Juliette Veilhan une locale du spot confirme ce changement de perception : « Ça me tenait vraiment à coeur de faire le Défi car je suis cette course depuis plusieurs années, mais toujours de la plage. C’est un magnifique évènement pour toutes les générations et tous les niveaux ! » Depuis l’étranger, le concept commence à se faire voir aussi. Cette année 13 nationalités étaient représentées, les rideurs sont venus de toute l’Europe mais d’autres continents également. Amérique, Afrique, on sent que le monde commence à connaître l’existence de cet évènement. Pour Philippe Bru, l’organisateur, ce qui explique le succès du Défi : « C’est la passion. On représente une « niche » mais les athlètes ont envie de se retrouver, ce qui est le concept du Défi : se retrouver au même endroit au même moment sur une ligne de départ, quel que soit le support. C’est ce qui fait la magie et le succès de cet évènement hors-norme, le plus gros évènement de kitesurf au monde ! » Devant cet engouement Philippe ne cache pas ses ambitions : « Toute la communauté a suivi, nous n’avions pas que des racers en lice, l’évènement devient vraiment populaire. Cela laisse présager un avenir rayonnant pour le Défi Kite de Gruissan ! En tant qu’organisateurs, il conviendra juste que nous jugions au mieux de notre capacité à gérer 500, 600… et pourquoi pas 1 000 ailes, en étant ultra-ambitieux sur le long terme. Cela dit, c’est un doux rêve, il ne faut pas non plus s’emballer… »
140 KILOMÈTRES, C’EST BEAUCOUP EN TROIS JOURS !
C’est le second chiffre qui impressionne. Avec du vent tous les jours, les défieurs qui ont fait toutes les manches ont parcouru une belle trotte. 140 kilomètres, c’est l’équivalent Paris-Reims porté par le vent et les jambes. Faites le compte, c’est simple : deux manches de 20 bornes le vendredi, une de 20 et une de 40 le samedi et deux manches de 20 km pour achever les plus courageux. Le mot Défi prend tout son sens. Il faut être en forme pour tenir, ce qui est curieux, c’est que l’on soit dans les premiers ou dans les derniers, la fatigue est extrême. Imaginez, que ceux qui jouent la gagne font le parcours de 20 kilomètres en moins de 20 minutes. Mais à l’autre extrémité, les rideurs moins expérimentés peuvent mettre deux heures pour achever la même distance. Axel Mazella nous évoque la difficulté d’une manche quand on a la gagne en tête : « On faisait l’aller-retour en 16 minutes, c’est court, mais super-intense au niveau physique pour les jambes. Notre vitesse se situait entre 35 et 38 noeuds avec un Vmax à 42 noeuds. Donc tous tes muscles sont contractés. Tu fais tout pour ne pas t’éclater. Mais c’est aussi super-dur pour la concentration. Tu n’as pas le droit d’avoir une seconde d’inattention. Il faut surveiller les adversaires, le plan d’eau, les algues… Du coup, quand tu arrives tes muscles sont tétanisés. Mais tu es épuisé nerveusement aussi. Quand tu enchaînes deux ou trois manches, t’es vraiment claqué. Je n’ai pas souffert de crampe, je m’hydrate bien, je m’étire bien entre chaque manche et je suis bien préparé physiquement. Ça fait peur par moments quand t’es à fond, t’essaie de pas penser au crash. Mais quand tu ne dois rien lâcher pendant 15 minutes, tu te dis mais pourquoi on se met en danger pour ça, on se pose des questions sur la prise de risque. Je ne lâche pas parce que j’ai envie de gagner, c’est la hargne d’être premier et tu veux aller jusqu’au bout. Tu te dis qu’il ne faut pas que les entraînements, les sacrifices ne servent à rien, donc tu calcules plus tard. J’ai fait des