L'Express (France)

Les réseaux sociaux mis au pas

-

plus compliqué que le sujet n’a pas été abordé lors de l’indépendan­ce de la Côte d’Ivoire, en 1960. « Ceux qui l’ont acquise se sont fait établir, avant leur majorité, un jugement supplétif d’acte de naissance, précisant que le père était présumé d’origine française », explique la juriste Patricia Armand. Mais, à l’époque, bien peu connaissai­ent la démarche. Petite-fille d’un administra­teur foncier, Fernand Combaluzie­r, cette femme de loi n’a jamais pu devenir française. Son ancêtre ne figure nulle part dans les archives de l’état civil colonial, en mauvais état.

Ce n’est pas la seule incohérenc­e. « Comment peut-on avoir été hier pupilles de la Nation – et donc enfants de l’Etat – et ne pas être français aujourd’hui ? C’est une aberration », s’insurge Calile Sahily, le président de l’Amicale des anciens de l’orphelinat de Bingervill­e, où ces enfants « illégitime­s » étaient déclarés « orphelins ». Pour l’administra­tion, il était en effet hors de question de les laisser avec leur mère. Le doyen du « palais », André Manket, 90 ans, a encore les larmes aux yeux quand il raconte son kidnapping. « Ils sont venus me chercher dans mon village de pêcheurs d’Anono et m’ont emmené de force. J’avais 7 ans. Ma tante était en pleurs », témoigne le vieil homme, qui est arrivé à

Bingervill­e entouré de deux gardes coloniaux. « On m’a dit : Guerard, c’est fini. C’était le nom de votre papa. Maintenant, vous prendrez le nom de votre mère. » Même s’ils ont reçu une bonne éducation, le traumatism­e reste vivace. « Nous étions la risée de tous. Nos mères étaient traitées comme des prostituée­s », raconte Monique Yace.

Oublié, ce pan de l’Histoire est pourtant largement documenté. A l’époque, l’Europe est corsetée. Pour beaucoup, le départ aux colonies est donc perçu comme une libération sexuelle. Un certain Dr Jacobus avait même écrit en 1897 une sorte de bréviaire sexuel, L’Amour aux colonies, qui sera réédité 37 fois...

Dans sa petite maison d’Abidjan, Jeanne reste amère. « On en veut à la France, qui n’a rien fait pour nous. » Cette année, elle a néanmoins réussi à retrouver une partie de sa famille paternelle. Et devait rencontrer son demi-frère, avant que la crise du coronaviru­s ne l’en empêche. Qu’importe, elle compte bien arpenter dès que possible les allées du château de la Motte-Servolex, en Savoie, ou admirer la vue depuis la villa Kerylos de Beaulieu-surMer. Des propriétés qui appartenai­ent à son grand-père, à l’époque où elle jouait dans les champs de bananiers de Tiassalé.

WInternet pourrait être soumis à une réglementa­tion draconienn­e, souhaitée par le président Erdogan. evenu l’heureux père d’un quatrième enfant, Berat Albayrak, ministre de l’Economie et gendre du président Erdogan, partage la nouvelle le 30 juin sur Twitter. Les messages de félicitati­ons affluent… comme les commentair­es narquois. « Nommez ce bébé ministre, il ne pourra qu’être meilleur que son père », écrit un internaute qui récolte plus de 500 « likes » de personnes amusées par sa référence à la crise économique. Le lendemain, 11 sont arrêtés pour injures. Et le président Erdogan se fend d’un message public : « Vous comprenez maintenant pourquoi nous nous opposons aux réseaux sociaux ? Pour mettre fin à ce type d’immoralité­s ! […] Ces réseaux ne conviennen­t pas à ce pays et nous allons soumettre cela rapidement au Parlement, car nous voulons que ces canaux soient fermés, contrôlés. »

Cette annonce laisse présager le durcisseme­nt d’une censure qui n’est pas nouvelle : 206 351 sites ont été bloqués par le pouvoir au cours des cinq dernières années. « Il y a chez les jeunes une forme de lassitude à l’encontre d’Erdogan [NDLR : au pouvoir depuis dix-huit ans]. S’il ne parvient pas à conquérir leur vote, le pouvoir va chercher à les éloigner des isoloirs, considère Ceren Sözeri, chercheuse en science des médias à l’université Galatasara­y. Recourir à la censure et les empêcher de s’informer de façon indépendan­te est un moyen de décourager leurs espoirs de changement. »

En emprisonna­nt les journalist­es d’opposition (plus de 130 sont derrière les barreaux) et en faisant main basse sur la presse écrite et les chaînes de télévision par le biais d’hommes d’affaires qui lui sont acquis, le président jouit d’un avantage médiatique qu’il n’entend pas voir remis en question par Internet. De même que ses rêves de fondation d’une « génération pieuse » ne doivent pas être compromis par la contre-culture des réseaux sociaux. « Mais il ne faut pas s’y tromper : les Turcs, et surtout les jeunes, ont toujours trouvé les outils techniques pour déjouer la censure. Ils y parviendro­nt encore demain », veut espérer Ceren Sözeri.

DW

la soutinrent ; mais pour le Koweït, Etat souverain membre des Nations unies, la mobilisati­on fut générale. Car, depuis le milieu des années 1970, évolution des normes internatio­nales oblige, il existe un tabou sur l’annexion. Cette dernière pourrait-elle redevenir de saison ? C’est ce que peuvent laisser craindre des exemples récents. La Crimée (2014), bien sûr, dont les modalités d’incorporat­ion ressemblèr­ent davantage à celles du territoire des Sudètes (1938) qu’à un processus démocratiq­ue bien conduit, et dont l’appartenan­ce à la Russie n’est reconnue que par une poignée d’Etats, tels la Corée du Nord, le Venezuela ou le Zimbabwe. Mais aussi le changement subtil de statut (2019) du Cachemire et du Ladakh, désormais institutio­nnellement « normalisés » par Delhi. Ou encore la création de nouveaux districts administra­tifs par la Chine sur des îles disputées (2020).

Des amitiés fragiles

La Cisjordani­e n’est pas la Crimée : Israël n’est pas démuni d’arguments juridiques quant au statut exact des territoire­s qu’il considère comme « disputés ». Et il est probable que le pays agirait comme il le fit en 1981 pour le plateau du Golan, saisi en 1973 à la suite de l’agression syrienne : par une simple extension de la loi nationale sur le territoire, sans que jamais le mot « annexion » ne soit prononcé. Mais avec le risque de voir cette incorporat­ion de fait n’être reconnue par aucun Etat – peut-être pas même les Etats-Unis – et de mettre en difficulté les amitiés que le pays a pu construire en Europe et au Moyen-Orient. Et de légitimer un peu plus, nolens volens, le retour des politiques de prédation territoria­le.

W

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France