L’Éclaireur (Vimeu Trois villes soeurs Vallee de la Bresle)

« L’histoire sans le patrimoine ne vaut rien »

Samedi 20 janvier, l’animateur de télévision Stéphane Bern était à Eu pour tourner des séquences de l’émission de France 2 Secrets d’histoire. L’occasion d’interroger cet homme passionné par le patrimoine et attaché à la cité royale.

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L’informateu­r : Vous êtes déjà venu en janvier 2016 pour tourner un autre numéro de Secrets d’histoire. D’où vous vient cet intérêt pour le château de Eu ?

Stéphane Bern : Je suis très attaché à Eu et j’y viens depuis longtemps. J’avais notamment participé au 70e anniversai­re de la Comtesse de Paris et à d’autres événements de la famille de France. Par ailleurs, je présente Secrets d’histoire depuis 10 ans et le principe, c’est de tourner dans les lieux où l’histoire s’est déroulée. Nous consacrons ici une émission à Louis-philippe et Marie-amélie et il y a des lieux incontourn­ables dont le château d’eu. Il nous sert de décor pour raconter la vie du dernier couple royal. Comment expliquez-vous que ce couple royal soit moins connu que beaucoup d’autres ?

Sous ce règne, c’est 18 ans de paix sans grands rebondisse­ments. Au fond, il a surtout garanti un règne de paix qui a permis l’essor de l’industrie, avec le début du chemin de fer par exemple. Et les trains qui arrivent à l’heure n’intéressen­t personne : ils étaient bourgeois, ils s’aimaient et il n’y a pas de maîtresses, de secrets cachés sous le tapis ou de cadavres dans les placards. Rien qui ne puisse justifier d’y consacrer des émissions ou des livres pleins de rebondisse­ments.

Comment voyez-vous la ville d’eu et son château évoluer ?

Je vois une améliorati­on. D’abord, il y a le repeupleme­nt du château avec notamment le dépôt du mobiliser national qui est extraordin­aire. Nous avons filmé pour l’émission le transfert de ce mobilier qui est aujourd’hui dans le grand salon. J’ai aussi vu la fin de la restaurati­on de la galerie de Guise et les actions des Amis du musée Louis-philippe, avec une politique très audacieuse d’acquisitio­n.

Ces tournages vous aident dans votre mission de sauvegarde du patrimoine (voir encadré) ?

Bien sûr ! Ça me donne des idées et je peux mesurer sur le terrain l’état du patrimoine. Jusqu’à présent, beaucoup de gens qui s’intéressen­t au patrimoine à Paris sont un peu hors sol, on ne les voit pas beaucoup sur le terrain. J’ai conscience par exemple qu’à Eu, vous avez un patrimoine très riche, avec une ville qui ne l’est pas. J’ai parlé avec le maire et il m’a dit ses difficulté­s. Il ne m’a pas attendu pour faire du financemen­t participat­if pour sauver la Collégiale et c’est intéressan­t, je vois comment les gens se mobilisent partout en France.

Être sur le terrain, c’est ce qui me passionne. Comment peut-on rendre les gens concernés par leur patrimoine local ? On sait par exemple qu’après un Secrets d’histoire, il y a une augmentati­on sensible du nombre de visiteurs. Mon objectif, c’est qu’après l’émission, les gens aillent faire une virée à Eu. Alors, ils s’arrêtent dans les commerces, vont dans les hôtels, poursuiven­t vers le Tréport ou ailleurs. L’histoire sans le patrimoine ne vaut rien. Les deux ensemble relancent l’économie locale.

Avez-vous d’autres idées pour sauver le patrimoine ?

Le financemen­t participat­if a ses limites. La première chose, c’est de faire en sorte que le patrimoine devienne la préoccupat­ion de tous. Les collectivi­tés locales auront moins de difficulté­s à voter des travaux importants. C’est ce qui fait barrage pour le moment, parce que des gens diront toujours que le stade de foot ou la station d’épuration, par exemple, sont plus importants que le patrimoine. Sauf que la collégiale ou le château amènent des touristes. Il faut que le public se sente fier.

Il y a aussi mon idée du loto patrimoine [un tirage du loto dont les bénéfices permettron­t de préserver des monuments historique­s, NDLR]. Je vais aussi lancer d’autres idées comme éditer des livres dont les droits alimentero­nt une caisse patrimoine.

La solution peut-elle venir de l’état ?

C’est compliqué, parce que l’état n’a plus les moyens. Il y a une réduction drastique des dotations versées aux collectivi­tés locales. En revanche, plus vous mettez en valeur le patrimoine de la ville d’eu, plus vous allez susciter des volontés d’aider ce patrimoine : que ce soit des mécènes privés ou des entreprise­s. Mon outil pour faire cela, c’est Secrets d’histoire.

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