Groupe Risloise : que devient l’argent de la Région ?
L’entreprise Groupe Risloise à Bernay a été placée en redressement judiciaire (notre édition du 7 février). Les 400 000 € prêtés par la Région Normandie sont-ils volatilisés avec ?
Quid du « service aprèsvote » vanté par la conseillère régionale en charge du dispositif A.R.M.E. (Anticipation Redressement Mutations Economiques) de la Région Normandie, Christiane Vulvert, lorsqu’elle avait visité le site de Groupe Risloise à Bernay, en mai 2017 ?
La question mérite d’être posée. Car, depuis, l’entreprise Groupe Risloise, bénéficiaire d’un prêt à taux zéro de la Région à hauteur de 400 000 €, a été placée en redressement judiciaire en date du 30 janvier 2018 - l’entreprise s’est déclarée en cessation de paiement au 31 octobre 2017. Dès lors, il semblerait que les 400 000 € versés par la Région soient définitivement perdus, noyés dans les dettes de l’entreprise. Voici ce que le service communication [Ndlr : ni le président de la Région, Hervé Morin, ni la conseillère régionale Christiane Vulvert n’ont répondu à nos sollicitations téléphoniques] a précisé sur le dossier : « L’apport de la Région a été accordé et versé sous forme d’un prêt à taux zéro de 400 000 € adossé à des cofinancements privés de 500 000 €. Cette première phase d’intervention devait être complétée ensuite par une levée de fonds qui malheureusement n’a pas eu lieu. La perte d’un client important est venue aggraver la situation de l’entreprise qui, à nouveau, est passée dans le rouge. » S’en sont suivis une procédure de sauvegarde, puis un placement en redressement judiciaire. Du classique quand la trésorerie d’une entreprise ne passe pas le cap des trous d’air.
Blanc-seing ?
Or, dans ce cas présent, des questions subsistent. Est-ce que les services compétents de la Région avaient réellement pris soin de bien regarder la situation financière de l’entreprise ? Est-ce que toutes les garanties prévues pour apporter une aide publique étaient réunies ? Les 400 000 € versés n’ont-ils été pas un blancseing, vue la rapidité à laquelle Groupe Risloise a plongé, en quelques mois seulement ?
A la Région, on se contente d’observer ceci : « L’ensemble des dettes de l’entreprise est gelé pendant la procédure et la Région, au même titre que les autres créanciers de l’entreprise, a déclaré sa dette. » Traduction : les 400 000 € sont perdus ! En tout cas, on ne voit pas comment il en serait, désormais, autrement !
Personne ne se prononce réellement sur cette situation. Pas même le président du tribunal de commerce de Bernay, Philippe Bataille, évidemment au courant des déboires de Groupe Risloise, mais qui n’a pas le dossier entre les mains. « C’est très étonnant », admet-il, en évoquant aussi que la « préoccupation première » du moment était le fait de « sauver des emplois », en l’occurrence les 115 CDI et la trentaine de CDD. Trois offres de reprise sont à l’étude, dont deux paraissent « sérieuses ». Quant aux comptes de l’entreprise, il revient à l’administrateur judiciaire de les éplucher afin d’en tirer toutes les conséquences. Les chiffres ne mentent pas.
Si le soutien de la Région à la « consolidation » d’une entreprise en vue de maintenir des emplois est louable, l’accord d’un prêt (argent public) à cette même entreprise - au détriment d’une autre - réclame toute la transparence nécessaire. En ce qui concerne Groupe Risloise, le timing, à quelques mois d’une élection législative pour laquelle Hervé Morin avait délibérément choisi comme [son] successeur le 1er adjoint de Bernay Pierre Bibet peut susciter certaines interrogations. Il est troublant que les services de la Région aient cautionné Groupe Risloise en un temps record pour terminer par un tel résultat.