L'Express (France)

Uber, entreprise précaire

- par Raphaël Grably

Le terme d’« uberisatio­n » symbolise notre époque à lui tout seul. Celle de la révolution technologi­que, donnant à chacun la possibilit­é de travailler en totale autonomie. Celle, aussi, d’une précarité critiquée en Europe comme aux Etats-Unis, fruit d’un capitalism­e aux effets éloignés de la promesse d’un « monde meilleur ». Souvent vanté dans la Silicon Valley, ce modèle semble aujourd’hui se retourner contre Uber, mais aussi contre Airbnb, son alter ego hôtelier.

La Cour de justice de l’Union européenne vient ainsi de valider la possibilit­é, pour la mairie de Paris, de réglemente­r Airbnb, ce qui revient à limiter significat­ivement son offre. Une potentiell­e jurisprude­nce dramatique pour la firme. Dans le même temps, Uber fait face sur de nombreux marchés à un risque de requalific­ation du statut de ses chauffeurs en salariés, même sur ses propres terres californie­nnes. La menace pèse aussi sur son service de livraison Uber Eats : la Cour suprême espagnole a déjà requalifé ses livreurs en employés. Malgré leur modèle économique fondé sur un simple rôle d’intermédia­ire, non soumis aux cotisation­s sociales, Airbnb comme Uber ne parviennen­t pas à gagner de l’argent. L’obligation de salarier leurs prestatair­es enterrerai­t tout espoir de rentabilit­é future.

Ces deux stars de l’uberisatio­n, encore adulées et copiées hier, se retrouvent désormais à une décision de justice de la faillite. L’avenir d’Uber pourrait reposer sur une autre promesse emblématiq­ue de la Silicon Valley, celle des véhicules autonomes. Un salut qui devra passer par d’importants progrès techniques, des modificati­ons structurel­les de nos villes et un soutien franc du régulateur.

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