chutes à cause des algues que je n’arrivais pas à enlever, mais c’était rien. Par contre Théo a fait une chute à 35 noeuds le dernier jour, il s’est fait vraiment mal. » Pour beaucoup d’autres, il s’agit avant tout d’une lutte avec soi même, essayer de caper pour passer la bouée du premier coup, car quand il faut tirer des contrebords mathématiquement la distance se rallonge, c’est dur pour le moral et pour les jambes souvent peu entraînées à rester des heures de suite sur une planche. Charles Legrand, dit « l’amiral », nous livre ses impressions en tant que novice du Défi
Kite : « En fait sur les risques, je n’avais pas peur d’un problème physique. Tu vois que l’encadrement est important, l’accent est vraiment mis sur la sécurité et le briefing m’a beaucoup rassuré. J’avais une petite appréhension pour la distance, mais le Tiki est beaucoup plus confortable. Trois semaines avant j’avais fait sur l’étang de Thau un raid de 22 km suivi d’une heure de nav, donc je savais que je pouvais le faire. C’est le départ avec 400 autres rideurs et le risque de m’emmêler qui m’inquiétait. J’avais surtout peur de ne pas finir la course et d’être déçu. Quand il y a eu beaucoup de vent, je suis allé kiter pour voir et j’étais très fier de sortir avec un vent aussi violent. Durant la manche c’était pas de la lutte tout le temps, il fallait surtout gérer l’effort physique pendant toute la durée. » Donc au final les premiers et les derniers repartent rincés, fatigués mais heureux d’avoir terminé !
LA FÊTE AU TROT
J’ai eu la chance de me poster sur la plage le dernier jour. Le vent était franchement fort. Vers Port La Nouvelle on se faisait fouetter les gambettes et le matos photo criait pitié. 45 noeuds bien secs avec du sable qui volait de partout, de quoi se faire remplir les portugaises en quelques minutes. Je pensais voir des rideurs en mode survie, avec des grimaces de douleur, des rictus de peur, mais non… Au contraire, c’était une véritable explosion de joie au ras de la plage. Tout le monde ou presque était en mode décontraction. J’ai eu droit au plus beau défilé de sourires et de signes amicaux qu’il m’ait été donné de voir. Pas de stress, des mecs et des filles concentrés, mais qui profitaient de cette orgie de glissade le long de la plage. Certains étaient bien dans la course, mais on sentait que finalement la compétition était secondaire et que le plaisir de rider en groupe était juste parfaitement satisfaisant. Pour Sylvain Maurin, le Défi kite est une combinaison réussie de plusieurs facteurs : « C’est ma 7e participation et j’ai trouvé le niveau très bon. Mais je pense que Philippe Bru lors du briefing fait très bien passer le message sur les dangers de la Tramontane. Lors de la journée violente, ça a filtré et beaucoup de gens n’y sont pas allés. Philippe est très bon, il a l’audace de faire ce genre de course, il fait une parfaite interface entre le vent et les coureurs. Il connaît le spot par coeur, il prend des précautions et les mecs l’écoutent et comprennent. Avec le défi il a réussi une recette magique. Celle d’une course où les rideurs lambdas côtoient des tops rideurs comme Axel Mazella, Alexandre Caizergues. Ça motive les gars de naviguer avec des bons. On n’est ni dans l’élitisme ni dans la course de beaufs. C’est marrant, tous les rideurs ont cet esprit de compétition, même le 250e ne lâche rien il vendrait sa famille pour doubler le 249e. Mais il y a cet esprit
