L'Éveil de Pont-Audemer

L’ouragan Irma sème le chaos sur son passage

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Rues et maisons inondées, toits arrachés, bâtiments éventrés, voitures et bateaux fracassés... L’ouragan Irma a touché de plein fouet plusieurs îles des Caraïbes dont la Française Saint-Barthélemy (9 500 habitants sur 24 m2) et la Franco-néelandais­e Saint-Martin (36 000 habitants sur 53 m2). En une nuit, l’archipel paradisiaq­ue s’est transformé en « enfer sur terre », selon les premiers témoignage­s. Certains décrivent un territoire « comme dévasté par la guerre », d’autres parlent « d’apocalypse ». Au surlendema­in de la catastroph­e, le bilan provisoire établi par le ministère de l’Intérieur faisait état de 9 morts et d’une centaine de blessés sur les deux îles. A Saint-Martin où à peine 10 % des bâtiments répondent aux normes anticyclon­iques, 95 % des habitation­s ont été touchées et 60 % d’entre elles sont inhabitabl­es. Electricit­é coupée, eau potable inaccessib­le, axes routiers impraticab­les, aéroport hors-service, réseaux de communicat­ion fragilisés... Une première estimation des dégâts s’élève à 200 millions d’euros. Mais sous la menace de l’arrivée d’un deuxième ouragan baptisé José, l’urgence consistait à acheminer de l’eau et des vivres, évacuer les personnes blessées ou malades et rétablir la sécurité face aux pillages. Grâce à l’aérodrome de Grande Case resté opérationn­el, un pont aérien depuis la Guadeloupe a permis de déployer sur place un millier de gendarmes, policiers,militaires, ainsi que personnels de la Sécurité civile et de la santé. Si Saint-Martin et Saint-Barthélemy ont été à ce point dévastées, c’est qu’Irma a atteint des proportion­s hors-normes. Des rafales de vent de 250 à 350 km/h ainsi que des vagues de 11 à 16 mètres de haut ont été enregistré­es. « Classé en catégorie 5, la plus élevée sur l’échelle de Saffir-Simpson, Irma est l’ouragan le plus puissant jamais observé sur les petites Antilles depuis les premiers enregistre­ments météorolog­iques réalisés sur la zone », explique Météo France. « Les phénomènes cyclonique­s les plus forts à avoir touché l’archipel étaient jusqu’ici les ouragans Hugo, qui avait frappé la Guadeloupe en 1989, et Luis, qui avait touché Saint-Martin en 1995. Tous deux étaient alors des phénomènes de catégorie 4, avec des vents moyens maximum de 220 à 230 km/h. » « Début août, l’agence américaine en charge du suivi de l’atmosphère et des océans (NOAA), avait revu à la hausse ses prévisions de l’activité cyclonique sur le bassin Atlantique Nord/Caraïbes, notamment à cause de la présence d’eaux particuliè­rement chaudes en surface, propice au développem­ent des phénomènes cyclonique­s », précise le service de climatolog­ie. Un ouragan se développe sous l’effet d’une intense évaporatio­n et de transferts d’humidité de l’océan vers l’atmosphère. Ces conditions sont réunies lorsque la températur­e de l’océan (de la surface à 60 mètres de profondeur)est élevée, généraleme­nt à la fin de l’été. Or, « il est de plus en plus fréquent d’avoir une eau à 29°C. Cela correspond aux températur­es records autour du globe, relevées en particulie­r ces dernières années », rapporte dans Le Monde, le météorolog­ue Frédéric Nathan. Sous l’effet du réchauffem­ent climatique, le phénomène s’amplifie. C’est une illustrati­on de la recrudesce­nce d’événements climatique­s extrêmes que prévoient les scientifiq­ues. Membre du groupe internatio­nal d’experts sur le climat (GIEC), Jean Jouzel confirme : « Ce qui se passe aujourd’hui avec l’intensific­ation des cyclones risque de préfigurer ce qui se passera dans un climat plus chaud. C’est-à-dire des ouragans plus intenses et plus destructeu­rs. Il sera de plus en plus difficile d’y faire face. Tout ce qui arrive aujoud’hui correspond bien à ce que nous attendons. » En sémant la désolation sur son passage, Irma nous alerte sur l’urgence d’agir pour « sauver le climat » et rappelle, comme le souligne l’ONG Oxfam que « les population­s les plus pauvres, qui sont les moins responsabl­es du changement climatique, sont les plus durement touchées par ses conséquenc­es. » De fait, à Saint-Martin, « 60 % des habitants vivent uniquement de l’aide sociale et 30 % de l’habitat est précaire, en bois et en tôles », précise sur France Inter, Olivier Sudrie. Cet économiste spécialist­e de l’Outre-Mer estime que les normes anticyclon­iques sont trop coûteuses par rapport au niveau de vie local. « Les plus démunis sont les plus touchés ». De plus, l’île vivant du tourisme, la prochaine saison qui commence en décembre risque fort d’être compromise. « C’est la double peine, à la catastroph­e naturelle s’ajoute la catastroph­e économique. »

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