global, comme si on était sous une cloche à fromage. Au final on a tous le smile, même celui qui ne termine pas sa manche et qui s’est emmêlé est content. Smile sur l’eau et smile le soir. Et si tu t’écoutes pas, tu termines à 3 heures du mat’ tous les soirs. »
RECORD DE SMILES
Voilà en fait il y a effectivement un Défi sportif. Il n’est pas le même selon les kiteurs, certains veulent gagner, d’autres ne veulent pas finir dernier ou mal classé, beaucoup se battent contre eux même, pour finir simplement. Et quand ils ne le sentent pas, ils ne prennent pas le départ, sans honte. Mais la fête du kite a un sens et c’est à peu près le même pour tous : Remplir ses objectifs, prendre du plaisir sur l’eau et à terre. Alex Caizergues le kiteur le plus rapide du monde nous résume cela : « J’ai fait 6 Défi sur 7 ! C’est avant tout la convivialité qui me donne envie de venir et de me frotter à la meute ! Parce qu’on parle bien ici d’une meute !!! Quand tu as 50 personnes autour de toi au départ, c’est un peu délicat et un poil stressant, mais quand tu croises 300 rideuses et rideurs sur le bord retour, c’est tout simplement Extraordinaire. Que les kiteurs n’hésitent pas à s’inscrire très tôt… Pour ne pas passer à côté de ce qui est devenu la plus grande TEUF du kite en France et dans le Monde. » Chez les rideurs qui se tiraient la bourre, il y avait une sorte d’entente, si le groupe sort faire la fête tout le monde y va et tout le monde rentre en même temps, celui qui esquive triche ! Alexia Fancelli la gagnante confirme sur la bonne ambiance générale : « Oui tout le monde avait l’air heureux d’être là, de faire partie de cette édition à guichets fermés et de participer à ces manches XXL ! Des rideurs qui étaient sur liste d’attente sont même venus pour être présents, assister au spectacle et faire la fête. Je retiens que malgré la fatigue qui s’accumule et la meute sur l’eau, personne n’est parti en cacahouète à se croire bien plus fort que son niveau. Après les manches, tout le monde avait le smile et il me semble que nous avons tous vécu un super week-end. »
RECORD DE CADEAUX
Vous l’avez compris, le vent et les rideurs étaient à la fête, mais celle-ci débordait abondement du plan d’eau. Pour faciliter les choses, avec des conditions météo aussi généreuses, les courses n’ont jamais commencé trop tôt. Il fallait cela pour profiter des nombreux concerts et des apéros divers et variés : marques, collègues, orga… Ajoutons les animations sur la plage au top grâce à l’excellent travail de Jeff Valet. Seuls les amateurs de scrabble ont pu trouver le temps long. Bien sûr les partenaires ont joué un rôle clef dans l’ambiance générale, sans eux le Défi aurait une autre allure. Le Défi kite est devenu un véritable salon pour les marques. Que ce soit avec les nombreux exposants présents sur le site ou les partenaires extérieurs, les sujets de curiosité et de discussion ont bien animé le site. Et pour achever le tableau, n’oublions pas les averses de cadeaux qui n’ont pas arrêté de tomber entre les mains des défieurs. En vrac Duotone qui a offert une board Jaime 2019, Slingshot une board
twintip vision et un surf. Zeeko s’est fendu d’une aile. Manera a distribué 2 combis et 2 harnais, Ion a donné une combi et un harnais. Soorüz a offert un casque, un gilet et un poncho. Quadran a lâché 2 combinaisons Kalypse et Kalypse 2 autres combis, Cabrinha a fourni des boardbags, Lavazza a régalé des cafetières. Forward wip a offert des lunettes, Le Petit Balthazar a couvert de bouteilles de vin le gagnant, St-Jacques a procuré une combi, et nous ne parlons que des gros lots, on ne cite pas les t-shirts, casquettes distribuées.
RECORD DE CATÉGORIES
On le sait, les façons de kiter sont multiples. Sans parler des ailes à caisson ou à boudin, les types de planches offrent des performances très variées et difficiles à mettre sur un même tableau. L’organisation fait donc des classements par catégories. On retrouve les planches directionnelles type surfs avec ou sans straps. Le twin-tip qui est la catégorie la plus représentée avec 220 inscrits. C’est l’occasion de revenir sur la victoire de Benoît Gomez sur ce support. Il se place à la treizième place, ce qui est une belle performance compte tenu de l’engin aussi adapté à la longue distance que le sorbet au barbecue. Il parvient à faire une manche de 8 et une de 7 le dernier jour dans le vent démesuré. C’est assurément un joli coup. Vient enfin la catégorie Tiki emmenée par un Sylvain Maurin à la bonne humeur plus solide qu’un coup de tramontane. 39e sur un cet engin aussi joli que confortable, c’est une perf. À noter que la secte au Tiki compte de plus en plus d’adeptes. Sylvain fervent défenseur de l’engin nous parle avec délectation de cette catégorie : « C’est culotté de proposer le Tiki pour une course, l’engin n’est pas fait pour ça. Mais il a permis à pas mal de gens d’essayer le Défi et il leur a permis de terminer une manche. Son confort, sa facilité au virage, le cap qu’il peut faire, on est content d’avoir promu cette catégorie-là. On amène des gens qui sont en mode free-ride, qui se moquent du classement. Ça me fait plaisir quand un
pote qui hésitait à participer vient me remercier car le Tiki lui a permis d’être acteur mais de lui donner une vue imprenable sur la course. » Mais qui dit course, dit aussi performances. Là, le foil est devenu l’engin incontournable et indiscutable, la Formule 1 du kite qui survole le plan d’eau. Plus de vitesse, plus d’angle, moins d’eau dans les mollets mais plus d’eau dans les gencives en cas de gamelle, il faut bien un défaut. Au classement scratch, c’est la discipline reine. Les 6 premiers sont en foils, il fallait un Alexandre Caizergues affûté comme une fusée pour pénétrer le top 10 avec sa directionnelle.
RECORD DE MANCHES EN POCHE
6 sur 6, tout le monde a bien reçu le message d’Axel Mazella le grand gagnant de ce Défi du haut de son foil. Une domination sans partage mais pas sans difficulté, la lutte avec les deux Théo (De Ramecourt et Lhostis) a été parfois âpre et longue. De l’aveu d’Axel, « ce qui était dur, c’est que je me suis battu avec Théo De Ramecourt cette année, les premières manches on était souvent très proche jusqu’à la ligne d’arrivée, donc il fallait pousser jusqu’au bout et c’était super-intense, il ne lâchait rien. » Mais que ce soit dans le vent modéré, fort ou ultra-fort Axel a toujours franchi la ligne d’arrivée le premier. Belle perf également pour les filles qui ont assuré aussi au classement scratch. Alexia Fancelli commence même sur les chapeaux de roues avec une première manche magistrale où elle termine 14e. Après les 6 manches, elle est classée 22e, ça fait juste 378 rideurs derrière elle ! Elle s’empare de 4 manches tout de même avec une belle lutte contre Anaïs Mai Desjardins. Elle aussi est auteure d’une belle prestation, elle est la seule à concurrencer vraiment Alexia et termine 26e au classement général. La gagnante nous livre le moment fort de ce Défi : « Le plus difficile pour moi fut cette 3e journée apocalyptique, avec des claques à plus de 50 noeuds. J’étais à la rue avec ma 4 m et mon foil, les algues étaient encore plus perturbantes sur le parcours que les jours précédents, et j’avais une grosse appréhension. Je dois l’avouer, j’ai eu un peu peur et j’ai levé le pied ce jour-là, mon défi était d’arriver à terminer les courses. Hélas, je n’ai pas pu finir la manche 6, car on m’a emmêlé à la bouée ! Un grand bravo à tous ceux qui ont défié la Tram’ et un big up aux filles qui ont scoré durant cette journée ! » Dans ces combattantes, citons Nadine Poncept qui gagne en directionnelle et qui se retrouve à une place de la fusée toujours pétillante et rapide Ariane Imbert qui gagne en twin-tip. Alex Caizergues Le gagnant en planche directionnelle nous résume son Défi en quelques mots : « Beaucoup, beaucoup, mais alors beaucoup de frissons !!! On a vraiment été gâté par les conditions, 3 jours de Tram, de plus en plus forte (le temps que tout le monde se mette dans l’ambiance) et six belles manches. Des départs fous (on ne peut vivre ça qu’ici !), de grosses batailles avec Benoît Gomez, Albéric Dubray, Seb Garat, Jérôme Serny… et à distance avec la plupart des foils. Le moment le plus cool a été pour moi le 1er départ, avec je pense quasiment la totalité des concurrents, grâce à une Tramontane coopérative qui soufflait alors à seulement 20-25 noeuds. On était tous là, le spectacle était grandiose ! »